L’Egypte a annoncé, le 21 mars, le début des essais d’exploitation commerciale de l’or à partir du site d’Iqat au sud du pays. Découvert en juin 2020 dans le désert oriental, ce site abrite des réserves de près de 1,2 million d’onces avec un taux de récupération de 95 %, l’un des plus élevés au monde, alors que le volume des investissements de ce site pendant les dix prochaines années dépassera le seuil de 1 milliard de dollars, selon les chiffres avancés par le ministère du Pétrole et des Ressources minérales. « Il s’agit d’un investissement purement égyptien dans le domaine de la prospection et de l’exploitation de l’or via la compagnie égyptienne Chalatine, qui a entrepris un partenariat réussi et une coopération fructueuse avec le secteur privé égyptien », a déclaré Tareq El-Molla, ministre du Pétrole et des Ressources minérales, lors de sa tournée au site, avant d’ajouter que « la future production pourra non seulement être exportée, mais aussi utilisée pour accroître les réserves en or de la Banque Centrale d’Egypte (BCE) ».
Le site produit de manière initiale des lingots qui sont estampillés selon le calibre de leur or ou avec le code international 9999 en vue de leur exportation ou leur utilisation pour augmenter les réserves d’or de l’Egypte. De plus, des travaux de prospection sont entrepris dans la zone de concession d’Iqat pour davantage de découvertes. Dans ce contexte a été formée la compagnie Iqat pour les mines d’or qui a tenu sa première assemblée générale en novembre 2021 pour être responsable du développement de la mine. C’est ainsi qu’Iqat devient la troisième compagnie en Egypte qui travaille dans l’extraction de l’or et des minéraux associés après les compagnies Al-Sokkari pour les mines d’or et Hammash Misr pour les mines d’or.
Hausse des réserves
L’Egypte compte 270 sites pour la production de l’or, dont 120 sites et mines qui ont été exploités dans le passé. Ils se concentrent essentiellement dans 3 régions dans le désert oriental qui sont la montagne d’Al-Sokkari, la région de Hammash et la vallée d’Al-Alaqi. L’Egypte produit commercialement l’or dans deux principales mines, Al-Sokkari, l’une des 20 plus grandes au monde, et celle de Hammash, une vieille mine pharaonique. Depuis le début de son exploitation en 2009 et jusqu’à février dernier, la production d’Al-Sokkari a atteint environ 5,2 millions d’onces, réalisant des revenus de plus de 7,5 milliards de dollars, ajoutant ainsi près de deux millions d’onces aux réserves d’or de l’Egypte, avec un objectif de produire entre 450 et 480 000 onces au cours de cette année grâce à l’utilisation de technologies modernes pour la première fois en Egypte, alors que les réserves de cette mine atteignent près de 41 millions d’onces, soit près de 462 tonnes. Elle peut produire 12 tonnes par an, soit une tonne d’or par mois. La production d’Al-Sokkari est à même d’augmenter à elle seule les réserves stratégiques d’or de l’Egypte de 300 tonnes. « L’exploitation des mines d’or représente une orientation stratégique de l’Etat égyptien pour soutenir la monnaie locale face aux fluctuations économiques actuelles, ainsi qu’un rempart pour l’économie égyptienne », explique Dr Ahmad Sultan, expert des affaires de l’énergie au syndicat égyptien des Ingénieurs.
En effet, les réserves stratégiques d’or de l’Egypte ont augmenté de près de 44,6 tonnes, pour passer de 75 à 125,5 tonnes en 2022. Ce qui lui a valu d’être classée, par le Conseil Mondial de l’Or (CMO), troisième pays au niveau mondial dans le taux de croissance annuel des réserves avec un taux de 44,6 % après la Turquie et la Chine et de passer au 33e rang en termes de possession de réserves d’or. « Cette augmentation des réserves d’or représente une évolution importante et une consolidation de la puissance de la BCE, qui profite à l’économie égyptienne grâce à l’achat par la BCE de la production des mines égyptiennes », a déclaré Dr Nagui Farrag, conseiller du ministre de l’Approvisionnement pour les affaires de l’or.
Par ailleurs, l’achat de l’or et des bijoux est une habitude fortement ancrée dans la culture des Egyptiens depuis la nuit des temps. En 2022, les Egyptiens ont dépensé près de 2,2 milliards de dollars pour acheter de l’or contre 1,97 milliard en 2021 avec une augmentation de 11 %, alors que l’Egypte a acheté l’année dernière près de 38 tonnes d’or contre 34,1 en 2021, enregistrant la plus forte demande sur le métal précieux depuis 2013, soit 1 % de la demande mondiale sur l’or à la fin de l’année, selon le CMO. Mais les exportations égyptiennes d’or et de pierres précieuses ont aussi enregistré une hausse de 45 % au cours de 2022, pour atteindre 1,633 milliard de dollars contre 1,126 en 2021, selon le rapport du Conseil des exportations des matériaux de construction, des réfractaires et des industries métallurgiques, qui explique que l’Egypte a exporté de l’or, des bijoux et des pierres précieuses vers 44 pays. Le plus grand importateur, c’était les Emirats arabes unis avec 51,5 % des exportations totales, d’une valeur de 841 millions de dollars, contre 394 millions de dollars en 2021, soit une croissance de 113 %.
Des mesures concrètes
En fait, ces acquis sont le fruit des mesures importantes adoptées par l’Etat dans le domaine de l’exploitation minière et dans le contexte de la stratégie adoptée par le ministère du Pétrole et des Ressources minérales pour développer ce secteur et augmenter sa contribution au PIB qui a commencé par l’amendement de la loi de l’exploitation minière et son statut exécutif, en passant par le développement du système financier égyptien et du processus des licences. « Dans le passé, les sociétés minières internationales n’étaient pas intéressées à travailler dans le domaine de l’or égyptien avant 2014, car le cadre législatif de l’exploitation minière n’était pas encourageant, mais plutôt répulsif. La loi a été amendée en 2019 pour stimuler l’industrie aurifère et l’exploitation minière. Une décision qui a fortement contribué à attirer les entreprises internationales », explique Dr Ahmad Sultan.
En effet, après l’amendement de la loi, l’Egypte a commencé à promouvoir l’industrie minière en lançant des appels d’offres pour la prospection de l’or en ciblant des investissements directs étrangers de plus de 375 millions de dollars dans le secteur minier au cours des deux prochaines années et un milliard de dollars d’ici 2030. L’objectif étant de faire passer la contribution de ce secteur au PIB de 0,5 % actuellement à 5 %. C’est ainsi qu’en 2020, 11 entreprises ont remporté des surenchères pour la prospection dans 82 secteurs, couvrant une superficie de 14 000 km2 dans le désert oriental, avec un investissement minimum de 60 millions de dollars. « Ces efforts visent à transporter l’industrie de l’or et de la bijouterie de l’ère des petits ateliers à des usines qui utilisent les technologies de pointe dans le design et la fabrication, pour concurrencer les produits italiens et indiens en qualité et en prix. D’autant plus que l’industrie égyptienne de l’or et des bijoux présente de nombreux avantages concurrentiels qui permettent au marché égyptien de devenir un principal producteur et exportateur pour les pays arabes et africains », explique le député Amr Hindi, membre de la Commission des affaires économiques de la Chambre des représentants. Dans ce même contexte, l’Egypte a annoncé la création de la Cité de l’or dans la Nouvelle Capitale administrative qui devra regrouper 400 ateliers pour la production de l’or, ainsi que 150 ateliers éducatifs et une grande école technique. Le ministère de l’Education a également inauguré en 2020, avec un partenaire industriel, l’école Egypt Gold pour l’industrie des bijoux, la première école secondaire technique pour la formation à l’industrie orfèvre, située dans la Cité de Obour.
Par ailleurs, le ministre du Pétrole a annoncé en décembre dernier l’intention de l’Egypte de créer la première raffinerie accréditée de l’or à Marsa Alam dans le désert oriental. « Nous encourageons les investissements étrangers et le secteur privé national à investir dans la première raffinerie égyptienne avec un coût allant à 100 millions de dollars. L’objectif est de maximiser la valeur ajoutée des ressources d’or et de compléter la chaîne de valeur de la production du métal jaune », conclut Tareq El-Molla.
1,2 million d’onces : total des réserves du site d’Iqat.
95 % : taux d’extraction de l’or du site d’Iqat.
270 : nombre de sites pour la production de l’or, dont 120 sites et mines qui ont été exploités dans le passé.
44,6 % : taux de croissance annuel des réserves d’or de l’Egypte.
45 % : hausse du taux des exportations égyptiennes d’or et de pierres précieuses en 2022.
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