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Riyad et le conflit syrien

Mardi, 05 mai 2015

L’Arabie saoudite et la Turquie seraient en négociation pour former une coalition mili­taire dans le but de défaire l’armée du pré­sident Bachar Al-Assad et d’obliger ce dernier à quitter le pouvoir en Syrie. C’est ce qu’af­firment de sources proches du dossier. Si ces négo­ciations aboutissaient, elles devraient se traduire par l’envoi en territoire syrien de troupes turques, soute­nues par des frappes aériennes saoudiennes, en vue de soutenir l’opposition syrienne modérée.

Les négociations seraient menées avec la média­tion du Qatar, qui en a informé l’Administration américaine lors de la visite de l’émir Tamim Bin Hamad Al-Thani, aux Etats-Unis, en février. Le pré­sident Barack Obama, qui veut éviter toute implica­tion militaire directe dans les conflits du monde arabe, encourage ses alliés, notamment les pays du Golfe, à jouer un rôle plus important pour régler ces conflits. Cette politique américaine a poussé Riyad à former une coalition militaire régionale pour interve­nir dans le conflit au Yémen, en vue d’affaiblir les rebelles houthis et restaurer le régime du président Abd-Rabo Mansour Hadi, aujourd’hui en exil en Arabie saoudite.

Cette même politique incite aussi Riyad à activer sa politique à l’égard du conflit syrien, qui s’éter­nise, à un moment où les Etats-Unis se contentent de raids aériens contre l’« Etat islamique », sans vouloir attaquer l’armée d’Assad, au grand dam de Riyad mais aussi d’Ankara, qui, tous deux, veulent le départ du président syrien. La Turquie avait, à maintes reprises, sou­ligné son désir de voir partir Assad du pouvoir. Mais ses responsables ont indiqué qu’en tant que pays non-arabe, la Turquie ne veut pas s’impliquer davantage contre le régime syrien, à moins que l’Arabie saoudite intensifie, de son côté, son intervention en Syrie. Ankara ne veut pas ainsi paraître comme celle qui intervient seule sur le terrain miné du conflit syrien et cherche au contraire une couverture politique arabe, qui serait apportée par une coali­tion régionale contre Assad.

Rien ne prouve cependant que les pourparlers turco-saoudiens aboutiront, même si Riyad se montre disposé à se rapprocher des positions de la Turquie sur des questions régionales, telle la position vis-à-vis des Frères musulmans. Le nouveau roi saoudien, Salman Bin Abdel-Aziz, aurait ainsi adouci sa posi­tion à l’égard de la confrérie, déclarée « organisation terroriste » par Riyad en mars 2014, pour faciliter la formation de cette coalition militaire anti-Bachar, qui inclurait le Qatar.

Aussi bien Doha qu’Ankara sont des alliés régio­naux des Frères musulmans. L’Arabie saoudite vou­drait même le soutien des Frères musulmans yémé­nites, en vue de former une large coalition de forces politiques sunnites du Yémen contre les Houthis.

La position de l’Arabie saoudite s’explique par sa volonté de stopper ce qu’elle considère être une dan­gereuse expansion de l’influence de l’Iran dans le monde arabe, notamment dans des zones de conflit aux portes du royaume : Iraq, Syrie et Yémen. Pour elle, cet élargissement de l’influence iranienne se fait grâce à son alliance avec des régimes politiques tenus par des chiites ou des branches du chiisme, comme c’est le cas de l’Iraq et de la Syrie d’Assad (domi­née par les alaouites), ou avec des forces politiques chiites, comme c’est le cas des zaïdites au Yémen, auxquels appar­tiennent les Houthis, et du Hezbollah au Liban.

Pour contrer cette extension de l’in­fluence iranienne, que Riyad perçoit comme une dangereuse tentative d’en­cerclement du royaume, les dirigeants saoudiens s’emploient à former une large coalition d’Etats sunnites, dont l’Egypte, qui seraient au même titre inquiets de l’expansion de l’influence de l’Iran dans la région. C’est dans ce but que Riyad cherche une réconciliation entre l’Egypte, la Turquie et le Qatar, dont les rapports se sont gravement détériorés après la destitution de l’ancien président Mohamad Morsi, issu des Frères musulmans. Mais malgré une récente première tentative saoudienne de rapprocher Le Caire et Doha, les rapports entre les deux pays restent dominés par la suspicion et la méfiance. Le conflit entre Le Caire et Ankara semble davantage difficile à désamorcer .

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