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Double hommage à la Francophonie et à Boutros Ghali

Sabah Sabet, Mercredi, 28 octobre 2020

Une cérémonie a été organisée cette semaine à Al-Ahram pour le lance­ment, par l’Association Egyptienne des Juristes Francophones (AEJF), du prix Boutros Boutros-Ghali pour le dialogue, la démocratie et la paix.

Double hommage à la Francophonie et à Boutros Ghali
Le lancement du prix a été l'occasion de rendre hommage à Boutros Ghali.

La reconnaissance du rôle de l’ancien secrétaire général de l’Onu, Boutros Ghali, et la francophonie. Deux points communs qui ont rassemblé des juristes, d’anciens et d’actuels hauts respon­sables, des spécialistes, des académiques d’Egypte et de France. Une panoplie de person­nalités qui se sont rencontrées, mercredi 21 octobre, à la salle Takla à la Fondation Al-Ahram. Il s’agissait de rendre hommage à cette person­nalité en annonçant le prix Boutros Boutros-Ghali, ancien secrétaire général de l’Onu, prin­cipale personnalité arabe et africaine ayant tant soutenu la francophonie. Un événement organi­sé par l’Association Egyptienne des Juristes Francophones (AEJF), qui a annoncé ce prix pour « le dialogue, la démocratie et la paix », en l’honneur de Boutros Boutros-Ghali (1922-2016), qui a été le président d’honneur de l’AEJF depuis sa fondation. Le prix, dont le montant est de 10 000 euros, est placé sous le patronage des présidents égyptien et français. Les thèmes proposés sont les sujets auxquels Ghali a consacré sa vie. « Pour l’AEJF, il s’agit d’un témoignage de fidélité, d’admiration et d’amitié à l’égard d’un grand juriste et d’un diplomate égyptien qui a profondément marqué son temps », a affirmé Dr Taymour Mostafa Kamel, président de l’association, honoraire du Parquet administratif d’Egypte, membre de l’Académie française des sciences d’outre-mer et organisateur de la cérémonie.

Messager de paix

Le francophone Ahmad Fathi Sorour, ancien président de l’Assemblée du peuple, ancien président de l’Union interparlementaire interna­tionale et président d’honneur de l’AEJF, a par­ticipé à la cérémonie du lancement de prix, en prononçant son discours en français, une façon de rendre hommage à Ghali et à la francophonie. « Il est important de mentionner le rôle de Boutros Ghali dans la consolidation de la paix et la sécurité internationales, afin d’éviter les conflits armés et les crises, tout au long de sa mission en tant que secrétaire général de l’Onu », a déclaré Sorour, en ajoutant que ce prix décerné tous les deux ans par un jury inter­national est lancé cette année en Egypte.

Double hommage à la Francophonie et à Boutros Ghali
Amr Moussa, ancien secrétaire général de la Ligue arabe, Abdelmohsen Salama, PDG d'Al-Ahram, ainsi que Névine Kamel, rédactrice en chef d'Al-Ahram hebdo, lors de la cérémonie de lancement du prix Boutros Ghali.

Mounir Fakhri Abdel-Nour, ancien ministre du Tourisme et de l’Industrie et président du conseil de surveillance de l’Université Française d’Egypte (UFE), a lui aussi participé à l’événe­ment. « Il a su être, tout au long de sa vie, en même temps un professeur universitaire et un homme politique et donner à ces deux aspects une dimension internationale, mais ce fut aussi un éminent juriste, d’ailleurs président d’hon­neur de l’association. Toute une vie dédiée à la consolidation de la paix », a-t-il dit sur Boutros Ghali. Mounir Fakhri Abdel-Nour a également mis l’accent sur le rôle de Ghali dans la Francophonie. « En tant que secrétaire général de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF, de 1997 à 2002), Ghali a donné une dimension politique à la francopho­nie et fait adopter aux Etats membres la décla­ration de Bamako dans laquelle l’OIF s’engage à préserver la paix dans le monde ».

Pour Boutros Ghali, la paix était une obses­sion, à laquelle il associe la protection des droits de l’homme, la démocratie et le dialogue consul­tatif et interactif, mais aussi la science et le savoir car « la paix ne serait se faire sans la connaissance des faits historiques, sociolo­giques, économiques et politiques pour per­mettre la prévention des conflits et le maintien de la paix », a ajouté Abdel-Nour, rappelant les propos de Boutros Ghali lui-même : « La route vers la paix devrait passer par la connaissance et le savoir ». « Donc, en créant ce prix, l’asso­ciation pérennise l’appel de Boutros Ghali à l’étude, à la recherche afin de prévenir les conflits et rétablir la paix dans le monde », a-t-il ajouté, en affirmant que l’UFE a apprécié cette initiative et s’engage à proposer des candidats au prix parmi les étudiants à vocation de porter haut et loin les valeurs de Boutros Ghali à prôner pour la francophonie.

La Ligue arabe a aussi participé à l’événe­ment. « Ghali portait en lui l’amour de son pays, l’Egypte, en tant que ministre des Affaires étrangères, il a toujours aspiré à défendre les intérêts vitaux de son pays et renforcer son posi­tionnement et son rôle influent aux niveaux arabe, africain et méditerranéen. Engagé pour un monde de progrès partagé, plus stable, paci­fique et solidaire, il promet les bases d’une diplomatie préventive dans son célèbre agenda pour la paix visant à tenir compte des dimen­sions socioéconomiques du maintien de la paix », a déclaré, dans son allocution, Ahmad Rashid Khatabi, représentant de la ligue et secrétaire général adjoint de la Ligue des Etats arabes. « Je ne peux conclure sans rendre, encore une fois, un profond hommage ce soir à ce grand homme qui nous a offert une vision humaniste et ambitieuse pour construire un monde nouveau, un monde de paix », a-t-il conclu.

Un prix pour la jeunesse francophone

A l’occasion du 35e congrès de l’Institut de droit d’expression et d’inspiration française (IDEF) qu’elle a organisé en 2019 au Caire, l’Association Egyptienne des Juristes Francophones (AEJF) a décidé de créer un prix en l’honneur de Boutros Boutros-Ghali (1922-2016), qui était président d’honneur de l’AEJF depuis sa fondation à l’initiative du président Fathi Sorour en 1992. Conformément aux grandes priorités de l’action internationale de Boutros Boutros-Ghali, ce prix destiné à la jeunesse francophone des pays du sud est consacré au dialogue, à la démocratie et la paix. Ces thèmes qui sont au coeur de la pensée de Boutros Ghali trouvent un écho fort dans le monde d’aujourd’hui avec l’accent mis sur la notion de « développement durable », qui concilie la protection de la sécurité humaine et la sauvegarde de l’environnement. Un site Internet est dédié à ce prix et aux modalités d’attribution de deux lots de 10 000 euros chacun.

Boutros Ghali, l’humaniste fidèle à la francophonie

Juriste, universitaire, diplomate et auteur de nombreux ouvrages, Boutros Boutros-Ghali a exercé de 1992 à 1996 la fonction de secrétaire général de l’Organisation des Nations-Unies. Avant cette nomination, il était, depuis mai 1991, vice-premier ministre égyptien chargé des Affaires étrangères. Avant son élection au parlement égyptien en 1987, il appartenait depuis 1980 au secrétariat du Parti national démocrate, et fut également vice-prési­dent de l’Internationale Socialiste. De 1949 à 1977, Ghali a été professeur de droit international et de relations inter­nationales à l’Université du Caire. Homme de paix mais aussi homme de la Francophonie, il fut nommé secrétaire général de la Francophonie au VIIe Sommet de la franco­phonie en novembre 1997 à Hanoi, un poste qu’il a occupé jusqu’à 2002. « Le français n’appartient pas seu­lement à la France », disait-il. Il voyait en Internet une occasion historique de rapprocher réellement et indivi­duellement les francophones du monde entier. « C’est dans ce sens que l’on peut dire qu’il y a non seulement une véritable communauté francophone sur Internet, mais que cette communauté, grâce à ce moyen de communica­tion, est aussi en passe de se renforcer », estimait-il.

Importante coopération juridique entre la France et l’Egypte

Invitée à la cérémonie du lancement du prix, Isabelle Lendrevie, avocate au bureau de Paris et docteure en droit, a consacré son allocution à un sujet non moins important : la coopération juridique entre l’Egypte et la France après Bonaparte. Elle a présenté les profondes interactions culturelles, linguistiques, juridiques et judiciaires entre l’Egypte et la France qui se poursuivent encore. Il existe depuis 1988 une filière fran­cophone de droit français à l’Université du Caire où les étudiants peuvent étudier le droit français jusqu’au niveau de master 2 et poursuivent leurs études de droit à l’Uni­versité Sorbonne. Ainsi que l’Université de Aïn-Chams qui a lui aussi créé une filière de droit francophone. En outre, de nombreux professeurs d’universités françaises viennent chaque année effectuer des missions d’enseignement. Par ailleurs, de nom­breux instituts de recherche français sont implantés en Egypte tels l’IFAO, le CEDEG, le CEALEX ou l’IRD, et de nombreux Egyptiens sont aujourd’hui entre les deux pays et poursuivent les échanges tant juridiques, commerciaux que culturels et linguistiques à l’instar de l’Association des Juristes Egyptiens Francophones (AJEF) qui notamment au sein de l’IDEF oeuvre pour la consolidation de l’influence mondiale de la culture juridique civiliste. D’ailleurs, Isabelle Lendrevie trouve que malgré ces relations, il reste encore des choses à faire. « Bien qu’on ne puisse pas ignorer les liens profonds qui existent entre la France et l’Egypte depuis Bonaparte et la redécouverte du patri­moine pharaonique, aujourd’hui peu de recherches et de livres français évoquent les liens juridiques et institutionnels qui nous unissent à l’Egypte, alors que nous parta­geons une histoire juridique commune depuis la fin du XIXe siècle et durant toute la première moitié du XXe siècle », a déclaré l’avocate qui vit depuis une vingtaine d’an­nées en Egypte, un pays qu’elle adore, rappelle-t-elle.

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