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Saba Moubarak : La reine de Saba jordanienne

Yasser Moheb, Mardi, 25 juillet 2017

Avec une cinquantaine d’oeuvres à son actif et 19 ans de carrière, l'actrice jordanienne Saba Moubarak est devenue l'une des stars arabes les plus estimées de ses pairs. Sa riche filmographie et ses nombreux succès lui ont valu le respect des critiques.

Saba Moubarak
Saba Moubarak, l'actrice jordanienne.

Avec ses longs cheveux et ses grands yeux noirs, Saba Moubarak réunit tous les atouts de la beauté arabe. A Cannes comme à Amman, à Dubaï comme au Caire, elle représente honorablement son pays natal, la Jordanie. Saisissante et très active, elle ne cesse de se déplacer d’une conférence à une projection, d’un colloque à une réception, donnant une image respectable des jeunes cinéastes arabes. Ne pouvant manquer l’occasion de parcourir les nouvelles tendances cinématographiques, elle était également présente à la dernière édition du Festival de Cannes, et a participé à l’annonce de la première édition du Festival international du film d’Amman, dont la première édition est prévue entre les 20 et 25 juin 2018. « Je suis tellement contente et fière de voir naître le premier grand festival de cinéma dans mon pays natal, la Jordanie.

D’autant plus qu’il a comme but principal de faire découvrir et d’encourager de jeunes talents jordaniens et arabes », souligne Saba Moubarak, enthousiaste. Peu nombreuses sont, en effet, les comédiennes jordaniennes qui réussissent à percer. « Les Jordaniens sont dotés d’une verve artistique affranchie, mais ils ne sont pas encouragés par les organismes officiels, comme le syndicat des Artistes. Nous devons tous seconder ces institutions, afin de promouvoir davantage la scène artistique jordanienne », ajoute-t-elle. Au panthéon des célèbres comédiennes jordaniennes se trouvent Samira Khouri, Sohaïla Farahat, Nadra Omrane et Rachida Al-Dajani, et désormais, Saba Moubarak. La richesse de sa filmographie et ses différents prix prouvent que l’actrice compte probablement parmi les plus talentueuses de sa génération.

Pourtant, Saba Moubarak se destinait à la base à une carrière d’artiste peintre. Il y a une vingtaine d'années, la petite Saba s’est lancée dans l’art sans penser qu’elle deviendrait un jour une star du grand écran. Née le 10 avril 1976, dans un milieu modeste, d’un père jordanien et d’une mère palestinienne, Saba Ahmad Soleiman Moubarak Al- Soyouf se sent vite à l’étroit dans son univers familial. Adolescente, elle a été ce beau brin de fille, à qui sa mère a transmis son goût pour l’art. Elle décide donc de se consacrer à l’art, nourrie par le génie et la profession de sa mère, la peintre et écrivaine palestinienne, Hanan Al-Agha. Après une enfance qui l’a menée à vivre entre l’Arabie saoudite, l’Egypte, la Jordanie et les Emirats, elle a étudié les beaux-arts à l’Université d’Al- Yarmouk, à Irbid. C’est là qu’elle a découvert son goût et sa passion pour le jeu. « J’étais l’étudiante la plus studieuse de ma classe aux beauxarts. Je voulais devenir comme ma mère qui m’a toujours fascinée. Je me souviens bien du jour où une amie m’a demandé de l’accompagner pour un casting à l’université.

Là-bas, l’un des professeurs m’a demandé de jouer un petit rôle dans l’une des pièces de théâtre données à l’époque sur les planches du théâtre universitaire. A ma grande surprise, cette pièce a gagné le premier prix du concours organisé par l’université et j’ai été sélectionnée comme meilleure comédienne ! », se rappelle Saba Moubarak. « Je suis partie en tournée, dans différentes universités, avec cette même troupe de théâtre, et en revenant, j’ai découvert que mes professeurs m’avaient fait changer de section. Ils m’avaient inscrit dans la section théâtre », raconte-t-elle. Son rêve de devenir peintre s’écroule donc d’un seul coup, pour laisser libre la voie à un autre rêve : devenir comédienne.

La jeune fille se jette alors à corps perdu dans le monde du théâtre. Elle partage son temps entre ses études académiques, les spectacles à l’université et quelques apparitions timides à la télévision. « Un jour, en jouant sur les planches du théâtre universitaire, j’ai croisé le comédien Nour Al-Chérif qui était accompagné par un groupe de professeurs. Il était venu visiter la section théâtre pour encourager les étudiants et leur prodiguer des conseils. Une vraie star débordante d’énergie positive », raconte Saba. « Il est monté sur la scène pour nous saluer et m’a serré la main en disant : tu dois continuer à faire du théâtre, tu es douée. Je n’oublierai jamais ces paroles. Une dizaine d’années plus tard, j’ai eu l’honneur de jouer à ses côtés, en 2013, dans le feuilleton : Khaf Allah (crains Dieu) ».

En 1998, plusieurs réalisateurs la choisissent pour participer à trois feuilletons : Al- Kawasser (les braves), Qamar Wa Sahar (lune et veille) et Chawq Al- Rahaf (passion douce). Depuis, elle ne cesse d’enchaîner les rôles. De Khaled Ibn Al-Walid à Al-Haggag à Omar Al-Khayyam, elle réussit à faire ses preuves à travers des biopics à succès, jusqu’à tenir le rôle de Wadha, dans le fameux feuilleton Nemr Ibn Odouane, en 2007. « Les gens ont commencé à me reconnaître dans la rue pour la première fois. C’était le début de la célébrité », explique-t-elle. En 2003, la comédienne obtient son premier rôle cinématographique dans Safar Al-Ajneha (le départ des ailes), suivi, quatre ans plus tard, par le long métrage syrien Kharej Al-Taghtiya (hors couverture) du réalisateur syrien Abdel-Latif Abdel-Hamid. Le film fait un tabac sur la scène arabe. Sa carrière est lancée. Même si la réelle consécration télévisée a lieu en 2009, avec le rôle de la reine Balqis qu’elle a incarné dans le feuilleton éponyme. Saba Moubarak enchaînait alors les grands rôles sur le petit écran, notamment dans les téléfeuilletons syriens et tunisiens.

C’est ainsi qu’elle a rencontré le réalisateur tunisien Chawqi Al- Majéri, avec qui elle a vécu une belle idylle, suivie d’un mariage qui n’a pas duré. Le couple a cependant eu un fils, Ammar, la fierté de Saba. Au fil du temps, Saba Moubarak se met également à la réalisation.

Elle monte deux pièces de théâtre puis décide de produire deux feuilletons, Zein et Tawq Al-Asfalt (la zone d’asphalte). En 2010, elle accepte de partager la vedette avec l’actrice égyptienne Zeina, dans le film Bentein Min Masr (deux filles d’Egypte), écrit et réalisé par Mohamad Amin. « Le défi pour moi était de réussir à parler avec l’accent égyptien de façon crédible », lancet- elle. Tournant avec des réalisateurs confirmés tels que Najdat Anzour, Bassel Al-Khatib, Chawqi Al- Majri ou Mohamad Yassine, Saba a été nommée meilleure actrice jordanienne en 2009 et 2010. L’actrice a également joué dans les feuilletons égyptiens Haq Mayyet (droit mort) et Afrah Al-Qobba (noces du quartier Al-Qobba), et a même commencé à s’introduire dans le cinéma occidental, avec la série Hamilton diffusée en Europe.

« Je n’ai jamais eu ce rêve, propre à d’autres, de devenir une actrice internationale », commente la jeune actrice. « Mais je crois qu’en présentant des oeuvres locales de qualité, le succès et la célébrité vous emmènent ailleurs, en dehors des frontières », ajoute-t-elle. Saba Moubarak gère sa carrière avec intelligence et clairvoyance, et ne cesse d’éblouir un public toujours plus large. Même si elle reste très proche de sa famille : « Je ne rate aucune occasion de passer du temps auprès de ma famille, surtout auprès de mon fils Ammar », avoue-t-elle avec un grand sourire aux lèvres. « Parfois, je fais l’aller-retour juste pour passer un jour ou deux avec eux.

Cette chaleur familiale et ce soutien est essentiel pour moi. Que Dieu me les garde ! », conclut-elle. Mais l’actrice ne s’arrête jamais vraiment. Elle est actuellement en train d’étudier les nouveaux scénarios des feuilletons du Ramadan prochain, tout en se préparant à remplir sa tâche de membre du jury à la prochaine édition du Festival de Malmö pour le cinéma arabe de Suède, en octobre prochain.

Jalons :

10 avril 1976 : Naissance en Arabie saoudite.

1998 : Début de sa carrière de comédienne.

2009 : Prix de la meilleure interprétation féminine, au Festival du Moyen-Orient aux Emirats arabes unis.

2010 : Premier succès égyptien, avec le film Bentein Min Masr (deux filles d’Egypte).

2016 : Membre du jury du Festival international du film du Caire.

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