Des médecins de deux hôpitaux de Beyrouth ont décrit mercredi 18 septembre les terribles blessures aux yeux et les amputations de doigts qu'ils ont dû traiter après l'explosion de centaines de bipeurs appartenant à des membres du Hezbollah.
Ces explosions, survenues simultanément mardi après-midi et attribuées par le Hezbollah à Israël, ont fait 12 morts et près de 2.800 blessés, selon le ministère libanais de la Santé.
"Les blessures étaient principalement localisées aux yeux et aux mains, avec des amputations de doigts et des éclats d'obus dans les yeux; certaines personnes ont perdu la vue", a raconté à l'AFP Joëlle Khadra, une urgentiste de l'Hôtel-Dieu de Beyrouth.
Elle a précisé que l'Hôtel-Dieu, situé dans le quartier chrétien d'Achrafieh, avait accueilli quelque 80 blessés.
Dans la banlieue sud de Beyrouth, bastion du Hezbollah où se sont produites une grande partie des explosions, des patients ont reçu les premiers soins dans le parking d'un hôpital en raison de l'afflux massif.
A l'Hôtel-Dieu de Beyrouth, une vingtaine de blessés "ont été immédiatement admis en soins intensifs et placés sous respirateur pour s'assurer qu'ils ne suffoquent pas tant leur visage était enflé", a ajouté le médecin.
"Les autres sont opérés les uns après les autres. Aujourd'hui, nous avons 55 opérations chirurgicales", a-t-elle ajouté, portant toujours sa tenue chirurgicale sous sa blouse blanche.
"Hors du commun"
Un médecin d'un autre hôpital de Beyrouth a pour sa part décrit les blessures comme "hors du commun".
"Je n'ai jamais rien vu de tel. C'est indescriptible", a ajouté le médecin sous couvert d'anonymat, n'étant pas autorisé à parler à la presse.
"Nous avons eu beaucoup de blessures avec des doigts amputés" parce que des gens tenaient les bipeurs, tandis que d'autres qui étaient assis par terre ont également eu les pieds blessés.
Mais les blessures "les plus terribles" ont été infligées par "les bipeurs qui ont explosé au visage des gens", a-t-il dit, faisant état d'une quarantaine de patients souffrant de blessures oculaires, la plupart graves.
"Environ les trois-quarts de ces patients ont perdu un oeil, et l'autre est parfois à peine récupérable", a-t-il relaté. Selon lui, "15 à 20% (..) ont perdu les deux yeux de manière irréversible".
"Beaucoup de collègues disent que c'est pire que les blessures (oculaires) du 4 août", poursuit le médecin, en référence à l'explosion dévastatrice au port de Beyrouth en 2020, qui avait causé plus de 220 morts et 6.500 blessés, dont plusieurs centaines avec des lésions oculaires.
"Etat critique"
Le médecin a également signalé "de nombreuses brûlures et la présence de corps étrangers, des morceaux métalliques de bipeurs extraits des yeux, du cerveau, du visage, des sinus, de l'intérieur du corps et des os".
Le ministre de la Santé, Firass Abiad, a annoncé mercredi que parmi les 12 personnes décédées, deux étaient des enfants. Il a précisé que près de 300 personnes étaient encore "dans un état critique", avec des blessures au visage et des hémorragies cérébrales.
Sur les quelque 1.800 personnes admises à l'hôpital, "460 ont dû être opérées des yeux, du visage ou des membres, en particulier des mains", a-t-il ajouté, faisant état de "multiples amputations de doigts et de mains".
En proie à une crise économique persistante depuis cinq ans, le Liban a reçu ce matin une aide médicale de l'Irak. Des médecins et des infirmières du Croissant-Rouge iranien sont également venus en renfort, tandis que la Jordanie a annoncé l'envoi d'aide et de fournitures médicales.
Le bureau du coordinateur spécial des Nations Unies pour le Liban a salué sur X le travail du personnel médical et des professionnels des urgence, dont le rôle après les explosions "ne peut être surestimé".
Mercredi, de nouvelles explosions d'appareils de transmission ont eu lieu au Liban.
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