Sous le titre « Les défis de la sécurité nationale dans un Moyen-Orient en ébullition », le comité des affaires arabes et étrangères du syndicat des Journalistes a organisé un débat ouvert avec le général Samir Farag pour discuter des répercussions de l’escalade actuelle dans la région du Moyen-Orient sur la sécurité nationale égyptienne et arabe, ainsi que du rôle de l’Egypte dans le soutien de la cause palestinienne. « L’Egypte est confrontée à des défis stratégiques sans précédent sur toutes ses frontières », a souligné Farag au début de son discours. Il a expliqué : « A l’est, la guerre à Gaza fait toujours rage. A l’ouest, la division de la Libye et les affrontements internes menacent directement la sécurité nationale égyptienne. Au sud, la guerre au Soudan, opposant l’armée aux Forces de soutien rapide, ajoute une nouvelle dimension à ces défis. Enfin, la situation au Yémen et les tensions autour du détroit de Bab El-Mandeb exacerbent les risques pour l’Egypte dans la mer Rouge ».
Un autre enjeu majeur est la question du barrage de la Renaissance. Cette question est au coeur des préoccupations de l’Egypte, car elle constitue une menace directe à la sécurité hydrique du pays. « La part de l’Egypte dans les eaux du Nil est non négociable », souligne Farag, expliquant que si le barrage éthiopien s’effondrait, les conséquences seraient désastreuses. Cependant, il a ajouté que l’Egypte ne sera pas affectée par l’effondrement du barrage grâce au Haut-Barrage et au lac Tochka. Le plateau éthiopien a effectivement connu des périodes alternant sécheresse et pluviométrie abondante. Les dernières années ont été particulièrement difficiles et l’Egypte craint maintenant sept années de sécheresse.
Farag a affirmé que les forces armées égyptiennes ont joué un rôle crucial dans la préservation de la sécurité du pays. Il a souligné que la mission première de l’armée est de défendre les frontières et de protéger les intérêts nationaux. Selon lui, les forces armées sont fermement convaincues qu’il ne faut pas engager de guerre qui compromettrait le développement de l’Egypte.
Farag a mis en garde contre le fait que le prochain conflit régional pourrait éclater autour des ressources en eau et en gaz naturel. Il a cependant assuré que l’Egypte est en sécurité grâce au renforcement des forces armées, notamment de la marine, afin de sécuriser les investissements importants dans le secteur gazier.
Nouveau risque d’escalade : Iran-Israël
Sur la récente escalade des tensions entre Israël et l’Iran, le spécialiste en stratégie militaire a expliqué qu’« Israël, qui craint la poursuite des combats sur plusieurs fronts, ne serait pas en mesure d’affronter l’Iran et le Hezbollah en même temps. L’Iran dispose d’un réseau de groupes armés régionaux, notamment le Hezbollah au Liban, les Houthis au Yémen, les Hachd Al-Chaabi en Iraq et des milices alliées en Syrie ». Selon Farag, toutes les options sont envisageables pour l’Iran suite à l’assassinat d’Ismaïl Haniyeh.
Il souligne cependant que, malgré les provocations israéliennes répétées, Téhéran cherche à éviter une escalade majeure. « Téhéran ne souhaite pas élargir le conflit direct avec Tel-Aviv tant que son projet nucléaire n’est pas achevé. L’Iran dispose d’un programme nucléaire qu’il vise à finaliser d’ici 2025, et qui comprend cinq bombes nucléaires susceptibles de bouleverser la région. C’est pourquoi il est si soucieux d’éviter tout conflit militaire avec Israël pour le moment, en attendant de mener ce programme à bien, d’autant plus que les Etats-Unis ont envoyé des troupes et un soutien militaire à Israël par crainte d’une riposte iranienne », a-t-il dit.
(Photo : Ahmed Agamy)
La guerre à Gaza et le rôle de l’Egypte
Concernant la guerre à Gaza, le général Samir Farag a souligné que la position égyptienne, dès le début de la crise, est claire : l’Egypte rejette définitivement le déplacement des Palestiniens de leurs terres et toute tentative de liquidation de la cause palestinienne. Plusieurs estimations disaient que la guerre dans la bande de Gaza prendrait fin dans 10 ou 15 jours, mais la résistance palestinienne a clairement surpris tout le monde.
Il a passé en revue les points forts de la résistance au début de cette guerre, notamment le lancement de 200 missiles vers Israël, à un moment où le Dôme de fer ne pouvait en intercepter que 100. Cela a entraîné la chute de 100 missiles sur les colonies. « Les forces d’occupation ont tenté de pousser les Palestiniens vers l’Egypte, mais sans succès », a expliqué Farag, soulignant l’importance de la retransmission en direct de la rencontre du président Abdel Fattah Al-Sissi avec le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, et son rejet clair du déplacement de la population de Gaza vers le Sinaï. Concernant ce que l’on appelle le jour d’après-guerre, Farag a souligné que l’Egypte avait insisté dès le premier jour sur le fait que ceux qui contrôleront Gaza seront les Palestiniens et non des puissances étrangères. « L’Egypte est capable de gérer la situation avec une sagesse politique sans s’impliquer dans des guerres qui lui coûteraient une facture économique et politique importante », a conclu Farag.
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