La crise des ordures continue de secouer le Liban. Tandis que des dizaines de milliers de Libanais étaient réunis samedi à Beyrouth pour exprimer leur « rancoeur » envers une classe politique jugée corrompue et incapable d’offrir les services de base, le gouvernement libanais continuait, lui, à chercher une issue à la crise. Organisée par le collectif « Vous puez », la campagne de protestation avait commencé à la mi-juillet, après la fermeture de la plus grande décharge du Liban et l’amoncellement des déchets dans les rues. Les responsables de la campagne exigent notamment la démission du ministre de l’Environnement, Mohammad Machnouk, le transfert de la collecte des déchets aux municipalités, le jugement des auteurs des violences du week-end dernier, dont le ministre de l’Intérieur, Nohad Machnouk, et surtout la tenue d’élections législatives et présidentielle. « Nous donnons au gouvernement 72 heures. Si nos demandes ne sont pas satisfaites, nous irons vers l’escalade », affirmaient les organisateurs de la campagne.
Au-delà du tohu-bohu provoqué par cette campagne antigouvernementale, c’est surtout sa portée symbolique qui retient l’attention, la mobilisation des Libanais illustre le ras-le-bol de la population face à un système politique sectaire qui paralyse les institutions de l’Etat. Ce qui est exceptionnel dans cette campagne, c’est qu’elle a réuni des représentants de toutes les communautés et factions libanaises : sunnites, chiites, druzes, maronites, etc. Le régime politique libanais est basé sur une répartition du pouvoir entre les différentes factions, et ce, conformément à un système de quotas. Ce système, profondément ancré dans l’histoire du Liban, tire son origine des minorités qui vivaient dans les régions montagneuses comme les Druzes et les Maronites, qui ont conservé une certaine indépendance. Bien que reflétant la composition sociale du pays, ce système paralyse les institutions de l’Etat en ébréchant les responsabilités, créant ainsi un climat favorable aux querelles politiques. C’est ainsi que le Liban vit depuis quelque temps dans le flou constitutionnel, et le poste de président de la République est vacant. Pourtant, et malgré tous ses défauts, le système politique libanais est très représentatif. Et une éventuelle remise en cause de ce système ouvrirait sans doute la voie au chaos politique. Si le gouvernement libanais venait à chuter, il serait remplacé par un autre gouvernement, mais le risque véritable pour le Liban serait la chute de l’Etat et de ses institutions. Ce qui est impératif aujourd’hui, c’est de travailler sur les failles du système, afin d’éviter son effondrement.
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