Petit format de poche, concis, mais important. Le livre du doyen des historiens égyptiens, Mohamad Chafiq Ghorbal, intitulé Takwine Misr (la genèse de l’Egypte), avait été publié pour la première fois en 1957. L’Organisme général des palais de la culture, relevant du ministère de la Culture, a récemment publié une nouvelle édition de cet ouvrage, faisant partie de la série mensuelle Hékayet Misr (histoire de l’Egypte), qui s’adresse aux jeunes. Le contenu de l’ouvrage est la traduction vers l’arabe de 10 discussions en anglais diffusées sur Radio Le Caire en 1956. La traduction vers l’arabe a été faite par Ghorbal en coopération avec l’écrivain Mohamad Réfaat.
En une centaine de pages, Ghorbal parle de la genèse de l’Egypte depuis l’âge de glace en passant par les époques pharaonique, grecque, romaine et islamique et jusqu’à l’ère moderne. Il analyse le début et la création de la civilisation égyptienne ancienne en se basant sur la théorie de son professeur anglais, Arnold Toynbee. Ce dernier présente l’histoire des civilisations en termes de défis et de réponses. Les civilisations surgissent en réponse à certains défis d’une extrême difficulté, et alors « les minorités créatrices » conçoivent des solutions pour réorienter la société entière. C’est justement ce que les Anciens Egyptiens ont réalisé. « J’ai donné le titre L’Egypte, don des Egyptiens à ma première intervention, contrairement à ce qu’a dit Hérodote : L’Egypte, don du Nil, parce que je pense que ce sont les Egyptiens qui ont créé l’Egypte. Le Nil coule sur plus de 6 000 km, mais tout au long de son parcours, il n’y a qu’une seule Egypte. L’homme en Egypte a pu surmonter le défi de la sécheresse qui a frappé la région après l’âge de glace, en transformant les marais en champs et en construisant des canaux et des ponts », explique Ghorbal au début de son livre. Et d’ajouter : « Il s’agit là des minorités créatrices qui ont créé la civilisation en Egypte et qui ont pu guider toute la société ».
L’Egypte à travers les différentes époques
Ghorbal, dans son ouvrage, ne néglige pas l’interaction entre les deux conceptions du changement et de la continuité dans l’histoire de l’Egypte. Cela dit, il donne une grande importance au facteur humain dont les efforts ont mené à l’unité des deux royaumes, du Nord et du Sud, en Egypte Ancienne. C’est cette unité du pays qui a mené à créer des services publics, des ouvriers, des paysans, des spécialistes pour écrire et pour dessiner sur les murs des temples. L’objectif était de « conserver la cohérence de la société égyptienne contre toute menace de division », écrit Ghorbal dans son ouvrage. L’auteur-historien insiste sur le fait que les facteurs naturels, comme la crue du Nil, les saisons, les températures, l’humidité et le vent, ont mené à avoir un système de vie strict et bien organisé. Il ne manque pas de souligner que la prospérité d’un pays comme l’Egypte se réalise via une bonne gestion des ressources, sinon c’est la ruine.
Dans La Genèse de l’Egypte, Ghorbal parle aussi brièvement des époques hellénistique, romaine, grecque, chrétienne et islamique. La vie culturelle est restée cohérente durant ces époques, en échangeant les données et en restant modérée. Le dernier petit chapitre du livre aborde la question de l’Egypte et de l’Occident. Une période qui commence par l’invasion des Français, ensuite celle des Ottomans, et enfin des Anglais. Une longue période de plus d’un siècle, mais qui démontre que le dernier mot, après le désordre de la société égyptienne, est toujours pour le peuple et le facteur humain, notamment après la Révolution de 1919.
Concis, parce que ce sont des discussions faites pour la radio, mais important pour que les jeunes lecteurs sachent la nature et la genèse de l’Egypte.
L’auteur en bref
Mohamad Chafiq Ghorbal (1894-1961) a terminé l’école normale en 1915. Il a eu une bourse d’études en Angleterre, où il a étudié l’histoire, à Liverpool. Ensuite, il a obtenu son doctorat à Londres, en 1924. Il est devenu enseignant à l’école normale, puis professeur-assistant (1929-1936) et professeur à l’Université du Caire, où il est devenu vice-doyen, puis doyen de la faculté des lettres en 1940. En 1948, il est devenu directeur adjoint, puis conseiller, puis vice-ministre de l’Instruction pour les Affaires sociales.
A la retraite, il a rejoint l’Institut des études arabes. Il a aussi été vice-président (1945) et président (1956) de La Société égyptienne des études historiques. Il a reçu le prix d’État de Mérite dans les sciences sociales (1960) et a été membre à l’Académie de la langue arabe de 1957 à 1961. Il a fait en outre partie des 12 historiens conseillers des affaires de l’Histoire du monde auprès de l’Unesco.
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