Les dessins qui illustrent la vie du fondateur de l’économie nationale égyptienne, Talaat Harb, rendent avec exactitude et beaucoup de talent les étapes de la vie de ce grand homme dans l’histoire de l’Egypte moderne. Le récit relate son enfance dans le quartier de Gamaliya, au coeur du Caire de mille minarets, plus précisément dans le quartier de Qasr Al-Chouq — qui renvoie à la trilogie cairote de Naguib Mahfouz — ou dans le triangle des quartiers populaires de Sayeda Zeinab, d’Al-Hussein et d’Al-Azhar. Cette période annonce, très tôt, les choix du petit Talaat, qui a appris, jeune, le Coran par coeur et oeuvré à améliorer la vie de ses concitoyens.
Les dessins évoluent avec les chapitres semés de photos rares et affiches publicitaires annonçant par exemple les offres financières de la Banque Misr sur ses taux d’intérêt alléchants. Egalement, on trouve l’affiche publicitaire annonçant le premier vol en deux heures entre Le Caire et Beyrouth, parmi les premiers vols de la compagnie Egyptair. Ses premières destinations étaient à l’époque Beyrouth, Bagdad et Damas.
L’ouvrage rend compte également des détails intimes du leader national : ses habitudes, ses tics de langage, ses habitudes gastronomiques, qui n’étaient que l’exemple parfait des habitudes populaires égyptiennes. On trouve à la fin du livre une chronologie comparative des dates marquantes de sa vie, dès sa naissance en 1867 jusqu’à sa mort en 1941, et celles des événements majeurs en Egypte et dans le monde durant cette même période.
Le visionnaire a commencé par créer des entreprises sur la base des potentiels de l’Egypte en tant que pays agricole. Il a également créé Studio Misr, la première entreprise du monde arabe à produire du cinéma. A l’écoute de la jeunesse, il a repris les idées des jeunes de l’époque de Fathi Radwan et d’Ahmad Hussein, pour lancer le projet de la « piastre », qui invitait les Egyptiens à donner chacun une piastre contre un document honorifique de la Banque Misr mentionnant cette contribution, pour sauver le pays de la crise engendrée par la baisse des prix du coton dans les Bourses mondiales, notamment celle de Londres. La culture du coton, comme d’autres cultures d’Egypte, était à la base du développement de la Banque Misr qui, grâce à cet homme, a pu démentir le préjugé que la langue arabe ne peut pas être utilisée dans la comptabilité et les usages bancaires.
Harb, qui travaillait sept jours sur sept, a également créé les compagnies Egyptair, l’Egyptienne pour le tourisme, l’Egyptienne pour la soie, l’Egyptienne pour la pêche et enfin, respectivement en 1934 et 1935, l’Egyptienne pour les cuirs et l’Egyptienne pour les mines.
Talaat Harb, malgré ses deux livres en réponse à Qassem Amin dont L’Emancipation de la femme refusant le travail de celle-ci, a changé plus tard de position sur le sujet, en osmose avec l’évolution des temps. Cette évolution intellectuelle souligne la flexibilité de l’homme moderne qu’il était .
Talaat Harb, Homme qui a changé l’Egypte, dans les série Personnalités qui ont changé l’Histoire. Laila Al-Raï et Yasser Guéïssa. Editions Dar Al-Balsam, 2014.
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