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Avec 25 titres obtenus en 17 ans en tant qu’entraîneur, l’ancien directeur technique des équipes nationales de squash, Amir Waguih, a réalisé un record prodigieux. « Depuis que j’ai quitté la compétition en tant que joueur, je me consacre complètement au squash et je donne sans rien attendre en retour. Je suis amoureux de ce sport. Les gens me reprochent d’avoir tout donné au squash et me disent que si j’avais eu une approche plus commerciale dans mes choix et ma carrière d’entraîneur, j’aurais été propriétaire d’un jet privé », note Amir Waguih, qui a été le plus jeune directeur technique des équipes nationales de squash. En fait, Waguih a pris en charge les sélections juniors, seniors et dames et a réalisé avec elles des exploits mémorables. « Le squash est toute ma vie. Mon objectif n’est pas d’en tirer un profit financier, mais plutôt d’obtenir des victoires. Avec le temps, j’ai commencé à voir les fruits de mes sacrifices et je suis vraiment satisfait, car la récompense est inimaginable », renchérit-il.
Waguih est l’une des grandes figures du squash égyptien. Il est impossible qu’un grand événement de squash ait lieu en Egypte sans sa présence. Il joue un rôle primordial pour relever le moral des joueurs. « Très peu sont les joueurs ou les joueuses que je n’ai pas entraînés ou soutenus, depuis la légende Ahmad Barrada jusqu’aux cadets qui font leurs premiers pas en squash ».
Amir Waguih n’a jamais oublié ses débuts difficiles en squash qui était à l’époque un sport peu connu, négligé et non médiatisé. Il était membre d’un club modeste, le club Talaat Harb, relevant de la banque Misr où travaillaient ses parents. Au début, il jouait au basketball, car il était grand de taille. Dans l’une des compétitions interclubs, il jouait contre l’équipe de basket du club Tawfiqiya. Mais son équipe a perdu, ce qui lui a causé une grande déception. Ses voisins étaient membres de ce club. Ils l’ont convaincu de jouer avec eux. Waguih a décidé de quitter le basketball et d’opter pour le squash qui est un sport individuel dans lequel ses efforts sur le court peuvent être payants. Il a économisé de l’argent avec l’aide de sa soeur pour acheter une raquette de squash. « Le magasin qui vendait les raquettes appartenait à un champion de squash qui s’appelait Saïd Soliman. Je lui ai donné 6,5 L.E. que j’avais économisées et il m’a offert une balle de squash gratuitement. J’étais très heureux », raconte Waguih. Le lendemain, à 6h du matin, Waguih est allé jouer au squash. Ses coups étaient tellement forts que les cordes de la raquette s’étaient brisées. Une chose qui ne survient qu’avec les joueurs professionnels. Et c’est à partir de ce moment que Waguih a commencé à découvrir son talent exceptionnel.
Il ne perdait pas une seule occasion pour jouer et s’exercer. Il s’entraînait jour et nuit avec ses voisins ou avec un entraîneur de tennis, car le club de Tawfiqiya était connu pour son tennis et plus tard pour ses entraîneurs de squash, comme Nasser Tawfik ou Abdel-Rahman Abou-Gabal. En raison de son grand amour pour le squash, Waguih a négligé ses études et parfois il ratait ses cours pour aller jouer au squash. « Les études étaient la priorité pour tout le monde, mais pas pour moi. Tout le monde me reprochait de les avoir négligées, mais le squash était mon pari et je l’ai réussi », assure-t-il.
Amir Waguih s’est donné complètement au squash. Il suivait les stars européennes. Puis, il a commencé à disputer des tournois locaux et a gagné de nombreux titres. Il rêvait de partir jouer en Europe, notamment en Angleterre, le pays du squash, mais ce rêve était difficile. « J’attendais chaque année que des joueurs professionnels vivant en Angleterre visitent l’Egypte pendant leurs vacances afin de pouvoir jouer avec eux », raconte Waguih.
Bien qu’il n’ait jamais raté un tournoi, Amir Waguih n’a pas atteint les quarts de finale d’un tournoi jusqu’à l’âge de 15 ans. A l’âge de 17 ans, il a eu la chance de faire la connaissance du jeune Mohamad Abdel-Razeq qui lui a conseillé de travailler sur sa condition physique qui, selon Waguih, était son point faible.
A cette époque, il était rare que les joueurs de squash s’intéressent à leur condition physique. Ils se basaient uniquement sur leur technique de jeu et leurs talents. Abdel-Razeq a pris en charge Waguih du point de vue condition physique. Et il a rempli son contrat. Le niveau de Waguih s’est nettement amélioré et il a réalisé un record en remportant le titre de champion d’Egypte à 9 reprises. Un record qu’aucun joueur de squash n’a pu battre. Le deuxième meilleur record actuel revient à Karim Darwich, 4 fois champion d’Egypte. « Mohamad Abdel-Razeq était un sorcier. Il a changé ma vie. Je me souviens très bien quand il passait me prendre avec sa voiture tous les jours pour m’entraîner au pied des pyramides sur le sable », raconte Waguih.
Amir Waguih a commencé à représenter l’Egypte aux Championnats du monde et aux compétitions les plus prestigieuses du circuit du squash. En fait, pour devenir un joueur professionnel, il lui fallait un certain nombre de participations internationales chaque année pour gravir les échelons du classement mondial. Mais issu d’une famille moyenne, Waguih était dans l’incapacité de financer ses déplacements afin de réaliser son rêve. Raison pour laquelle il a décidé de se lancer dans une carrière d’entraîneur pour être toujours proche de son amour: le squash.
Juste après cette décision, Waguih a reçu une offre pour entraîner l’équipe nationale koweïtienne. Quatre mois plus tard, il retourne en Egypte après le décès de son père. « Je devais rester en Egypte pour assumer la responsabilité de ma soeur et de ma mère », dit-il. De retour en Egypte, Abdel-Wahed Abdel-Aziz, directeur technique des sélections égyptiennes à cette époque, l’a choisi comme assistant. Il enchaîne alors les exploits. « Avant l’Egypte terminait au mieux à la 7e place. Mais à partir de 1994, nous avons réalisé des exploits avec une merveilleuse équipe : Ahmad Barrada, Omar Al-Borollossi, Ahmad Fayzi et Karim Al-Mestekawi. La même année, nous avons décroché les Championnats du monde par équipe et individuel. On était une équipe très forte. Et jusqu’à présent, l’Egypte domine le squash hommes et dames dans toutes les catégories d’âge », raconte Waguih avec beaucoup de fierté.
Amir Waguih a obtenu 25 titres avec les sélections égyptiennes, mais ce n’était point facile. Il a fait face à des moments difficiles dans la gestion des équipes. Il a pris des décisions décisives qui auraient pu mettre fin à sa carrière d’entraîneur. « Des responsables et des amis voulaient intervenir dans mes décisions, mais j’ai refusé. J’ai assumé avec force et détermination la responsabilité de mes choix. Dieu m’a toujours soutenu », dit Waguih. A titre d’exemple, en 2001, Amir Waguih n’a pas sélectionné Ahmad Barrada, qui était au sommet de son succès, pour rejoindre la sélection aux Championnats du monde. « Barrada avait une grave blessure à cette époque qui a affecté son niveau. Etant la star de l’équipe, il a refusé de rejoindre le camp de préparation à l’instar de ses coéquipiers et de passer par des éliminatoires pour choisir les meilleurs. Raison pour laquelle je l’ai éliminé et je suis revenu avec le trophée », ajoute-t-il.
Ce trophée, ainsi que d’autres témoignaient de la sagesse et de la force de Waguih qui, malgré son succès, avait des rêves à réaliser en squash en dehors de l’Egypte. En 2012, il se lance dans une nouvelle expérience. Il part aux Etats-Unis après avoir signé un contrat avec un homme d’affaires américain pour lancer une académie internationale de squash. Il voulait faire de cette académie une première dans le monde du squash.
L’académie, située au centre de la ville de Washington DC, a joué un rôle important pour promouvoir ce sport peu connu aux Etats-Unis. Waguih a fait de cette académie un endroit de rêve. Les joueurs pouvaient dormir, étudier, manger sainement, faire des exercices de fitness et s’entraîner. Waguih est resté aux Etats-Unis pendant 6 ans et a réalisé un grand succès. Il est revenu en Egypte avec le rêve de lancer un projet similaire. « Je suis revenu en Egypte en 2018 avec beaucoup d’enthousiasme et avec l’idée de créer une académie pour les jeunes joueurs égyptiens ».
Waguih est allé voir le ministre de la Jeunesse et du Sport, Achraf Sobhi, pour lui présenter ses ambitions en squash. Le ministre l’a nommé responsable d’un projet pour jeunes joueurs. Ce projet vise à promouvoir le squash non seulement au Caire, mais aussi dans 8 autres gouvernorats moyennant un abonnement peu coûteux. « Les enfants des martyrs de l’armée et de la police, ainsi que les orphelins ne payeront rien, même les raquettes, les balles et les uniformes. Je suis fier de faire partie de ce grand projet ».
Selon Waguih, la Fédération égyptienne de squash doit changer. Il présentera officiellement en septembre prochain sa candidature pour le poste de président de la fédération. Il a de nombreuses stratégies pour que le squash égyptien reste toujours au sommet et ne recule pas comme ce fut le cas en Angleterre et au Pakistan. « Le squash égyptien passe actuellement par un moment critique. Il est vrai que la plupart des joueurs du top 10 hommes et dames sont égyptiens, mais ce n’est plus le cas en juniors. On doit beaucoup travailler pour que le squash égyptien reste au sommet », s'exprime Amir Waguih. Il affirme ne pas chercher un intérêt personnel à travers sa candidature pour le poste du président de la Fédération égyptienne de squash, mais il pense que ce poste va lui donner l’occasion d’être au service de ce sport qu’il a pratiqué pendant plus de la moitié de sa vie.
Waguih a été bien chanceux non seulement dans sa carrière de joueur et d’entraîneur, mais aussi dans sa vie privée. A l’âge de 25 ans, il rencontre la célèbre joueuse de tennis Chahira Tawfiq, championne d’Egypte, d’Afrique et du monde arabe. Le couple se marie et a eu deux enfants. « J’ai eu vraiment de la chance d’épouser une sportive comme Chahira. C’est une personne qui comprend ce qu’est un sportif et elle sait qu’il y a des sacrifices à faire », dit-il reconnaissant.
Waguih n’a jamais entraîné sa fille et son fils au squash qui ont choisi plutôt le tennis. « Quand j’étais jeune, j’ai beaucoup négligé mes études, mais j’ai encouragé mes enfants à s’intéresser à leurs études et ils sont les meilleurs de leurs universités. Je suis fier d’eux, de ma femme et de mon parcours en squash », conclut Waguih.
Jalons
24 août 1967 : Naissance.
1994 : Championnats du monde par équipe et individuel (juniors).
1996 : Championnats du monde individuel juniors.
1999 : Championnats du monde par équipe seniors.
2000 : Championnats du monde individuel juniors.
2012 : Championnats du monde par équipe et individuel juniors hommes. Championnats du monde individuel dames juniors. Championnats du monde individuel seniors. Championnats du monde par équipe dames.
2019 : Championnats du monde individuel seniors. Championnats du monde par équipe seniors.
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