Washington entend rassembler ses alliés contre la Russie et la Chine.
Le président américain, Joe Biden, a accueilli, le 18 août, les dirigeants du Japon et de la Corée du Sud à Camp David, près de Washington. Considéré comme historique, ce sommet vise à envoyer un message clair à la Chine et à la Russie, alliées de circonstance face à leur rival commun, les Etats-Unis. « Nous avons écrit une page d’histoire aujourd’hui avec ce premier sommet et en prenant l’engagement de nous rencontrer, à ce niveau, tous les ans », a affirmé le président américain, aux côtés du premier ministre japonais, Fumio Kishida, et du président sud-coréen, Yoon Suk Yeol, pour une conférence de presse, tout en ajoutant que les pays se consulteraient systématiquement et rapidement à l’avenir face aux menaces les visant. Partageant le même avis, Yoon Suk Yeol a estimé que la rencontre ouvrait un « nouveau chapitre » dans les relations entre les trois pays, tandis que Fumio Kishida a évoqué leur « détermination à ouvrir une nouvelle ère ».
Dans une déclaration conjointe publiée vendredi, les Etats-Unis, le Japon et la Corée du Sud ont condamné le « comportement dangereux et agressif » et les revendications maritimes illégales de la Chine, sur fond de tensions entre Pékin et les Philippines autour d’un atoll disputé. « Nous ne parlons pas d’un jour, d’une semaine ou d’un mois. Il s’agit de décennies de coopération », a assuré le président américain à propos de ce dialogue renforcé, qui a déjà suscité de vives critiques de la part de Pékin.
« Washington essaie à tout prix de s’allier avec tous les pays voisins de la Chine et de la Corée du Nord. Une alliance qui inquiète ces pays et leur alliée la Russie », estime Dr Mona Soliman, professeure de sciences politiques, expliquant que les termes de l’alliance des pays participant au Sommet de Camp David ne sont pas clairs.
En revanche, les principes qui les rapprochent le sont. Dans ce texte commun baptisé « L’esprit de Camp David », les participants ont insisté sur l’importance de la paix et de la stabilité dans le détroit de Taïwan. Depuis Camp David, les Etats-Unis, la Corée du Sud et le Japon ont également appelé une nouvelle fois la Corée du Nord à « abandonner son programme nucléaire et de missiles balistiques ». Les trois pays vont mettre en place un programme d’exercices militaires conjoints sur plusieurs années. Aussi, ils vont mettre en place un canal de communication d’urgence au plus haut niveau, une sorte de « téléphone rouge » à trois combinés dans une région qui vit sous la menace du programme nucléaire nord-coréen et qui redoute une invasion de Taïwan par la Chine.
Washington, Tokyo et Séoul entendent également coopérer en matière économique, par exemple via un mécanisme d’alerte censé signaler les risques de pénurie de certains produits ou matières premières. Comme prévu, Pékin n’a pas caché son hostilité face à ce dialogue à trois. Le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, a par exemple récemment mis en garde Séoul et Tokyo. « Vous pouvez blondir vos cheveux ou faire affiner votre nez autant que vous voulez, vous ne serez jamais ni européens ni occidentaux. Nous devons savoir où sont nos racines », a affirmé Wang Yi, tout en appelant la Chine, la Corée du Sud et le Japon à « travailler ensemble ». Alors que le principal conseiller à la sécurité de la Maison Blanche, Jake Sullivan, assure que cette coopération renforcée n’est pas « un Otan pour le Pacifique ».
Par ailleurs, le Sommet de Camp David a été tenu à quelques jours de la Conférence des BRICS tenue en Afrique du Sud du 22 au 24 août. Il s’agit d’une source d’inquiétude pour Washington, la Russie et la Chine oeuvrant à un élargissement des BRICS pour renforcer cette alliance qui, aujourd’hui, pèse 23 % du Produit Intérieur Brut (PIB) mondial, compte 42 % de la population du globe et veut affirmer son poids sur la scène mondiale.
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