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Les dessous du mouvement sioniste

Soheir Fahmi, Lundi, 07 août 2017

Dans son nouveau livre Al-Yahoud Al-Masriyoune Wal Haraka Al-Sahyouniya (les juifs d’Egypte et le mouvement sioniste), Awatef Abdel-Rahman nous dresse un panorama du mouvement sioniste en Egypte. Passage en revue.

Les dessous du mouvement sioniste

Dans un livre en petit format, précis et clair, sur plus de 200 pages, Awatef Abdel-Rahman nous relate l’histoire ô combien éprou­vante des juifs égyptiens ! Mais surtout du mouvement sioniste. Une histoire tellement complexe que nous avons tendance à oublier dans la confusion de ces temps modernes où les vérités historiques et les événements boulever­sent notre quotidien et nous incitent à mélanger les faits et à les oublier.

Awatef Abdel-Rahman est professeure de journalisme à l’Université du Caire, et auteure de plusieurs livres sur le journalisme, la femme, l’histoire contemporaine, mais également mili­tante des causes critiques de son pays. En ces temps mouvementés où Israël ignore ses enga­gements avec les Palestiniens et le monde arabe, Awatef Abdel-Rahman revient à l’histoire et nous rappelle les faits.

Dans ce petit livre, elle raconte comment sur plusieurs générations, depuis les années 1920 jusqu’à la période de l’ancien président Hosni Moubarak, en 2011, le sionisme a pris le dessus en Egypte. Awatef Abdel-Rahman dresse une carte des juifs d’Egypte en 1947. Il y avait 64 484 juifs au Caire et 25 183 à Alexandrie. Le reste était dispersé dans la région du Canal de Suez et du Delta. Et chose étrange, il n’y avait que 5 000 juifs détenant la nationalité égyp­tienne, alors que 30 000 portaient des nationali­tés étrangères, et le reste était sans nationalité. On comprend d’ailleurs pourquoi beaucoup d’entre eux avaient des nationa­lités étrangères. Le but était de bénéficier des privilèges qui les exemptaient de se soumettre aux autorités égyptiennes.

Trois catégories
Les juifs étaient divisés en trois catégories : la première catégorie était composée de grandes familles aristocratiques riches et ayant un statut social élevé et influent. On peut citer les noms de Kattawi, Souares, Mousseiri, Harari, Cicurel, Rouleau et d’autres. Cette caté­gorie était suivie par des hommes d’affaires importants qui travaillaient dans le commerce du coton, à la Bourse et dans les banques. Ces deux catégories étaient souvent occidentalisées bien que beaucoup d’entre eux aient participé à la vie politique et culturelle en Egypte et aient été nationalistes. Quant à la troisième catégorie de juifs, ils représentaient le bas de l’échelle sociale. C’étaient de pauvres gens qui faisaient de petits travaux et vivaient des allocations sociales. Ceux-ci détenaient la nationalité égyp­tienne et étaient égyptiens de naissance. Tout comme leurs compatriotes égyptiens, ils participaient activement à toutes les activités qui incom­baient aux Egyptiens. On pouvait difficilement les dif­férencier les uns des autres. Ils vivaient dans les quartiers populaires de Abbassiya, Mouski et la ruelle des juifs. D’ailleurs, jusqu’en 1949, il n’y avait que 20 000 juifs qui ont émigré hors d’Egypte, dont 7 000 en Israël. D’autres sont partis en Europe après avoir fait sortir leur argent clandestinement vers l’étran­ger.

Mais ce qui étonne dans ce livre qui suit la progression sournoise du mouvement sioniste en Egypte qui s’est immiscé de manière diffuse dans la vie politique, sociale et culturelle, c’est l’exemple flagrant et très révélateur que la cher­cheuse avance de la revue Al-Kateb Al-Masri qui a été présidée par le grand intellectuel et écrivain Taha Hussein. D’après elle, le capital de la revue était sioniste et celle-ci aurait joué un rôle important dans la propagande indirecte du mouvement sioniste, et ceci, en ignorant de manière directe et en analysant de manière superficielle le conflit palestino-israélien.

Connaissant le rôle éminemment nationaliste de Taha Hussein, on doit se poser des questions sur la vérité de cette information et sur ces sources.

Pas de géant
A part une parenthèse dans la période nassé­rienne et au début de la période du président Sadate, le mouvement sioniste a fait des pas de géant dans la société égyptienne et s’est soldé par l’accord de Camp David en 1979. Il est inté­ressant également de noter des progrès dans le domaine de la coopération agricole avec Israël qui n’est pas à l’avantage de l’Egypte et dans les programmes scolaires.

Toutefois, on ne peut pas nier le rôle des juifs de gauche pour contrer la progression des sio­nistes radicaux et aussi celui des mouvements intellectuels égyptiens pour contrer le sionisme. Mais il reste que de grandes déficiences sont à noter dans les positions officielles ou dans les organisations populaires concernant ce sujet.

Le livre de Awatef Abdel-Rahman est impor­tant à lire en cette période, où la confusion règne dans les positions et où le sionisme gagne du terrain .

Editions Al-Hilal, 2017.

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