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Une voix arabe dans la littérature norvégienne

May Sélim, Mercredi, 31 janvier 2024

Au pavillon de la Norvège, l’invitée d’honneur de la Foire internationale du livre qui se tient actuellement, l’auteur d’origine iraqienne Mohamed Al-Mofty vient de présenter son nouveau roman, Une danse obscure.

Une voix arabe dans la littérature norvégienne
L’écrivain Mohamed Al-Mofty s’inspire de faits réels.

Danser de joie ou de peine ? Retrouver à tout prix son pays natal ou embrasser l’exil ? L’écrivain iraqo-norvégien Mohamed Saif Al-Mofty retrace, dans Une danse obscure, son premier roman paru en norvégien, la réalité de l’Iraq en l’an 2014.

La ville de Mossoul est occupée par les forces terroristes de Daech. Comment faire alors pour sauver sa famille des griffes de ces combattants impitoyables ? Voilà ce qui s’est passé réellement avec l’auteur et ce qu’il a voulu raconter dans son roman. Al-Mofty a tenté d’intégrer les troupes de Daech pour sauver deux jeunes hommes de sa famille à Mossoul. Il a documenté les atrocités commises contre les siens afin de les transmettre au monde entier. D’où le portrait saisissant d’un pays menacé, d’une famille en danger et de leurs liens étroits avec la Norvège.

Une fois que le roman est sorti aux éditions Solum Bokvennen en 2023, l’auteur, soutenu par l’Organisation de la littérature norvégienne à l’étranger, a traduit lui-même son texte vers l’arabe sous le titre de Raqsa Dakéna. La traduction du roman vient d’ailleurs d’être publiée aux éditions Al-Arabi.

Certains membres de sa famille vivaient à Mossoul pendant l’attaque de Daech. Al-Mofty a atterri dans la ville afin de les revoir. Il était également présent en Iraq lorsque les chrétiens et les yézidis étaient saisis et vendus sur le marché aux esclaves. Le personnage principal de son roman revient comme lui pour visiter les siens et explorer la réalité du pays.

Dans le roman, il se fait appeler Saif Al-Kadi, un journaliste menant une vie stable en Norvège. Un jour de l’été 2014, il reçoit un message de sa famille en Iraq, l’incitant à y retourner le plus vite possible. La famille s’était échappée de Mossoul la nuit, alors que Daech attaquait la ville. Le monde entier était sous le choc et le journaliste a réussi à établir quelques contacts pour revenir sur le terrain. Il est habitué à ce genre de scénarios horribles, mais n’a jamais imaginé qu’une telle chose puisse arriver aux siens.

Saif Al-Kadi apprend, quelques jours après son arrivée, que Daech a kidnappé son neveu autiste, qui est aussi son ami. L’idée que ce dernier soit entre les mains de ces combattants brutaux lui était insupportable. Il n’avait qu’une seule voie à suivre : chercher à le sauver, même si sa mission paraissait assez périlleuse. Du jour au lendemain, il s’est trouvé sur le champ des opérations militaires en Iraq, parmi les terroristes, et nous fait découvrir, entre autres, les motifs derrière l’embrigadement au sein de Daech, en se basant sur de vrais témoignages.

D’une langue à l’autre

Pourquoi écrire en norvégien ? Al-Mofty, auteur, conférencier et interprète iraqo-norvégien, né à Mossoul en 1964, possède aussi une expérience assez riche en tant qu’homme d’affaires, actif dans les années 1990. A la recherche de nouvelles opportunités, il a choisi d’émigrer en Norvège en 1997. Il est le chef de l’ONG U-turn qui vise à documenter l’origine et l’évolution des organisations extrémistes. De plus, il dirige l’ONG All Together qui vise à construire des ponts culturels entre les gens et à dénoncer les actes inhumains en société. Et il a obtenu un diplôme en traduction en 2021 de l’Université d’Oslo.

Son expérience en tant qu’émigré, rêvant d’une Europe paradisiaque, est bien incarnée dans ses romans, rédigés en arabe : Zalemaïa (éditions Dar Fadeat, Jordanie 2015) et Des chameaux arabes sur la neige polaire (éditions Dar Al-Fikr Al-Arabi, Le Caire 2007).

Après de longues années passées en exil, écrire en norvégien était devenu une nécessité afin de communiquer directement ses idées aux lecteurs norvégiens et ne pas se limiter à la communauté arabe ou celle des immigrés.

A la suite du succès de son roman Une danse obscure, la critique littéraire Marta Norheim a déclaré dans les médias de NRK (société de la production et de la diffusion télévisuelle et radiophonique en Norvège) : « Al-Mofty est une nouvelle et importante voix dans la littérature norvégienne ».

Raqsa Dakéna est disponible au stand des éditions Al-Arabi et celui de la librairie Diwan.

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