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Pedro Sanchez : Il faut reconstruire les ponts de la coopération euro-méditerranéenne

Alaa Sabet, Rédacteur en chef d’Al-Ahram, Lundi, 06 décembre 2021

Le premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, a récemment effectué sa première visite au Caire. Il s’exprime sur les relations bilatérales et les questions régionales d’intérêt commun.

Pedro Sanchez

Al-Ahram Hebdo: Quels sont les principaux axes de votre visite actuelle au Caire ?

Pedro Sanchez : L’objectif essentiel de cette visite au Caire est de renforcer les relations entre l’Egypte et l’Espagne à tous les niveaux, partant du fait que l’Egypte est un partenaire stratégique de l’Espagne ayant toujours joué un rôle essentiel dans le renforcement des relations arabo-espagnoles. L’Egypte est une pierre angulaire dans le processus de Barcelone et dans le partenariat euro-méditerranéen.

Depuis un certain temps, nous visons le renforcement des liens commerciaux entre l’Egypte et l’Espagne, c’est maintenant une chose importante alors que nous sortons de la crise économique causée par la pandémie de coronavirus, ce qui nécessite la reconstruction des ponts de coopération euroméditerranéenne, prometteuse d’un avenir prospère pour tous les Etats de la région.

— L’Espagne est l’un des plus importants pays ayant participé à la Conférence de Charm Al- Cheikh de 2015. Qu’en est-il des engagements et accords économiques réalisés jusqu’à maintenant ?

Alaa Sabet, Rédacteur en chef d’Al-Ahram
Alaa Sabet, Rédacteur en chef d’Al-Ahram

— La Conférence de Charm Al-Cheikh constitue un point marquant dans la stabilité de l’économie égyptienne et son essor au niveau international. Depuis cette date, un grand progrès a été réalisé et qui est reconnu par la communauté internationale et les institutions monétaires internationales.

La délégation espagnole formée de responsables et d’hommes d’affaires avait signé un mémorandum d’entente dans le domaine des transports, stipulant un don d’un million d’euros pour effectuer l’étude de faisabilité d’une ligne de train ultra-rapide Le Caire- Louqsor-Assouan-Hurghada.

Le nombre de compagnies espagnoles présentes en Egypte a quadruplé depuis cette conférence. Alors que jusqu’en 2015, il n’y avait que 15 compagnies espagnoles oeuvrant en Egypte, il y en a aujourd’hui 60, et le volume du commerce bilatéral est passé de 800 millions d’euros en 2015 à 2,59 milliards d’euros en 2018.

Et puisque nous sommes en train de sortir de la pandémie, nous nous attendons à ce que le volume du commerce entre les deux pays continue à croître. J’ai un grand espoir que cette visite contribuera à donner un nouvel essor aux relations d’investissement et de commerce comme l’a fait le Sommet de Charm Al-Cheikh.

— Et comment augmenter les investissements espagnols en Egypte ?

— Les crises monétaires mondiales pendant la dernière décennie ont causé des dégâts énormes à nos économies. Ceci s’est reflété sur le commerce et les flux monétaires entre les deux pays. Aujourd’hui, je suis confiant que nous sommes face à un avenir meilleur grâce aux réformes économiques et structurelles courageuses que l’Egypte avait effectuées.

En Espagne, nous passons par une phase d’essor et de transformation économique et nos compagnies aspirent à réaliser de nouveaux investissements, c’est pourquoi nous devons saisir l’occasion et oeuvrer ensemble au profit de nos peuples. Nous encourageons donc la formation d’un conseil d’affaires égyptoespagnol commun, ainsi que le renforcement des mécanismes de financement par lesquels le gouvernement encourage les nouveaux projets et investissements.

— A la lumière des résultats du Sommet de Glasgow pour le climat, comment sera la coordination avec le côté égyptien avant la nouvelle COP27 à Charm Al-Cheikh ?

— Le Sommet de Glasgow a abouti à des résultats ambitieux, chose qui s’est reflétée sur sa charte qui doit renforcer l’engagement international vers la lutte contre le changement climatique par le biais de l’Onu.

Nous avons adopté des décisions importantes concernant le financement du climat, comme l’engagement à augmenter le financement international des causes relatives au climat d’un taux de 50 %, pour atteindre 1,35 milliard d’euros par an à partir de 2025. Nous félicitons l’Egypte pour son accueil du prochain sommet du climat. Nous allons oeuvrer ensemble pour garantir la réussite de la COP27 de Charm Al-Cheikh, puisque l’Espagne a une expérience récente dans l’organisation de la COP25 en 2019.

Nous sommes prêts à travailler avec l’Egypte sur cet agenda car la lutte contre le changement climatique est une priorité pour le gouvernement espagnol.

— L’Espagne est le cinquième donateur de vaccins dans le mécanisme international Covax. Comment voyez-vous les opportunités de coopération avec l’Egypte dans la lutte contre la pandémie ?

— Nous considérons que l’accès au niveau mondial aux vaccins est l’unique moyen de dominer la pandémie du Covid-19. C’est pour cela que, depuis le début de la pandémie, nous appelons à la coopération internationale à ce niveau.

L’Espagne a soutenu la fondation de Covax et son initiative ACT-Accelerator par l’intermédiaire d’un don de 50 millions de doses de vaccin, dont 4,5 millions de doses consacrées à l’Egypte.

Or, l’essentiel est aussi d’augmenter la capacité productive des vaccins au niveau mondial. Ceci ne peut se réaliser que par l’échange de la connaissance et en garantissant que le système mondial des droits de propriété intellectuelle aboutisse à des solutions et non pas à des obstacles. C’est pour cela que l’Espagne a adhéré à l’initiative Covid-19 Technology Access Pool C-TAP en mai dernier pour permettre l’accès aux produits sanitaires nécessaires à la lutte contre la pandémie de façon équitable et à des prix raisonnables.

— Quels sont les horizons de coopération touristique entre l’Egypte et l’Espagne pendant la phase à venir ?

— Le secteur du tourisme est un secteur vital autant pour l’Egypte que pour l’Espagne. Les flux touristiques entre les deux pays avaient connu un essor important, avec une croissance de 80 % en 2017. Mais la pandémie a nui au secteur du tourisme partout dans le monde. Le défi réel qui nous attend est la reprise des voyages au niveau international en sécurité.

C’est pour cette raison que j’ai lancé, il y a un an, une initiative pour fixer des directives communes et qui a donné naissance à un plan approuvé en main dernier. Il faut saisir cette occasion pour repenser à l’avenir du secteur vital du tourisme et lui octroyer une infrastructure plus durable. Nous oeuvrons dans ce contexte avec l’Organisation mondiale du tourisme dont le siège est à Madrid.

— Le dossier libyen préoccupe l’Egypte et l’Espagne pour de nombreuses raisons. Que signifie la décision de la réouverture de l’ambassade d’Espagne à Tripoli avant les élections prévues à la fin de cette année ?

— La réouverture de l’ambassade d’Espagne à Tripoli, le 3 juin dernier, est un moyen d’exprimer notre soutien à la réalisation de la stabilité en Libye, en tant qu’Etat ami, voisin et nation prometteuse. Cette décision prouve notre soutien complet de toutes les étapes de stabilisation en Libye. Les Libyens vivent actuellement un moment crucial qui est la préparation des élections présidentielle et législatives.

Le processus électoral ne sera pas facile car les élections à elles seules ne peuvent pas être la solution magique à tous les problèmes dont souffre la Libye. Mais c’est une partie essentielle du processus de stabilité politique.

Toutes les parties actives sur la scène libyenne doivent donc garantir la tenue des élections de façon organisée, respecter leurs résultats, puis commencer à remédier à la crise économique profonde dont souffre le pays.

— Comment voyez-vous le processus de Barcelone et la coopération entre l’Union européenne et les Etats du sud de la Méditerranée afin de réaliser la stabilité régionale ?

— L’Espagne est totalement engagée dans le processus de Barcelone, nous rêvons de voir la région de la Méditerranée un espace de paix, de prospérité, de collaboration et de solidarité. L’Union pour la Méditerranée a réalisé une évolution importante pendant un quart de siècle, qui a été une période suffisante pour renforcer l’engagement politique.

L’Egypte a toujours oeuvré côte à côte avec l’Espagne pour mettre au clair la relation entre l’Europe et le sud de la Méditerranée. Nous aspirons une autre fois à sa direction afin d’octroyer à l’Union pour la Méditerranée une nouvelle dynamique.

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