Al-Ahram Hebdo : Dans quelles conditions avez-vous été à nouveau choisi pour tenir le poste de ministre de la Culture ?
Gaber Asfour : Lorsqu’on m’a appelé, j’ai demandé qu’on me garantisse une liberté de mouvement, et on l’a accepté. Nous nous sommes mis d’accord sur le fait que je travaillerais d’un côté avec 7 ou 8 ministères, et de l’autre avec la société civile. Les deux ensemble peuvent réaliser les objectifs désirés d’un Etat civil, d’ouverture d’esprit, de justice et de respect des différences. Ce sont des principes que je partage avec le gouvernement actuel et pour lesquels j’ai accepté ce poste de ministre.
— Vous avez demandé à Sayed Yassin d’élaborer une stratégie pour l’avenir de la culture en Egypte. Cela donne l’impression que vous voulez garder la mainmise sur la culture en Egypte. Pourquoi n’avez-vous pas chargé de groupe d’intellectuels pour cette mission plutôt que de la donner à un seul individu ?
— J’envisage d’organiser le travail au ministère de la Culture selon une manière à la fois horizontale et verticale. Horizontale car ce ministère n’est pas le seul à être préoccupé par la culture, j’ai insisté sur le fait d'instaurer une coordination avec les autres ministères concernés par la culture comme l’Enseignement, la Communication, la Jeunesse... Je m’attelle en ce moment au côté vertical en changeant la direction de certains postes du ministère, tout en ayant comme source d’inspiration les slogans levés par les jeunes lors du 25 janvier et du 30 juin, et qui ont rapport avec la justice sociale, que j’appelle moi la justice cognitive. Cela signifie que Le Caire ne monopolise pas tout: que l’habitant de Louqsor puisse recevoir le même service culturel que celui du Caire. Je travaille actuellement avec le ministère de la Planification, pour restructurer le ministère de la Culture en garantissant plus de souplesse.
— Pourquoi avez-vous annulé la création des branches du Conseil Suprême de la Culture (CSC) dans les provinces? Cela a d’ailleurs déjà commencé à Alexandrie...
— Il n’y a rien qui s’appelle le CSC dans les provinces! Parce que le décret présidentiel, qui a pouvoir de loi, n’inclut pas cela. Mais si les intellectuels d’Alexandrie y créent une instance, et qu’ils l’appellent le Conseil suprême de la culture, alors qu’ils soient les bienvenus !
— Faut-il changer les lois qui régissent le Conseil ?
— Saïd Tewfiq, ex-secrétaire général du CSC, avait fait des amendements aux règlements qui régissent l’organisation des prix de l’Etat. Mais le problème est que ça n’a pas été approuvé par le comité de législation au Conseil de l’Etat. A mon avis, le problème du CSC ne réside pas dans la loi, mais dans une question de morale.
— Vous vous êtes engagé à réaliser « une justice culturelle ». Quel en est votre plan, notamment dans les provinces, où les palais de la culture sont délabrés ?
— Je considère que les palais de la culture sont au centre du ministère de la Culture. C’est l’une des priorités. Nous sommes en train de répertorier tous les palais de la culture au niveau national, et nous avons découvert des palais dans un état lamentable! C’est souvent un appartement dont le responsable est un fonctionnaire qui ferme la porte et s’en va. Tout cela va changer.
— Comment ?
— Nous avons consacré un budget pour construire des palais de la culture à coût réduit. Je suis en train de bâtir un grand palais de la culture à Halayeb et Chalatine. Nous allons, avec le premier ministre, l’inaugurer prochainement.
— A l’époque du gouvernement Beblawy, il y existait un comité réunissant 9 ministères et chargé d’établir une stratégie culturelle...
— Cette idée de comité était la mienne.
— Ce comité est-il actif ?
— Non, pas encore. Mais les ministères participants ont augmenté. Quand il y a une crise dans tel ou tel projet culturel, ce comité permet d’appeler à l’aide d’autres ministères, comme celui de la Planification. On arrive à obtenir plus de fonds.
— Par exemple ?
— Cette année, le budget du Gebo, l’Organisme du livre, était très limité : 2 millions de L.E. seulement. Grâce au comité, il a atteint 20 millions avec la possibilité de l’augmenter. C’est le premier fruit de cette collaboration entre les ministères, il reste encore beaucoup à faire. Par exemple, nous nous sommes mis d’accord avec le ministre de l’Enseignement supérieur pour organiser un salon de livre dans toutes les universités d’Egypte, au nom de Iqrä (lisez). Il s’agira d’un grand kiosque qui vendra les livres et les productions du ministère de la Culture à des prix réduits. De même, avec le ministre de l’Enseignement, nous organisons des visites dans les musées. Il s’agit de formules nouvelles dont tout le monde profite.
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