Lors de sa réunion cette semaine à Camp David avec les six monarchies du Golfe (CCG : Arabie saoudite, Bahreïn, Emirats arabes unis, Koweït, Oman et Qatar), le président Barack Obama a tenté de convaincre ses alliés du bien-fondé de son approche avec l’Iran. En négociant avec l’Iran chiite un accord sur le nucléaire, le chef de l’exécutif américain a froissé les monarchies sunnites du Golfe. Ces dernières craignent, en effet, que l’accord en question n’ouvre la porte à un rapprochement diplomatique entre Washington et Téhéran et qu’il ne finisse par renforcer l’influence iranienne dans la région. Obama a cherché à rassurer ses alliés, réitérant l’engagement des Etats-Unis à l’égard de la région et affirmant que son pays est prêt à répondre à toute menace extérieure contre l’intégrité territoriale des pays du Golfe, en allusion à l’Iran.
Les Américains pensent que sans accord nucléaire, et même avec les sanctions économiques, l’Iran poursuivra ses activités en vue d’obtenir la bombe atomique. Mais les pays du Golfe craignent moins la bombe atomique iranienne qu’un renforcement de l’influence de Téhéran dans la région. Ils craignent surtout qu’une éventuelle levée des sanctions, imposées à l’Iran, ne donne libre cours aux activités déstabilisatrices de Téhéran dans la région. L’Iran, principal gagnant de l’invasion américaine de l’Iraq en 2003, qui a renversé le régime sunnite de Saddam Hussein et a permis à une majorité chiite de prendre les commandes du pays, cherche à étendre son influence dans la région et est déjà très actif en Syrie, au Liban et au Yémen où il soutient les rebelles Houthis. Le soutien iranien au régime de Bachar Al-Assad coûte chaque année à la République islamique des milliards de dollars. Or, une éventuelle levée des sanctions risque de conforter financièrement l’Iran et lui permettre de mieux soutenir le régime syrien à travers la fourniture d’armes et d’équipements, ce que rejettent les pays du Golfe. Le ministre syrien de la Défense était récemment en visite à Téhéran pour demander une aide financière de 6 milliards de dollars. Il n’en a obtenu qu’un. Les pays du Golfe reprochent encore à l’administration américaine de ne pas être intervenue en Syrie pour renverser le régime alaouite de Bachar Al-Assad. Ils craignent que l’influence grandissante de l’Iran chiite dans la région n’alimente le soutien populaire aux mouvements extrémistes sunnites, comme l’Etat islamique en Iraq, qui se posent comme les défenseurs de l’islam sunnite.
La réunion de Camp David n’a pas permis aux pays du Golfe d’obtenir un engagement écrit des Etats-Unis, en faveur de la sécurité dans la région. Obama a toutefois promis une coopération militaire plus accrue avec les pays du Golfe et le déploiement d’un système de missile pour la défense de la région. Washington ne semble, en effet, pas prêt à « sacrifier » l’accord nucléaire avec l’Iran qu’Obama a passé de longues années à négocier. Le rapprochement avec Téhéran fait-il partie d’une politique de rééquilibrage américaine dans la région, entre sunnites et chiites ? Cela semble probable. Une situation qui poussera les pays du Golfe à chercher de nouveaux alliés en Occident, comme la France ou la Grande-Bretagne.
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