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Cairokee, la voix des jeunes

Rasha Hanafy, Dimanche, 04 août 2019

Le dernier ouvrage de l’écrivain Walaa Kamal, Ayami maa Cairokee. Wa Hékayet Guil Arada an Yoghayer Al-Alam (mes jours passés avec Cairokee. L’histoire d’une génération qui a voulu changer le monde), présente une documentation sur le groupe de rock égyptien Cairokee. Mais c’est aussi une étude sociale de toute une génération qui aspire au changement.

Cairokee, la voix des jeunes

Nul doute qu’après la lecture de Ayami maa Cairokee. Wa Hékayet Guil Arada an Yoghayer Al-Alam (mes jours passés avec Cairokee. L’histoire d’une génération qui a voulu changer le monde), la réaction immé­diate est de surfer sur Youtube pour écouter les chansons de ce groupe de rock, créé en 2003. Il s’agit du dernier livre du roman­cier et traducteur Walaa Kamal, né à Londres en 1984, qui a fait des études en communication à l’Uni­versité de Aïn-Chams. Le livre est publié aux éditions Al-Masriya Al-Lobnaniya. En 560 pages, l’auteur a réussi à rendre, de manière équilibrée, les situations et les événements vécus par les cinq jeunes membres du groupe Cairokee, qui sont en quelque sorte représen­tants de leur génération.

L’idée principale de l’ou­vrage est d’aborder l’expé­rience de la jeunesse égyptienne, née à la fin du XXe siècle, leurs rêves, leurs ambitions et leurs frustrations. « Après avoir assisté à un concert de Cairokee, début 2017, à Saqiet Al-Sawi, je me suis dit: les paroles et les sujets de leurs chansons traitent de tout ce que je veux évoquer dans mon livre. En fait, ils parlent des mêmes problèmes sociopoli­tiques qui me préoccupent. Leurs chansons documentent une phase importante de notre vie et s’adressent surtout aux jeunes. Faire une documentation de l’expérience artistique et sociale de Cairokee, dans un livre, est donc une manière de parler de toute une généra­tion, qui est aussi la mienne », écrit Kamal dans la préface de son livre, précédé de deux romans, publiés respectivement en 2017 et 2018.

Le livre dresse un récit de vie des membres du groupe, leur manière de préparer leurs chansons, leur vision musicale, etc. Et cela lui permet de brosser le por­trait de la génération qui s’est soulevée pendant la Révolution du 25 Janvier 2011. Bien que le début de Cairokee ait été en 2003, le groupe est deve­nu très célèbre en 2011, notamment après la diffu­sion de leur chanson Sout Al-Horriya (la voix de la liberté). Depuis, les chan­sons se sont succédé, comme Isbat Makanak (ne bouge pas), évoquant les violents incidents de la rue Mohamad Mahmoud, ou encore Matloub Zaïm (recherche un leader).

En vivant presque deux ans, à partir de 2017, avec les membres de Cairokee : Amir (chanteur, guitariste, parolier et compositeur), Hawari (guitariste), Chérif (claviériste), Tamer (batteur) et Adam (bas­siste), l’écrivain Walaa Kamal a enregistré toutes ses observations, suivant de près les préparatifs de l’album Noqta Beida (un point positif). Il a également assisté à la plupart des concerts qu’ils ont tenus, en Egypte comme à l’étranger. Et effectué avec eux de nombreux entretiens sur leur vie personnelle, leurs visions artistiques et leur projet musical, fournissant une analyse approfondie du pro­cessus créatif chez les artistes qui se procla­ment indépendants par rapport à toutes sortes d’autorité.

Musiciens-héros

L’énergie. Tel est le mot qui définit le plus Cairokee. Selon le livre, « le public de ce groupe de rock n’y voit pas uniquement des musiciens, mais des héros… Leurs héros. Quand j’ai entendu les paroles des chansons, j’ai commencé à en saisir la raison. Il ne s’agit pas de simples chansons faites par cinq jeunes musiciens. Ces jeunes expriment les sentiments de leurs audi­teurs, notamment l’éternel conflit des généra­tions, opposant une société patriarcale à des jeunes qui rêvent de liberté sans restriction aucune ».

Les esprits sont marqués par des paroles comme « Tu leur parles de dignité, ils te répon­dent non sans t’humilier. Tu évoques la justice, on te qualifie de vicieux » ; « Je me sens étran­ger, dans une société aveugle qui ne voit pas qu’elle est en train de s’écrouler (…) », « Am Gharib (l’étranger) représente mon père et mon grand-père. Il représente quelque 90 millions. La patience a tracé au fond de leurs coeurs des millions de lignes à plusieurs couleurs ».

Sur les réseaux sociaux, on commente le style de Cairokee en disant: « Vous n’êtes peut-être pas le meilleur groupe en Egypte, mais vous êtes le plus sincère, le plus courageux. Vous croyez en votre cause et en celle de toute une génération qui a voulu changer le monde ».

Cela résume le succès du groupe dont le livre fait part. C’est le cri solennel de toute une géné­ration .

Ayami maa Cairokee. Wa Hékayet Guil Arada an Yoghayer Al-Alam (mes jours passés avec Cairokee. L’histoire d’une génération qui a voulu changer le monde). Editions Al-Masriya Al-Lobnaniya, 2019, 560 pages.

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