Il était parmi les grands lauréats du dernier mois du Ramadan à travers la série phare Kalabch (menottes) et il vient de prendre la tête du box-office égyptien avec son film Harb Karmouz (guerre de Karmouz). Une véritable tornade : ce film d’action au goût politico-historique a déjà amassé 57 340 millions de L.E., devenant le film collectant le plus de recettes de tous les temps dans l’histoire du cinéma égyptien. Il fallait bien cela pour un film révolutionnaire, premier blockbuster à offrir une distribution dont les vedettes sont un bouquet d’acteurs jeunes, mais avec d’autres, plus célèbres et posés.
« C’est un grand honneur de travailler avec de tels grands noms, comme Mahmoud Hémeida, Ghada Abdel-Razeq et Ahmad Al-Saqqa, tout comme avec nombre de jeunes de talent. J’ai la chance de partager l’affiche des deux films collectant les plus grosses recettes du cinéma, comme si Dieu voulait me récompenser pour mon travail constant et laborieux au cours de ma vingtaine d’années de carrière », affirme Amir Karara.
En fait, le succès sonne toujours deux fois, voire trois ! Du feuilleton Kalabch (menottes) avec ses deux volets au film Horoub Idtérari (fuite obligatoire), arrivant à Harb Karmouz (guerre de Karmouz), le jeune Karara vient d’incarner deux, voire trois rôles phare de sa carrière. Comme si la chance souriait enfin à ce comédien, né le 10 octobre 1977 au Caire, d’une famille comptant parmi ses ancêtres le célèbre comédien farceur, Mahmoud Chokoukou.
Après une enfance et une jeunesse pas du tout aisées, Karara n’avait pas en tête un avenir artistique. Une fois son baccalauréat en poche, il choisit le tourisme et l’hôtellerie. « Comme la plupart des jeunes, je passais ma vie sans aucun calcul, l’important étant de passer de bons moments avec mes amis, mais j’ai toujours senti que mon avenir devait être différent de celui des autres. Je sentais en moi un vrai penchant vers l’art sans savoir qu’il serait un jour mon métier ou plutôt ma passion », explique l’acteur. Ayant un physique sportif, il joue au volley-ball, allant jusqu’à faire partie de l’équipe nationale. Le créateur et réalisateur de publicités Tareq Nour repère le jeune homme au physique prometteur et lui conseille de tenter sa chance devant les caméras. Il lui propose, en 2002, de présenter un programme de concours entre jeunes talents, Star Maker. Sammaana Sotak (laisse-nous t’écouter chanter).
« Je me souviens bien de ce jour où j’ai accompagné un ami qui avait un rendez-vous de travail dans le bureau de Tareq Nour. Mon ami devait enregistrer une voix-off pour l’une des annonces publicitaires. Me trouvant tout seul dans le studio et face au micro, j’ai imité la voix de Tareq Nour dans l’une de ses fameuses annonces. La surprise était que Tareq Nour se trouvait dans la salle voisine et m’a entendu en train de l’imiter. Tout en riant de mon audace, il m’a proposé de travailler avec lui et m’a offert la première grande chance de ma vie : présenter le programme Star Maker », raconte Karara. Une grande opportunité pour le jeune Karara, qui n’a pas hésité à jouer dans deux vidéoclips en 1999 de Samira Saïd, Rohi (mon âme) et Ya Habibi Odli Tani (ô mon amour, reviens), sans même la croiser sur les plateaux.
Se faire une vraie place dans le milieu n’a pas été simple pour Karara, notamment en raison de son beau physique — un peu à la Hussein Fahmi —, longtemps exploité par les réalisateurs dans de brèves apparitions qui le cantonnaient dans de petits rôles souvent sans grande importance, selon la règle « Sois beau et tais-toi » ! D’un premier petit rôle en 2001 dans le téléfeuilleton Lel Adala Wogouh Kassira (plusieurs facettes pour la justice), réalisé par Mohamad Fadel et interprété par Yéhia Al-Fakharani, celui d’un jeune mari opportuniste qui se marie avec une femme plus âgée que lui, à de brèves apparitions en 2002 dans les deux volets de la sitcom Chabab Online (des jeunes en ligne), réalisée par Hala Khalil, le succès n’était pas encore au rendez-vous.
Il signe une nouvelle apparence en 2004 à travers un petit rôle dans le film Ahla Al-Awqat (meilleurs moments), face à Menna Chalabi, après sa participation minime, un an auparavant, au feuilleton Al-Amma Nour (la tante Nour). Toutefois, personne ne pensait jusqu’alors que ce jeune beau visage — connu uniquement à travers les émissions de divertissement qu’il avait présentées quelques années plus tôt — allait devenir l’une des stars les plus influentes du box-office. A l’exception d’Amir Karara lui-même. En effet, cette année-là, le jeune acteur s’est lancé un défi : « Mon objectif principal et irrévocable c’était de devenir l’une des stars les plus célèbres et j’ai décidé de réaliser les meilleures performances possibles en tant qu’acteur », confie Karara avec un grand sourire de fierté, puisqu’il a en fait réussi, quelques années après, à gagner son pari.
Toujours à travers un second rôle en 2005, dans la comédie Zaki Chan, face au duo Ahmad Helmi et Yasmine Abdel-Aziz, il continue à camper le rôle du jeune beau gosse. Son talent incontestable tape dans l’oeil du réalisateur Osman Abou-Laban, qui l’engage pour figurer au générique de son film Amaliyat Khassa (opérations spéciales), où il campe le rôle d’un voleur professionnel, avec Khaled Sélim, Tamer Hagras et Nabil Issa. Pour Amir Karara, c’est le commencement d’un nouveau cycle : il joue des rôles plus grands et change peu à peu de peau.
L’année 2011 est importante pour Karara. Après d’autres petits rôles joués ici et là, le grand succès est au rendez-vous avec le feuilleton Al-Mowaten X (le citoyen X), avec une panoplie de jeunes acteurs tous prometteurs et devenus stars quelques années plus tard. « Pendant longtemps, j’ai travaillé très dur sans succès. Mais les gens de l’industrie m’ont remarqué. Lorsqu’ils sont tombés sur ce script, ils ont immédiatement pensé à moi et m’ont engagé. Le réalisateur savait que ce que je faisais correspondait à ce qu’il cherchait. Le résultat a été marquant », se réjouit Karara.
Finis alors les petits rôles : l’acteur se tourne désormais vers des caractères différents et des contributions plus profondes. En 2012, il participe à trois oeuvres télévisées, dont deux pour gagner sa vie, étant donné qu’il était fraîchement devenu père de famille. Karara, attaché toujours à sa franchise naturelle, indique : « Même si j’ai participé parfois à des oeuvres essentiellement pour gagner de l’argent, je n’ai jamais présenté des rôles frivoles ou bien qui m’ont embarrassé face à ma famille et surtout mes enfants ».
Alors que son apparition face à Sérine Abdel-Nour dans le feuilleton libanais Roubi était essentiellement, d’après lui, « pour pouvoir continuer à acheter les couches de son fils Sélim, à peine né à l’époque ! », cette oeuvre lui a offert le premier prix de sa carrière, celui du meilleur acteur arabe, qui lui a été décerné par le Festival du drame jordanien. Cherchant plus que jamais à changer son image, le jeune comédien enchaîne, à partir de 2012, des rôles très différents.
Rien ne semble alors plus pouvoir l’arrêter. En trois ans, Karara signe trois des plus grandes oeuvres de sa carrière. Taht Al-Ard (sous terre), Hawari Boukharest (ruelles de Budapest) et Al-Tabbal (le joueur de tambour). Cela lui a permis de faire évoluer son image, puisqu’il a réussi dans Taht Al-Ard à partager l’écran, en 2013, avec Songül Öden, la célèbre actrice turque, fort connue à l’époque par le caractère de Nour qu’elle a campé dans le feuilleton romantique turc éponyme, connu dans le monde arabe par Nour et Mohannad.
C’est la première fois que les fans du jeune comédien trouvent sa photo dominant l’affiche toute seule. Un rêve qu’il a réalisé à travers les personnages Sayed Boukharest et Saleh Abou-Gazia qu’il a joués successivement dans Hawari Boukharest en 2015 et Al-Tabbal en 2016.
Las de son image du voyou, Action Man, et du succès limité, à son avis, de ses deux derniers feuilletons sur le plan de la distribution et des revenus, Karara a pensé mettre un terme à sa carrière et à prendre sa retraite en tant qu’acteur. « Malgré le succès qu’ont rencontré mes rôles dans ces oeuvres, le succès n’était pas égal pour les producteurs, étant donné la cinquantaine de drames télévisés qui se concourent chaque Ramadan, portant de grands noms sur leurs affiches. Un état de lassitude m’a atteint au sommet de ma réussite en tant qu’acteur, ce qui aurait pu faire chavirer toute ma carrière. Mais toujours après la tempête, vient le beau temps », souligne-t-il.
Il lui aura fallu passer un an en plein désarroi avant que le secours crucial n’arrive. Quand le jeune réalisateur Peter Mimi veut présenter un téléfeuilleton, Kalabch, sur une nouvelle facette de la relation entre la police et la société en Egypte après la révolution, Karara n’est plus un débutant, mais un comédien accompli. C’est à travers le caractère de Sélim Al-Ansari, le policier aux actes héroïques, mais qui devient du jour au lendemain opprimé injustement, que Karara trouve le succès qu’il cherchait depuis ses débuts. « Mes fans ne cessent de m’appeler dans la rue Bacha Masr (chef des chefs, ndlr), un surnom que le comédien Diab, incarnant le secrétaire de la police dans les événements du feuilleton, m’offrait par courtoisie. Ce qui prouve la réussite de l’oeuvre et la sympathie qu’a eue mon caractère », se réjouit Karara.
Un personnage de policier pendant le Ramadan, suivi d’un personnage tout à fait opposé pendant le Petit Baïram, celui d’un voleur professionnel dans le thriller Horoub Idtérari (fuite obligatoire), réalisé par le jeune Ahmad Khaled Moussa, où il partage l’affiche avec Ahmad Al-Saqqa et Ghada Adel. « Al-Saqqa est l’un de mes amis les plus proches. Lorsqu’il m’a appelé pour me proposer la participation à cette oeuvre, j’étais en voyage à l’étranger. Je lui ai annoncé mon approbation et je lui ai demandé de signer le contrat à ma place, sans même lire le scénario, car c’était une grande occasion de jouer devant les talentueux Al-Saqqa et Ghada Adel », explique le comédien.
Le charme d’Amir Karara réside en fait dans son caractère. Il est toujours très aimable, accessible et ambitieux, au point que beaucoup de jeunes peuvent s’identifier à lui. Père de trois enfants, il tâche à passer tout son temps libre loin des plateaux au sein de sa petite famille, tout en gardant ses enfants, tant que possible, loin des projecteurs et des fards de son métier.
En somme, Amir Karara s’impose de plus en plus comme une valeur sûre sur la scène. Continuant dans sa démarche éclectique et décomplexée, le Prince, comme le surnomment ses amis, pourra commencer prochainement à préparer le troisième volet de la série télévisée Kalabch. Encore des choix osés, mais également mesurés .
Jalons:
10 octobre 1977 : Naissance au Caire.
1999 : Première expérience dans deux vidéoclips signés Samira Saïd.
2002 : Premier grand succès en tant que présentateur du programme télévisé Star Maker.
2005 : Partage de l’affiche avec Ahmad Helmi et Yasmine Abdel-Aziz dans le film Zaki Chan.
2011 : Grand succès de son feuilleton Taraf Talet (troisième partie).
2013 : Premier grand rôle en tête d’affiche du feuilleton Hawari Boukharist.
2018 : Grand succès dans le box-office de son film Harb Karmouz.
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