Monaco, De notre envoyé spécial
De quelle manière, dans les médias des pays francophones du bassin méditerranéen, faire état des questions environnementales ? Dans la continuité de la Conférence climatique de l’Onu tenue en novembre dernier (COP21) et de l’Accord de Paris, cette préoccupation revêt un intérêt légitime. Pour la traiter, l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), la principauté de Monaco et l’Union de la Presse Francophone (UPF) avec sa section monégasque ont conjugué leurs efforts pour réunir, pendant deux jours à Monaco les 4 et 5 mars, une centaine de professionnels des médias, décideurs politiques, diplomates, experts de l’environnement venus de 29 pays. Les différents ateliers et tables rondes ont permis d’intenses discussions. Ils ont surtout mis en valeur les difficultés et défis posés à la couverture des sujets environnementaux, essentielle à l’information des populations. Il s’agit en effet de ménager une Méditerranée maltraitée, un trait d’union entre deux continents mis en grave danger par les comportements humains polluants.
La principauté de Monaco, par sa situation géographique, est bien placée pour faire part de cette préoccupation, tandis que le prince Albert II affiche depuis le début de son règne en 2005 une volonté politique déterminée pour la protection de l’environnement par l’intermédiaire de sa fondation mais aussi de son gouvernement. Lors de la conférence inaugurale du symposium, il a immédiatement souligné que « le travail des médias est essentiel dans la protection de l’environnement pour émerveiller et informer les populations », tout en rappelant que le Musée océanographique de Monaco, inauguré en 1910 et dirigé de 1957 à 1988 par l’explorateur français Jacques Cousteau, a intensément eu recours aux médias pour sensibiliser les habitants de la planète à la diversité des océans.
« La principauté de Monaco a érigé la préservation de son environnement au rang de sur-priorité », a renchéri Michaëlle Jean, secrétaire générale de l’OIF. « Nous sommes ici pour réfléchir au lien entre médias et environnement dans l’espace méditerranéen : c’est de synergies, de coopération, d’associations, de mobilisations stratégiques et responsables, de développement humain et économique durable dont il est question », a-t-elle poursuivi. Avant de faire place aux discussions, le président de l’UPF, Madiambal Diagme, a d’ailleurs considéré que « cette manifestation de Monaco constitue le premier acte de la préparation de la prochaine Conférence mondiale sur le climat, la COP22, prévue à Marrakech au Maroc, en novembre prochain ». Le secrétaire général de l’UPF, Jean Kouchner, a de son côté souligné l’objectif de « faire en sorte que cette réunion soit utile aux médias et aux journalistes méditerranéens pour aider à une meilleure information des citoyens ».
Trois grands thèmes
Lors d’une première table ronde, la philosophe et essayiste française Cynthia Fleury a notamment soulevé que « les questions environnementales touchent les individus mais aussi l’Etat de droit, et que le 2e âge de l’Etat-providence est provoqué par les questions environnementales ». De quoi poser l’environnement dans un cadre global et mettre d’emblée en avant la responsabilité des décideurs politiques. Les discussions se sont poursuivies en atelier, sous trois grands thèmes : le populisme scientifique dans les médias, le poids des lobbies sur les médias et les réseaux et médiatisation des questions environnementales. Le tout grâce à des interventions libanaise, grecque, tunisienne, turque, marocaine ou française ayant permis d’exposer les différents niveaux de réactivité et d’engagements selon les réalités socioéconomiques locales. Avec évidemment un fort contraste Nord-Sud.
Des débats qui ont dégagé la nécessité d’avoir, au sein de la Francophonie et dans le respect des différences, des médias libres et indépendants, où l’aspect financier est déterminant afin d’atteindre ces caractéristiques. « Cela est indispensable pour la prise en compte par les Etats de cette cause commune. L’exemple concret est cette Méditerranée qui reste plus que jamais le Mare Nostrum », a indiqué le président de l’UPF Monaco, Patrice Zehr.
Face aux intérêts de puissants groupes industriels et leurs impératifs de profits, les médias font face à de fortes pressions, voire menaces physiques sur les journalistes, lesquelles mettent en danger le droit à l’information des citoyens. Vient ici la menace sur le droit à l’éducation des populations, dont le travail de sensibilisation mis en oeuvre par des médias est le vecteur. Michaëlle Jean affiche quand même son optimisme : « Je crois beaucoup à la contagion positive des valeurs écologiques. Je crois aussi beaucoup à la capacité et à la volonté qu’a la jeune génération de réussir, là où nous avons échoué, d’aller de l’avant, là où nous avons trop longtemps tergiversé ». Et d’insister : « Aucune avancée ne sera possible sans une parfaite connaissance des enjeux environnementaux. Il est essentiel que les journalistes puissent extraire de ces controverses les idées justes afin d’éclairer et d’informer les opinions publiques et de susciter, ainsi, l’adhésion et l’engagement de toutes et de tous en faveur d’une planète durable ».
Ce qui n’empêche pas la vigilance : « La Francophonie sera au rendez-vous (de la COP22) à Marrakech en novembre prochain. Nous nous constituerons, en lanceurs d’alerte pour dénoncer l’urgence de réagir et d’agir », annonce Michaëlle Jean.
Qu’est-ce que l’Union de la presse francophone ?
L’Union de la Presse Francophone (UPF) est la plus ancienne association francophone de journalistes reconnue par les organisations internationales telles que l’Onu. Née d’une initiative franco-canadienne le 13 mai 1950 sous l’appellation d’origine d’« Association Internationale des Journalistes de Langue Française », (AIJLF), elle s’est ensuite employé à développer ses relations dans le monde.Michaëlle Jean, secrétaire générale de l’OIF depuis 2015, ex-gouverneur du Canada et ancienne journaliste, a manifesté sa volonté de développer un partenariat stratégique avec l’UPF qui peut apporter davantage au développement de la Francophonie dans le monde. Elle entend saisir l’opportunité que lui offre l’UPF d’établir un pont avec les services de l’OIF afin d’inciter les différentes sections nationales à appuyer les missions de l’OIF dans leurs pays respectifs.
Depuis le 22 novembre 2014, l’UPF est présidée par Madiambal Diagne (Sénégal). Son secrétaire général international est Jean Kouchner. L’UPF regroupe plus de 3 000 journalistes, responsables et éditeurs de la presse écrite et audiovisuelle, répartis dans 110 pays ou régions du monde .
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