En tête du groupe E, la sélection d’Egypte est plus proche que jamais d’une première qualification pour la Coupe du monde depuis 1990. Pourtant, le sélectionneur Hector Cuper est contesté. Lors des deux rencontres face à l’Ouganda, les Pharaons ont fait pâle figure, s’inclinant 1-0 à Kampala, le 31 août, avant de décrocher une minuscule victoire de 1-0, le 5 septembre, au stade de Borg Al-Arab, où ils étaient encouragés par plus de 60 000 supporters et ont regagné la tête du groupe avec 9 points. « Je dois dire que je suis vraiment déçu. L’Egypte ne montre pas de qualité de championne, on n’arrive pas à imposer notre rythme, même à domicile. Cuper doit comprendre que la sélection a toujours eu un style de jeu offensif et esthétique, et c’est ce qui lui manque pour convaincre les observateurs et le public », dit Ahmad Hossam « Mido », ancien international d’Egypte et actuel entraîneur de Wadi Degla.
Nommé en mars 2015, Cuper a promis de redonner ses lettres de noblesse à la sélection égyptienne, mais à sa manière : gagner en priorité, même si le jeu n’est pas esthétique, jouer si possible en option. Le technicien argentin a ainsi fait l’essentiel sans grand spectacle ni effets spéciaux, mais avec efficacité et pragmatisme. Après avoir manqué trois éditions de la Coupe d’Afrique des nations, le septuple champion d’Afrique a retrouvé l’élite africaine en 2017, progressant à la surprise générale jusqu’à la finale de la compétition, où il s’est incliné face au Cameroun 2-1. L’ancien entraîneur de Valence et Inter Milan a dépassé les attentes, l’objectif étant d’atteindre les quarts de finale avec une équipe remodelée, qui a su impressionner par sa discipline et sa détermination, mais dont le jeu ne séduit pas.
Cuper adopte une tactique défensive et mise beaucoup sur son joueur vedette Mohamad Salah (Liverpool, Angleterre), pour exécuter les contre-attaques. Le public et les critiques, bien que notant les succès obtenus, n’ont pas encore adopté ce nouveau style, qui leur laisse un goût amer. « Cuper a fait un grand travail avec l’équipe lors de sa première année. Maintenant on a acquis une grande confiance et l’on doit bâtir là-dessus. Il n’est pas possible qu’on joue avec le même système qu’il y a deux ans, lorsque l’équipe était en pleine galère », dit encore Mido.
Les rencontres face à l’Ouganda ont fait naître plus d’incertitudes qu’elles n’ont apporté de confirmations. Cuper s’est retrouvé sur la sellette et la question s’est posée s’il était le bon choix pour mener l’Egypte lors de la Coupe du monde en Russie en cas de qualification. « Je suis ici depuis plus de deux ans et nous avons déjà fait beaucoup de travail et réalisé de grands progrès. Il n’est pas logique que je change tout ça juste à cause d’une défaite. Quand il y a des erreurs, nous travaillons à les corriger, mais il faut avoir confiance dans le système et dans les joueurs. Si la fédération veut que je parte, je partirai, je n’ai aucun problème avec cela. Mais vous devez savoir que nous travaillons sous de fortes pressions : cela fait 28 ans que l’Egypte ne s’est pas qualifiée pour la Coupe du monde et à chaque rencontre, les joueurs sentent qu’ils portent une énorme responsabilité pour réaliser ce rêve », a déclaré Cuper, suite au match contre l’Ouganda à Alexandrie.
Contrairement aux médias, les joueurs et les responsables de la Fédération Egyptienne de Football (FEF) témoignent de leur confiance et leur soutien au sélectionneur. « Cuper a un objectif, qui est de qualifier l’équipe pour la Coupe du monde. Pour le moment, l’équipe est première de son groupe et je ne vois donc pas de raison de s’alarmer. Il honorera son contrat jusqu’au bout », a indiqué le président de la FEF, Hani Abou-Reida. De son côté, le gardien et capitaine de l’équipe, Essam Al-Hadari, a critiqué les médias pour leurs propos. « Je ne suis pas content du tout que l’on parle du coach et de son avenir maintenant. Cuper nous protège et a confiance en nous et nous aussi, nous avons une grande confiance en lui. En tant que capitaine de l’équipe, je suis responsable de préserver l’équipe et le coach. Nous avançons bien vers notre objectif, qui est de nous qualifier pour la Coupe du monde. Je vous demande donc de nous soutenir », a-t-il dit.
Des choix qui font débat
Hector Cuper est fidèle à ses hommes, ce qui ne va pas sans créer de problèmes. En effet, malgré la baisse de régime de plusieurs éléments, tels que Amr Gamal et Mohamad Abdel-Chafi ou Abdallah Al-Saïd et Tareq Hamed, ceux-ci continuent d’occuper une place intouchable dans son échiquier. « Je comprends qu’il fasse confiance à des joueurs qu’il connaît bien et qui se sont adaptés à son style de jeu, mais il doit élargir ses choix. Il est clair que certains joueurs ne sont pas à la hauteur et il doit donc considérer de nouveaux éléments dans son onze de départ, que ce soit dans son groupe ou même parmi d’autres joueurs du championnat. Je constate que la sélection manque beaucoup de calibres tels que Hossam Ghali et Bassem Morsi par exemple. Il est temps de mettre de côté les différends au bénéfice de la sélection », affirme Hossam Hassan, ancien joueur phare des Pharaons et entraîneur de Masri. Cuper avait en effet écarté Ghali, le talentueux milieu d’Ahli, et Morsi, l’attaquant de Zamalek, en raison de problèmes disciplinaires depuis plus d’un an. Or, la sélection souffre de l’absence d’un milieu central qui possède une bonne vision de jeu et soit capable de créer une fluidité dans la transition entre la défense et l’attaque. La pointe de l’attaque est le casse-tête de Cuper, au point qu’il a dû parfois utiliser l’ailier Mahmoud Abdel-Moneim « Kahraba » au poste de numéro 9, avant de miser sur Gamal, remplaçant à Ahli, face à l’Ouganda dans son schéma de 4-2-3-1.
En outre, Cuper doit aussi voir plus large en ce qui concerne Al-Saïd, Hamed et Abdel-Chafi. Tous les trois ont dépassé la trentaine et enchaînent leur troisième saison d’affilée sans repos. Leur niveau change non seulement de match en match, mais au cours du même match. S’il est vrai qu’Al-Saïd est le chef d’orchestre de cette équipe et que c’est lui qui tire les ficelles dans le compartiment offensif, Saleh Gomaa, une valeur sûre d’Ahli, pourrait bénéficier du plus d’espace pour étaler son talent au sein de la sélection. En milieu de terrain, Cuper possède le milieu d’Ahli, Hossam Achour, ou le milieu de Wigan (Angleterre, D2), Sam Morsy, comme doublure pour Hamed. Les choix semblent toutefois très limités sur le flanc gauche, Karim Hafez (Lens, D2 France) n’ayant pas pu convaincre dans son remplacement de Abdel-Chafi. « Nous avons un noyau dur et ne faisons que 10 ou 15 % de changements. Nous observons le championnat pour trouver des renforts à certaines positions, dont celle d’attaquant. Mais il y a une lacune généralisée pour ce poste en Egypte et les buteurs de première journée sont en majorité des étrangers. L’important pour nous est de réaliser nos objectifs. Le public célébrera les victoires et pas la performance, et ce sont nos résultats qui nous mèneront à la Coupe du monde », dit Ossama Nabih, entraîneur adjoint de la sélection.
Bien que Cuper ait encore de nombreuses décisions à prendre, ces dernières sont reportées jusqu’à après la rencontre avec le Congo le 8 octobre prochain, pour la cinquième et avant-dernière journée des qualifications du Mondial. Un match capital, qui pourrait voir les Pharaons se qualifier, en cas de victoire, pour la Coupe du monde en Russie en 2018.
Statistiques de joueurs avec Cuper
Joueurs utilisés : 58
Plus grand nombre de matchs : Ahmad Hégazi, Mohamad Al-Nenni (22 matchs)
Meilleur buteur : Mohamad Salah (10 buts en 20 matchs)
Meilleur passeur : Mohamad Salah (7 passes décisives en 20 matchs)
Statistiques de Cuper avec l’Egypte
Matchs V N D Bp Bc
28 19 3 6 46 16
Palmarès : Finaliste de la Coupe d’Afrique des nations 2017
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