Al-Ahram Hebdo : 25 ans après la signature des accords d’Oslo, c’est un constat d’échec. Quelles sont les raisons qui ont conduit à son échec ?
Saïd Okacha : Cet accord a été rédigé sous des pressions internationales, et les Etats-Unis étaient intervenus fermement pour résoudre le conflit arabo-israélien. Cependant, celui-ci ne satisfaisait ni l’OLP, ni Israël. Israël n’avait la volonté ni de conclure un accord avec les Palestiniens, ni de présenter des concessions significatives. De plus, six ans après la signature de l’accord, le Hamas et l’Iran ont oeuvré à contrecarrer l’accord et ont commencé des attentats suicides.
— Pensez-vous que la division palestinienne entre le Fatah et le Hamas soit l’une des raisons ayant conduit à l’échec ?
— Certes, la scission palestinienne était l’une des raisons de cet échec. Mais certaines forces régionales y ont également contribué, comme l’Iran qui est intervenu fortement pour saper l’accord en soutenant le Hamas dans les attentats suicides. Je crois que l’unification du pouvoir palestinien aidera à résoudre le problème palestinien.
— Moustapha Barghouti, secrétaire général de l’Initiative nationale palestinienne, qualifiait Oslo de « grand piège » pour les Palestiniens. Qu’en pensez-vous ?
— En fait, cet accord était un piège pour toutes les parties. Nous ne pouvons pas dire que seuls les Palestiniens ont payé le prix. Israël n’a pas obtenu la paix à laquelle il aspirait. Quant aux Palestiniens, ils ont été très frustrés parce qu’ils ont découvert que ni les accords, ni la résistance ne portent leurs fruits. De plus, cet accord a conduit à l’augmentation des colonies, à la division entre les factions palestiniennes, à l’achoppement des négociations et à l’augmentation de la souffrance quotidienne des citoyens palestiniens.
— Quels sont les éventuels scénarios qui peuvent survenir durant la prochaine période ?
— Le premier scénario est le plan du premier ministre israélien, Ehud Olmert, qui vise l’évacuation des colonies isolées de la Cisjordanie et le transfert des colons vers les grands blocs israéliens, afin qu’Israël puisse établir de nouvelles frontières aux Palestiniens, sans pour autant porter atteinte aux exigences sécuritaires d’Israël. Le deuxième scénario est l’établissement de deux Etats, car la situation démographique d’Israël ne lui permettra pas d’assumer le fardeau de 1,5 ou 2 millions de Palestiniens. Je pense que la solution des deux Etats est la meilleure pour toutes les parties. Mais le différend demeurera la démarcation des frontières.
— Et qu’en est-il du marché du siècle ?
— Pour que cet accord réussisse, il est indispensable qu’il prenne en compte les lignes rouges des Israéliens aussi bien que des Palestiniens. C’est-à-dire que la Palestine ne renoncera pas à son statut d’Etat, ni Israël à ses exigences sécuritaires. Cet accord prévoit la création d’un Etat palestinien à la périphérie de Jérusalem et l’abolition du droit de retour par le biais du versement d’indemnisations aux réfugiés au lieu de leur permettre le retour à leurs terres. La réalisation de cet accord peut tout à fait résoudre définitivement ce conflit qui traîne depuis la Déclaration Balfour. Et ce, contrairement à Oslo, qui n’a pas pris en compte les dossiers des réfugiés, de Jérusalem et des frontières. Cette fois, l’Administration américaine propose une solution radicale plutôt qu’une approche progressive. Mais en fait, l’accord du siècle est inacceptable aussi bien pour les Palestiniens que pour le Likoud.
— Comment voyez-vous les décisions de Trump après sa décision de fermer le bureau de représentation de l’OLP à Washington et de l’UNRWA ?
— Les dernières pratiques de Trump visent à exercer de fortes pressions sur les Palestiniens pour qu’ils acceptent le marché du siècle. S’il ne parvient pas à atteindre son objectif par ce moyen, les Palestiniens n’auront pas d’autres alternatives et la situation restera telle qu’elle.
— D’aucuns confirment que pour sortir de l’impasse d’Oslo, il faut déclarer officiellement l’annulation de l’accord et revenir à la case départ. Qu’en pensez-vous ?
— Personne ne peut annoncer l’annulation de l’accord d’Oslo bien qu’il ait complètement échoué. Son annulation coûterait cher tant aux Palestiniens qu’aux Israéliens. Par conséquent, aucune partie ne risquerait de prendre de telle décision.
— Est-il possible de parler d’une alternative qui pourrait remplacer le rôle américain dans la cause palestinienne ?
— Le rôle des Etats-Unis est indispensable, aucune puissance internationale n’est capable de le remplacer. L’Union européenne ne peut pas le faire. Quant à la Russie, elle est trop occupée par ses problèmes. De plus, la Chine n’a aucun désir d’intervenir dans la cause palestinienne. Pour cette raison, la tournée internationale du président palestinien et ses visites à Moscou n’ont abouti à rien.
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