Les pays membres de l'Union européenne (UE) ont confirmé lors d'un vote vendredi l'imposition de droits de douane sur les voitures électriques importées de Chine, malgré l'opposition des Allemands qui redoutent une guerre commerciale avec Pékin.
La Commission européenne a désormais les mains libres pour ajouter, aux 10% de taxe déjà en place, une surtaxe allant jusqu'à 35% sur les véhicules à batterie de fabrication chinoise. Ces droits compensateurs doivent entrer en vigueur fin octobre.
L'objectif affiché est de rétablir des conditions de concurrence équitables avec des constructeurs accusés de profiter de subventions publiques massives. Il s'agit de défendre la filière automobile européenne et ses quelque 14 millions d'emplois contre des pratiques jugées déloyales identifiées au cours d'une longue enquête de la Commission.
La Commission européenne s'est félicitée d'avoir "obtenu le soutien nécessaire des Etats membres". Elle a souligné qu'elle poursuivait le dialogue avec la Chine pour tenter de trouver une solution négociée.
Pékin a dénoncé de son côté des "pratiques protectionnistes injustes et déraisonnables" par la voie du ministère chinois du Commerce qui "s'oppose fermement" aux mesures de Bruxelles.
La Chine menace de frapper les intérêts européens. Elle a déjà répliqué en lançant des enquêtes anti-dumping visant le porc, les produits laitiers et les eaux-de-vie à base de vin importés d'Europe, dont le cognac.
De quoi faire fléchir certains membres de l'UE.
L'Allemagne, avec quatre autres pays (Hongrie, Slovaquie, Slovénie, Malte) a voté contre le projet de taxes de la Commission, mais a largement échoué à rassembler la majorité nécessaire pour la renverser, selon des résultats transmis à l'AFP par des diplomates européens.
La Commission "ne doit pas déclencher de guerre commerciale", a mis en garde le ministre allemand des Finances, Christian Linder.
Les fleurons automobiles du pays, fortement implantés sur le premier marché mondial, redoutent d'en faire les frais. Volkswagen a dénoncé "une mauvaise approche" de l'UE. BMW a même évoqué "un signal fatal" pour l'industrie automobile européenne.
Les droits de douane ont reçu le soutien de dix Etats membres dont la France, l'Italie et la Pologne. Douze autres se sont abstenus, dont l'Espagne et la Suède qui avaient pourtant exprimé leur hostilité.
La filière Cognac "sacrifiée"
Mais, en France aussi, la démarche de l'UE inquiète les milieux économiques.
"Nos demandes de report du vote et de solution négociée ont été ignorées. Les autorités françaises nous ont abandonnés", a déploré l'interprofession du Cognac (BNIC), estimant que sa filière était "sacrifiée".
Le groupe automobile franco-italo-américain Stellantis a sobrement pris note du vote, affirmant soutenir "une concurrence libre et loyale", une réaction alignée sur celle de l'Association des constructeurs européens d'automobiles (ACEA).
Cette passe d'armes sino-européenne s'inscrit dans un contexte plus large de tensions commerciales entre les Occidentaux, Washington en tête, et la Chine, accusée de détruire la concurrence dans plusieurs autres secteurs comme les éoliennes ou les panneaux solaires.
Les mesures européennes, qui se veulent fondées sur des faits et respectueuses des règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), diffèrent cependant de la démarche punitive et plus politique des Américains.
Aux Etats-Unis, le président Joe Biden a annoncé le 14 mai une hausse des droits de douane sur les véhicules électriques chinois à 100%, contre 25% précédemment.
En Europe, le montant des amendes variera selon les constructeurs en fonction du niveau estimé des subventions reçues.
Dans le détail, les taxes supplémentaires s'élèveront à 7,8% pour Tesla, 17% pour BYD, 18,8% pour Geely et 35,3% pour SAIC, selon un document final transmis aux pays membres le 27 septembre.
Les autres groupes ayant coopéré à l'enquête européenne se verront imposer 20,7% de taxes supplémentaires, contre 35,3% pour ceux n'ayant pas coopéré.
Le géant chinois Geely a exprimé vendredi sa "grande déception", regrettant une "décision" qui "risque d'entraver les relations économiques et commerciales entre l'UE et la Chine".
Le dialogue se poursuit toutefois entre le commissaire européen Valdis Dombrovskis et le ministre chinois du Commerce Wang Wentao. A tout moment, les surtaxes pourraient être supprimées si une solution négociée était trouvée pour compenser le préjudice identifié par l'enquête européenne.
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