Al-Ahram Hebdo : Quel est l’objectif de la délégation égyptienne aux Jeux Olympiques (JO) de Paris ?
Ashraf Sobhy : Notre objectif est de remporter des médailles olympiques. Nous avons mis en place un programme de préparation à long terme pour atteindre cet objectif. Le succès de ce programme se mesurera par le nombre de médailles olympiques remportées, en passant par les médailles aux Championnats du monde.
— Comment jugez-vous les chances de l’Egypte et quelles sont les disciplines susceptibles de remporter des médailles à Paris ?
— L’Egypte a de fortes chances de remporter entre 6 et 10 médailles olympiques. J’espère que notre délégation fera mieux que les six médailles obtenues lors des JO de Tokyo 2020, qui se sont finalement tenus en 2021 à cause de la pandémie de Covid-19. Les sports égyptiens qui ont décroché des médailles aux Championnats du monde ou à la Coupe du monde au cours des trois dernières années sont les plus proches du podium olympique, à savoir l’haltérophilie, le pentathlon moderne, l’escrime, la lutte, le taekwondo et le handball, seul sport collectif en lice pour une médaille. A Paris, l’haltérophilie compensera l’absence du karaté, sport dans lequel l’Egypte avait remporté 2 médailles (une d’or et une de bronze) à Tokyo, derniers JO où le karaté était encore un sport olympique. A Paris, l’haltérophilie égyptienne fera son retour après son absence à Tokyo en raison de sa suspension.
— Comment évaluez-vous la préparation des athlètes égyptiens pour les JO ?
— Nous appliquons une stratégie de préparation à long terme pour nos athlètes dans tous les sports. Nous visons à ce que notre délégation soit parfaitement prête pour les JO, passant par les Championnats du monde et les Coupes du monde. Un total de 1,52 milliard de L.E. a été investi au cours des trois dernières années. Cette somme a été dépensée pour les camps d’entraînement, les voyages, les compétitions internationales à l’étranger et sur le territoire national, ainsi que pour les tournois nationaux et internationaux. 548 millions de L.E., réparties en 8 tranches, ont été versées à 28 fédérations sportives pour leur qualification aux JO. Les résultats des athlètes égyptiens au cours des trois dernières années aux Championnats du monde et aux Coupes du monde montrent que nous sommes sur la bonne voie et que les médailles olympiques sont à notre portée. Ces éléments confirment que nous sommes en plein développement sportif, avec des chiffres et des résultats sportifs, que ce soit dans les sports individuels ou même collectifs, loin du football, ce qui témoigne d’une augmentation du taux de développement dans le sport égyptien, soutenue par une vision et une mise en oeuvre efficaces des politiques de l’Etat.
— Quelles sont les chances de l’Egypte dans les Jeux paralympiques ?
— Aux Jeux paralympiques de Paris, l’Egypte pourrait remporter au moins 6 médailles, comme lors de l’édition précédente. Cependant, nous ne mettons pas de pression sur les athlètes. Je demande aux athlètes paralympiques de profiter de l’expérience olympique sans pression. Il n’y aura pas d’évaluation pour les athlètes après les Jeux, mais bien sûr, il y en aura une pour les responsables des sports paralympiques. Nous avons dépensé 131,7 millions de L.E. pour la préparation des sports paralympiques, une somme proportionnelle à la base des pratiquants paralympiques. Il faut savoir que les sports paralympiques ont connu un grand progrès ces dernières années, surtout après l’importance accordée à ce domaine par le président de la République, Abdel Fattah Al-Sissi. De 2014 les sports paralympiques ont commencé à bénéficier d’un statut privilégié. Dans le passé, les familles cachaient leurs enfants handicapés à la société, mais aujourd’hui, cette situation a totalement changé. Les parents sont fiers de leurs enfants handicapés devenus champions sportifs, présentateurs ou héros. Aujourd’hui, il existe une communauté pour les personnes handicapées au sein des clubs et nous soutenons l’idée de l’intégration des personnes handicapées dans la société plutôt que de créer des clubs spéciaux pour elles. Nous en sommes arrivés là grâce à l’Etat qui a contribué au rôle psychologique et social des familles ; c’est notre philosophie.
— Certains athlètes paniquent lors des grandes compétitions comme les JO. Est-ce que les autorités sportives travaillent sur ce sujet ?
— L’état psychologique des athlètes est une partie très importante du programme de préparation des athlètes. Nous avons mis en place le programme de soutien psychologique en tant que projet national et nous avons commencé à avoir recours à des experts et à établir un programme très solide. Nous avons également exigé que toutes les fédérations qui n’avaient pas encore ce programme le mettent en place. Aujourd’hui, chaque équipe nationale dispose d’un psychologue dans son encadrement technique. Certaines fédérations avaient commencé ce programme il y a des années, mais désormais, toutes les fédérations olympiques sont tenues de l’appliquer. Nous avons atteint un niveau où nous appliquons les dernières avancées des sciences du sport.
— A quelques jours des JO de Paris, comment jugez-vous le niveau du sport égyptien ?
Brièvement, le sport égyptien a atteint un niveau très élevé, jamais vu, grâce à la direction de l’Etat conduite par le président de la République, Abdel Fattah Al-Sissi, depuis 2014. Notre travail au ministère de la Jeunesse et des Sports est la traduction de la vision de l’Etat. Nous avons mis en place un système de travail répondant aux exigences de notre Etat en travaillant sur plusieurs axes différents. Premièrement, le développement des installations sportives a conduit à l’organisation d’un grand nombre de compétitions internationales, plaçant l’Egypte et particulièrement Le Caire parmi les six meilleures villes du monde pour l’organisation de compétitions internationales, ce qui joue un rôle crucial dans le secteur économique des sports.
Deuxièmement, nous avons lancé le projet national pour le développement du sport, tant dans le cadre du développement des talents et des juniors, où nous avons commencé de zéro en utilisant un système scientifique, que dans le cadre du projet national des champions, visant à éliminer définitivement le concept de « sport martyr », ce qui s’est concrétisé.
Troisièmement, nous avons travaillé avec les fédérations sportives égyptiennes d’une manière différente, en intégrant le secteur économique privé dans le développement du sport. D’autre part, au ministère de la Jeunesse et des Sports, nous oeuvrons pour que le sport devienne un mode de vie en augmentant la qualité des fédérations afin que le sport soit pratiqué dans toutes les rues et tous les foyers, tout en lançant de nouvelles initiatives comme « Votre vélo, votre santé ».
— Comment l’organisation par l’Egypte des compétitions internationales contribue-t-elle au développement du sport dans le pays ?
— Le sport égyptien a grandement bénéficié de l’organisation par le pays de nombreux tournois internationaux à plusieurs égards. D’une part, le sport joue le rôle d’une force politique douce. En organisant des compétitions à domicile, les responsables des sports égyptiens ont tissé un réseau important de relations avec les fédérations internationales. Lorsque ces responsables internationaux viennent en Egypte et constatent l’excellente organisation des installations sportives de haut niveau, leur confiance dans les capacités des fédérations égyptiennes s’accroît. Cela ouvre également la voie aux responsables égyptiens pour occuper des postes au sein des fédérations internationales. Aujourd’hui, l’Egypte compte des représentants dans diverses fédérations internationales et africaines, renforçant ainsi le sport égyptien.
D’autre part, l’Etat bénéficie de l’organisation des tournois internationaux dans le domaine du tourisme. Ces dernières années, nous avons enregistré plus de 2 millions de nuitées touristiques grâce à l’organisation d’événements sportifs, ce qui stimule indirectement l’économie et le développement touristique. En plus, cela constitue une promotion indirecte de notre pays à travers les magnifiques photos des athlètes. Cela s’est concrétisé lors de l’organisation du Championnat du monde de handball pendant la pandémie de Covid-19.
— Et comment les athlètes égyptiens bénéficient-ils de l’organisation de ces tournois internationaux ?
— L’organisation des tournois internationaux en Egypte offre une grande occasion aux athlètes d’acquérir plus d’expérience en affrontant les meilleurs athlètes mondiaux. En plus, les installations sportives égyptiennes sont au même niveau que celles des compétitions internationales, ce qui habitue les athlètes égyptiens à jouer dans des installations comparables à celles des Championnats du monde organisés en dehors de l’Egypte. En organisant ces grandes compétitions à domicile, nous faisons la promotion de chaque discipline, encourageant ainsi les jeunes Egyptiens à pratiquer ces sports après avoir découvert la discipline de près et constaté que l’Egypte est l’une des grandes nations dans ces disciplines, avec des champions du monde et olympiques, comme cela s’est produit en pentathlon moderne après l’organisation annuelle des Championnats du monde, qui a permis de remporter des médailles à chaque compétition. Les parents commencent à s’intéresser à ces disciplines et encouragent leurs enfants à les pratiquer, ce qui élève le niveau général du sport en augmentant la base des pratiquants. Notre objectif principal est que l’Egypte devienne un centre pour accueillir les compétitions internationales, conformément à la stratégie de notre pays visant à créer une nouvelle image de l’Egypte.
— La construction de la Cité olympique dans la Nouvelle Capitale administrative jouera-t-elle un rôle dans le développement du sport ?
— Le soutien du président Abdel Fattah Al-Sissi au sport égyptien a été la raison de la construction de la Cité sportive olympique à la Capitale administrative, sur 5 millions de mètres carrés, où chaque sport olympique dispose de son propre stade ou salle. Nous avons commencé par l’organisation des Championnats du monde de tir et d’escrime, ainsi que d’un match international de football. A l’avenir, la Cité olympique sera gérée par une entreprise mondiale. Elle accueillera les Jeux africains qui se tiendront en Egypte en 2027. Je soutiens l’organisation des Jeux africains paralympiques, mais il est essentiel d’étudier attentivement le projet sur le plan financier. J’attends un plan détaillé de la part du Comité paralympique égyptien.
— L’Egypte a-t-elle envisagé d’organiser les JO de 2036 ?
— L’Egypte possède des installations de niveau mondial. Ainsi, l’idée d’accueillir les JO est toujours envisagée, mais elle a été reportée en attendant une étude de faisabilité détaillée pour une préparation optimale. L’Egypte dispose d’installations sportives de niveau international, notamment la Cité olympique, et ses infrastructures sont prêtes : routes, transports, etc. Il nous reste seulement les dépenses opérationnelles comme la réception des délégations, les transferts, l’hébergement, les coûts de diffusion, les bénévoles, etc. Ainsi, accueillir les JO n’est pas difficile ; nous sommes prêts, mais des études détaillées doivent être menées pour assurer le succès. Peut-être pourrions-nous les organiser en 2040.
— Les JO sont une bonne occasion pour que chaque pays adresse des messages importants à travers sa délégation. Quels sont les messages de la délégation égyptienne ?
— Nos messages sont clairs. Ils reflètent l’image mondiale du sport et incarnent l’image de l’Etat égyptien. Il n’y a pas de racisme dans le sport égyptien. L’égalité totale y règne et chacun exerce ses droits à travers le sport, sans aucune forme de discrimination. C’est notre norme et le fondement sur lequel repose le sport égyptien. Par exemple, cette année, nous avons instauré l’égalité entre les délégations olympique et paralympique. Les athlètes portent les mêmes uniformes fournis par les mêmes entreprises. Les récompenses nationales pour les médailles olympiques et paralympiques sont équivalentes. Les deux comités olympique et paralympique bénéficient de parrainages dignes de cet événement.
— Assisterez-vous à la cérémonie d’ouverture des JO et à certaines compétitions ?
— J’assisterai à la cérémonie d’ouverture des JO de Paris en tant que représentant du président de la République, Abdel Fattah Al-Sissi. Comme Paris est proche en distance de l’Egypte, je pourrai m’y rendre plusieurs fois pour assister aux compétitions importantes de la délégation égyptienne, non seulement aux JO, mais aussi aux Jeux paralympiques qui se dérouleront deux semaines après la fin des JO.
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