Le secteur du textile égyptien est de plus en plus attractif pour les Investissements Etrangers Directs (IED). Selon le site d’informations économiques Economy Plus, un consortium des grandes compagnies de textile chinoises est en train de négocier avec l’Organisme de l’investissement et des zones de libre-échange la mise en place d’un complexe intégral de textile et de prêt-à-porter sur une superficie de 350 km2 dans la région du golfe de Suez. Le montant des investissements est de 500 millions de dollars. 90 % de la production seront orientés à l’exportation. Ce complexe viendra s’ajouter à l’autre zone industrielle chinoise installée à Aïn Sokhna (TEDA) qui, elle, représente des investissements de 10 milliards de dollars.
D’autres IED sont prévus dans le domaine du textile. « Une coalition égypto-émiratie est sur le point d’acquérir une part comprise entre 25 et 30 % de la Compagnie holding pour le textile », titre le journal économique Al-Borsa. Le journal précise que « durant les derniers mois, le ministère de l’Industrie avait deux options : emprunter aux banques locales pour moderniser le textile égyptien ou bien vendre des actions en échange du développement. Le ministère a choisi la seconde option, car cela est en accord avec les directives du gouvernement d’accroître la contribution du secteur privé ».
Selon Mohamed Shadi, macro-analyste au Centre égyptien de la pensée et des études stratégiques, le gouvernement utilise trois mécanismes pour redresser l’industrie du textile. L’acquisition est le premier mécanisme prévu par la stratégie nationale de promotion du textile égyptien 2025 que le gouvernement a entamée en septembre 2023. Le deuxième mécanisme est la restructuration économique et financière. 31 compagnies de textile ont fusionné de sorte que l’Egypte n’en compte actuellement que 9 seulement. Le dernier mécanisme est la ré-exploitation des actifs pour rembourser les dettes.
L’industrie du textile est la deuxième plus grande du pays. Selon les chiffres du département des industries textiles auprès de l’Union des industries, elle représente, avec le prêt-à-porter, 3,4 % du PIB réel de l’Egypte et a contribué à hauteur de 11 % aux exportations non pétrolières et à hauteur de 34 % au secteur industriel entre 2018 et 2022.
Le ministre du Secteur des affaires, Mohamed Shimy, a parlé des évolutions récentes du secteur lors d’une rencontre avec le premier ministre, Mostafa Madbouli. Selon un communiqué de presse du Conseil des ministres, l’Etat intensifie actuellement ses efforts pour régler le double problème de l’indisponibilité des matières premières et des recettes énormes des importations du coton filé. « La superficie agricole du coton à fibres longues a été augmentée cette saison à 2 250 feddans (1 feddan = 4 200 m2) contre 250 lors de la saison 2020-2021. Le gouvernement entend donc étendre progressivement ces cultures pour atteindre 150 000 feddans d’ici 3 ans, soit 50 000 feddans de plus chaque année », affirme un communiqué de presse publié à l’issue de la rencontre entre Madbouli et Shimy. Les deux responsables ont parlé en détail du dossier du textile. La société Misr pour la soie artificielle et les fibres de polyester a redémarré ses activités après une interruption de 12 ans, sur une superficie de 144 000 m2 à Kafr Al-Dawwar, dans le gouvernorat de Béheira. Sa capacité de production va jusqu’à 90 tonnes/jour.
Relatifs progrès
Le même communiqué ajoute que le plan de restructuration du secteur égyptien du textile est sur les rails au niveau des usines de filature et de tissage. Le plan prévoit notamment des investissements estimés à environ 1,1 milliard d’euros pour moderniser les machines et les équipements et améliorer l’efficacité des infrastructures.
Mohamed Shadi affirme que ce plan de réforme a effectivement commencé, mais il n’est que partiellement appliqué et il n’est pas possible de l’évaluer. « Les 31 compagnies de textile ont fusionné en 9 seulement et le gouvernement a déjà injecté 15 milliards de L.E. dans le plan de restructuration. L’usine de filature 4 d’Al-Mahalla Al-Kobra atteint sa pleine capacité de production en coton filé », souligne-t-il.
Shadi estime que l’un des atouts de l’usine de filature 4 est qu’elle donne une marque internationale au coton égyptien. Les plans de marketing ont ciblé pour la première fois des points de distribution spécifiques et une segmentation des produits selon la catégorie d’acheteurs (A, B ou C), que ce soit à l’intérieur du pays ou à l’étranger. « Deux marques destinées à la classe A ont été créées, à savoir NIT et MAHALLA qui se trouvent dans les grands centres commerciaux à l’étranger, à Londres et à Dubaï », explique-t-il.
Relever les défis
L’incapacité d’évaluer la stratégie revient aux obstacles auxquels celle-ci est confrontée. Mohamed Abdel-Salam, président de la Chambre du prêt-à-porter et du tissage auprès de l’Union des industries, explique que l’usine de filature 4 n’a réglé que partiellement le problème des matières premières. Il faut savoir que la capacité de production de l’Egypte est importante et l’usine ne répond pas tout à fait aux besoins. « La facture d’importation est toujours énorme, nous importons du coton filé kényan et bengali. L’usine 4 n’a pas réglé le double problème de l’importation et de l’exportation. Nous devons importer 60 % de nos besoins, soit 1,2 million de tonnes d’un coût de 2,5 milliards de dollars environ. L’usine de filature 4 a une capacité de production qui ne dépasse pas les 30 000 tonnes par mois », ajoute-t-il.
D’autres problèmes doivent être réglés d’urgence comme celui des terrains industriels, car il y a une grande demande, explique Abdel-Salam. Il y a aussi des problèmes de financement en raison de la hausse des taux d’intérêt et il faut aussi former la main-d’oeuvre, sans compter les problèmes de bureaucratie relatifs aux douanes et aux impôts.
Pour localiser l’industrie du textile, « il faut commencer par les maillons de la chaîne les plus faciles et les moins coûteux, comme les industries auxiliaires qui ne requièrent pas des investissements colossaux (entre 40 et 50 milliards de L.E.) comme les boutons, les rubans et autres. Le processus doit être graduel. Et pour parvenir à l’autosuffisance, il faut un plan sur 20 ans », conclut-il.
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