« Je me sens comme un ambassadeur pour la paix », affirme avec satisfaction le poète mexicain Roberto Carmona, lors d’un débat qu’il a animé avec son confrère costaricain Carlos Belabes, sur la relation entre la réforme et la culture.
L’actualité politique en Egypte, un pays en guerre contre le terrorisme au nom de la religion, a poussé les organisateurs à choisir la réforme, et des variations sur le même thème, comme sujet des débats et des tables rondes organisés en marge du Salon, des espaces d’échange entre des intellectuels invités et le public. En effet, le Salon a toujours reflété, sur le plan culturel, aussi bien l’actualité que l’orientation politique du régime. Il y a quelques semaines, le président Abdel-Fattah Al-Sissi a appelé à une réforme religieuse devant un public fait d’imams d’Al-Azhar. Ce n’est donc pas étrange de voir le Salon du livre choisir Mohamad Abdou, une grande figure de la réforme du siècle dernier, comme personnalité d’honneur de cette 46e édition.
Mais indépendamment des autorités religieuses, repenser ses convictions est aujourd’hui une nécessité pour le citoyen. Ayant vécu l’avènement et la chute du régime des Frères musulmans, ces derniers manifestent une curiosité d’écouter et une volonté de dialoguer autour de ce thème, à l’ordre du jour. C’est ce qu’a remarqué Mounir Fakhri Abdel-Nour, ministre de l’Industrie, qui estime que « cette année, le Salon du livre est beaucoup plus intéressant ».
Des islamistes repentis comme Sarwat Al-Kharabawi ou Nabil Naïm ont animé plusieurs débats et ont relaté leur expérience lors des années passées au sein des groupuscules de l’islam radical. Dans un autre colloque du Salon, Mohamad Hamdi Zaqzouq, ancien ministre des Waqfs, rappelle, de son côté, que le prophète de l’islam fut le premier à inviter les musulmans à procéder à une réforme tous les siècles. « Tout ce qui est dans l’intérêt de l’homme est compatible et apprécié par la religion », résume Zaqzouq. Il appelle son audience à avoir recours à la raison et à la logique pour faire le tri des textes en distinguant ce qui est fondamental et authentique, et ce qui peut relever des traditions dépassées. Un exercice qui exige un retour aux sources tout en tenant compte des évolutions culturelles et cultuelles.
Cette édition du Salon du livre a aidé donc à relancer un débat loin d’être clos, et à avancer des pistes de réflexion à travers des débats riches et, souhaitons-le, fructueux.
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