Al-Ahram Hebdo : L’Egypte a commencé à cultiver le coton à fibres courtes pour la première fois à Tochka, et ce, au moment où la culture du coton à fibres longues gagne en surface dans les gouvernorats du Delta. Cela permettra-t-il de redonner au coton égyptien son éclat d’autrefois ?
Adel Abdel-Azim : Les ministères de l’Agriculture, de l’Industrie et du Secteur des Affaires coopèrent pour promouvoir la culture du coton, afin de retrouver sa gloire d’antan. Le ministère de l’Agriculture a développé de nouvelles variétés et a mis en oeuvre la carte dite d’été en distribuant ces nouvelles variétés aux différents gouvernorats. Par exemple, la variété Guiza 92 a été distribuée dans le gouvernorat de Damiette, Guiza 94 à Daqahliya, Charqiya et Kafr Al-Cheikh, tandis que Guiza 86 est cultivée à Béheira et Guiza 97 à Ménoufiya. Quant à la Haute-Egypte, le coton est cultivé dans les gouvernorats de Béni-Soueif, Fayoum et Assiout, et une nouvelle variété, Guiza 98, a été introduite à Sohag. Outre les nouvelles variétés, le ministère de l’Agriculture produit chaque année des semences améliorées et les distribue aux agriculteurs pour garantir l’obtention de la plus haute productivité et améliorer les caractéristiques du coton égyptien, connues dans le monde entier.
Le ministère mène aussi une campagne nationale pour le coton, depuis la culture jusqu’à la récolte. En effet, les chercheurs du Centre de recherche agricole parcourent les différents gouvernorats pour fournir des recommandations techniques aux agriculteurs concernant la résistance aux pesticides, les méthodes d’irrigation et la récolte. Le Conseil des ministres a également émis une décision de créer, pour la première fois en Egypte, un système de commercialisation du coton, sous la supervision des trois ministères que l’on vient de citer. Cela vise à ne pas laisser la commercialisation au libre marché et à ce que l’agriculteur égyptien obtienne la productivité la plus élevée. Des enchères sont mises en place dans différents gouvernorats pour commercialiser le coton au prix le plus élevé.
Le coton n’est pas seulement une culture de fibres, mais il existe de grandes industries qui l’entourent, il crée de nombreux emplois et engendre de gros investissements. Des investissements de plus de 30 milliards de L.E. sont consacrés au développement de l’industrie textile, notamment l’usine de Misr Filature et Tissage, qui sera la plus grande dans la région, ainsi que les usines de Kafr Al-Dawar et de Chébine Al-Kom. Tout cela dans le but d’optimiser l’utilisation du coton au lieu de l’exporter sous forme brute. Ce qui ne profite ni à l’économie nationale, ni aux agriculteurs égyptiens.
— Quels sont les avantages du coton à longues fibres ? Estil toujours demandé à l’échelle mondiale ?
— Le coton à fibres longues se caractérise par sa douceur et sa durabilité, et est utilisé dans la fabrication de vêtements luxueux, ce qui a fait du coton égyptien le numéro un mondial dans la fabrication de draps et textiles luxueux de grande valeur. Toutes les variétés dont nous disposons sont à fibres longues et il existe une expérience de culture de coton à fibres courtes dans l’est de Owaïnat sur une superficie de 1 000 feddans. Nous visons à étudier la question et à déterminer si le climat et les facteurs environnementaux en Egypte produiront une bonne récolte pour que nous puissions entrer dans l’industrie locale et si ce sera moins cher que de l’importer de l’étranger.
(Photo : Ahmad Agami)
L’année dernière, nous avons exporté du coton vers plus de 20 pays et de nombreux marchés sont ouverts au coton égyptien. La saison dernière, plus de 2 millions de quintaux ont été vendus par le biais des enchères, lancées depuis quatre ans. Ce système a été bien accueilli par tous. Depuis le 15 septembre, les récoltes ont commencé en Basse-Egypte et nous sommes optimistes qu’elles seront très productives.
— Pourquoi la culture du coton avait-elle été abandonnée ?
— Les raisons sont nombreuses, notamment la concurrence avec les cultures céréalières comme le blé, le riz et le maïs, car ce sont des cultures avec de fortes demandes et dont les prix ont augmenté, ou encore avec les cultures oléagineuses ou de légumes et d’herbes du soja. L’agriculteur veut obtenir le revenu le plus élevé. Par ailleurs, le système de commercialisation n’était pas clair. Et il y avait une confusion concernant les variétés de coton de la part de certains commerçants et courtiers, ce qui a affecté la saison de commercialisation. Il n’y avait également aucun lien entre les trois ministères au sujet de l’agriculture, du marketing et de la fabrication, ce qui envoie un message de réconfort aux agriculteurs.
— Et qu’en est-il de l’industrie textile ?
— La modernisation de l’industrie égyptienne a pris du retard en raison des crises mondiales et du Covid-19, mais dans la période à venir, dès janvier prochain, il est prévu que toutes les usines de textile ouvrent de nouveau leurs portes. L’industrie est le moteur de la filière coton. Nous n’utilisons actuellement que 15 % du coton dans l’industrie locale et nous exportons le reste. Le plan industriel annoncé vise à utiliser de 50 à 60 % du coton égyptien. Le deuxième défi est de continuer à préserver les nouvelles variétés et de ne pas confondre les anciennes et les nouvelles. Nous devons unir tous nos efforts car le coton est une culture stratégique très importante pour l’économie égyptienne.
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