Dans sa lutte contre les répercussions de la crise économique mondiale actuelle, le gouvernement égyptien a annoncé cette semaine un certain nombre de mesures visant à rationaliser les dépenses publiques et soutenir les secteurs productifs afin de réduire la pression sur le dollar. « Les mesures prises ces derniers jours visent à ajuster la politique monétaire et à rétablir l’équilibre sur le marché des changes », a déclaré le premier ministre, Moustapha Madbouli. Dans ce contexte, le Journal officiel a publié le 9 janvier une série de nouvelles mesures. Il s’agit de rationaliser les dépenses des organismes et des entreprises inclus dans le budget général de l’Etat et des organismes économiques publics. Le décret du premier ministre stipule également le report de tout projet n’ayant pas encore été mis en oeuvre et nécessitant des dollars et le report de toute dépense qui ne revêt pas le caractère d’extrême nécessité. De même, tous les déplacements à l’étranger ne seront autorisés qu’en cas « d’extrême nécessité » et après approbation du premier ministre, selon la nouvelle réglementation qui restera en vigueur pendant environ six mois, jusqu’à la fin de l’exercice 2022-2023 en cours. Les ministères de la Santé, de l’Intérieur, des Affaires étrangères et de la Défense sont exclus de cette réglementation. Même chose pour la subvention des produits alimentaires et de l’énergie. « La rationalisation des dépenses n’affectera pas la croissance », a déclaré le ministre des Finances, Mohamad Maeit, soulignant que « les mesures réglementaires liées à ces décisions seront déclarées au cours des prochains jours ». Et d’ajouter: « C’est un message du gouvernement au citoyen. Le gouvernement a commencé par lui-même et a réduit ses dépenses afin de faire face à la crise mondiale ». Selon l’experte économique Bassant Gamal : « La rationalisation des dépenses est une démarche positive prise au bon moment. Le but est de réduire l’écart entre les dépenses et les recettes du budget général de l’Etat et d’augmenter les réserves en devises du pays. Ce sont les deux défis auxquels l’économie égyptienne est confrontée à l’heure actuelle ».
En fait, avec le prolongement de la guerre en Ukraine, les perspectives de l’économie mondiale sont incertaines. Le conflit en Ukraine a fait exploser les prix des denrées alimentaires, affectant lourdement les pays importateurs nets de denrées alimentaires comme l’Egypte, qui importait 80% de ses besoins en céréales de Russie et d’Ukraine. Cette situation a mis sous pression ses réserves de devises étrangères. Selon un récent rapport de la Conférence des Nations-Unies sur le Commerce Et le Développement (CNUCED), la hausse des prix des denrées alimentaires et aussi du dollar constitue « un double fardeau » pour les pays en développement. « Bien que le monde ait connu des crises alimentaires, les problèmes actuels, déclenchés par la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine, sont différents », estime le rapport. Avant d’expliquer que « lors des crises précédentes, on a vu le dollar chuter, alors que les prix des denrées alimentaires augmentaient. Le dollar étant la principale monnaie sur les marchés internationaux, sa dévaluation réduit le prix final payé par les consommateurs en monnaie locale. Mais le dollar est à la hausse cette fois-ci, grimpant de 24% entre mai 2021 et octobre 2022 après que la Réserve fédérale avait augmenté ses taux d’intérêt pour tenter de juguler l’inflation aux Etats-Unis ».
Multiples démarches
En fait, ces nouvelles décisions s’inscrivent dans le cadre d’une stratégie à court et à long termes visant à renforcer les réserves en devises étrangères. En décembre dernier, le premier ministre avait révélé que le gouvernement « élabore un plan visant à fournir des ressources non traditionnelles en devises étrangères au cours de la période à venir, en particulier jusqu’au 30 juin 2023, afin de sécuriser les besoins en devises ». Dans ce contexte et pour donner un coup de pouce aux secteurs productifs qui traversent une période difficile en raison des conditions économiques, ainsi que pour créer un équilibre entre les exportations et les importations, le Conseil des ministres a annoncé cette semaine une nouvelle initiative de financement moyennant un taux d’intérêt réduit (11%) notamment pour les secteurs industriel et agricole, d’une valeur de 150 milliards de L.E. Parallèlement, le ministre des Finances a modifié certaines dispositions de la charte de la loi de la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA), pour soutenir l’industrie, stimuler la production et encourager le tourisme de shopping. Les nouvelles modifications stipulent que « la taxe sur les machines et les équipements achetés sur le marché local est suspendue pendant un an à partir de la date de dédouanement ». « L’Etat allouera 10 milliards de L.E. par an pour soutenir les hommes d’affaires, l’agriculture et les PME qui importent leurs besoins de production », a déclaré Madbouli. Selon les observateurs, pour récolter les fruits de cette initiative, toutes les marchandises bloquées dans les ports doivent être libérées afin de permettre aux usines de fonctionner à pleine capacité. Des marchandises d’une valeur de 1,5 milliard de dollars ont été dédouanées entre les 1er et 10 janvier.
Lien court: