Al-Ahram Hebdo : 15 à 20 % du capital d’Orange devraient entrer en Bourse, quand ?
Yves Gauthier : Nous sommes toujours en train d’étudier cette question car le financement d’Orange Egypt va énormément dépendre du prix de la licence 4G. Nous pensons également procéder à une augmentation du capital pour pouvoir financer entres autres les futures activités liées à cette licence. Il est donc important pour nous de connaître les prix de cette licence et les modalités de paiement. C’est un paramètre-clé pour pouvoir décider d’une augmentation de capital cohérente et juste.
— Etes-vous partenaire du processus de tarification de la licence 4G ?
— Non. On nous a en effet demandé d’y participer, seulement, ce n’est pas aux opérateurs mobiles de fixer les prix. Nous sommes un peu comme un client et ce n’est pas au client de dire au vendeur quel doit être son prix. Par contre, il est vrai que nous ne pouvons pas investir dans une licence surévaluée car cela pénaliserait les fonds dédiés aux divers investissements de la compagnie. Nous devons donc engager une discussion avec le gouvernement pour s’accorder sur un prix raisonnable et présenter, par la même, nos engagements d’investissements dans le pays.
— Il paraît que Telecom Egypt va également acquérir une licence 4G bien qu’il ne soit pas un opérateur mobile, qu’en pensez-vous ?
— A ce propos, plusieurs points doivent être pris en considération. Telecom Egypt détient un monopole sur l’infrastructure qu’il vend à des prix très élevés. Il peut utiliser les profits générés par la location de liaisons aux opérateurs mobiles pour subventionner les prix sur les mobiles de leurs clients. En fait, cela revient à les payer pour nous concurrencer. Par conséquent, si Telecom Egypt s’engage comme opérateur mobile il nous faudra avoir une maîtrise de l’infrastructure. C’est-à-dire, posséder nous-mêmes nos infrastructures.
De plus, dans le contexte économique actuel il me paraît difficile qu’un nouvel opérateur voie le jour sans faire perdre de la valeur au marché. Cela peut également avoir pour conséquences de faire baisser les taxes reversées au gouvernement. La création d’un nouvel opérateur mobile égyptien est une décision stratégique qui sera prise par le gouvernement. Il est vrai que les 3 opérateurs mobiles sur le marché égyptien sont étrangers, mais si on veut attirer des investisseurs étrangers, il faut essayer de ne pas décourager ceux qui sont déjà en place.
— Y a-t-il actuellement des négociations entre Orange Egypt et Telecom Egypt ?
— Le contrat d’interconnexion avec Telecom Egypt prévoit un arbitrage national. Un expert a été nommé et est en train d’examiner les éléments. En parallèle, nous avons engagé une discussion avec Telecom Egypt pour essayer de parvenir nous-mêmes à un compromis et j’espère que nous y parviendrons.
— Comment le passage à la fibre optique opérée par Telecom Egypt a-t-il affecté le service de données que vous procurez à vos clients ?
— Quand Telecom Egypt est passée des câbles de cuivre à la fibre optique, des clients ont été déconnectés et ont obligatoirement migré chez TE Data. On a ainsi perdu 70 000 clients au total, soit une perte de 14 millions de L.E. par mois.
— Y a-t-il eu à ce propos des négociations avec les autres opérateurs mobiles pour aboutir à un compromis ?
— Chacun a émis des remarques, mais on n’a pas eu de réunion. Le régulateur est intervenu et la situation a évolué, mais ce n’est pas encore parfait.
— Comment la crise du dollar a-t-elle affecté l’importation des équipements de télécommunications ?
— Il est vrai que nous avons subi l’impact de la pénurie du dollar. Beaucoup de nos fournisseurs ont accepté d’être payés en livres égyptiennes comme Huawei, Nokia ou encore Alcatel parce qu’ils ont des employés égyptiens. Mais nous avons tout de même eu des retards de paiement. J’espère que cette situation sera temporaire et qu’elle évoluera dans le bon sens.
— Cette crise du dollar a-t-elle également eu un impact sur les prix des télécommunications ?
— Pour nous, beaucoup de choses ont beaucoup augmenté : l’énergie, les salaires, les loyers les sites d’installations, mais nous n’avons pas augmenté nos tarifs. A noter également que la plupart des investissements sont en dollar. Si la situation continue nous serons confrontés à un problème de rentabilité.
— Quels sont les chiffres relatifs au retour de l’investissement actuellement dans le secteur des télécommunications et ceux d’Orange Egypt ?
— L’année dernière, la croissance était autour de 4,5 % sur tout le secteur, alors que depuis 3 ans, ce chiffre est d’à peu près 5 %. Mais l’inflation est à 10 %, c’est-à-dire que nos revenus croissent beaucoup moins vite que nos coûts, et à terme, nous pouvons avoir un problème.
— Est-ce que Orange Egypt transfère ses profits annuels en France ?
— Pour l’instant, nous n’avons pas de profit annuel, alors nous n’avons pas transmis de dividendes depuis 4 ans. En effet, les actionnaires ont deux possibilités pour avoir un retour sur leurs investissements : augmenter la valeur de la compagnie ou distribuer des dividendes. Aujourd’hui, la situation d’Orange Egypt fait que nous ne distribuons pas de dividendes. Nous préférons investir et réduire la dette afin d’accroître la valeur de la compagnie. La distribution des dividendes n’est pas la meilleure solution à court terme, mais il est évident qu’à moyen terme, il faudra le faire, afin que les investisseurs continuent d’acheter des actions.
— Avec quelle nouvelle stratégie Orange s’est-elle engagée sur le marché égyptien ?
— Notre positionnement est clair. Il est de faire profiter le marché de tout ce que Orange peut apporter en termes d’innovation, d’expertise, de renommée et de standards internationaux. Nous avons fait beaucoup d’efforts dans l’amélioration des réseaux. Nous avons présenté de nouvelles offres et nous aspirons à faire évoluer le marché vers plus de diversité du point de vue des services et des applications.
— Comment ceci va-t-il se refléter sur les produits de télécommunications ?
— Orange a beaucoup d’applications qui touchent aux domaines de la santé et de la sécurité. Ces offres sont novatrices et répondent aux nouveaux besoins des clients.
— Quels sont les nouveaux services d’Orange ?
— Il y a le service Orange Money auquel je crois beaucoup parce que c’est un service qui peut faciliter la vie des Egyptiens qui n’ont pas accès à des comptes bancaires. Orange Egypt a inauguré son premier Smart Shop au Caire, et il est prévu que 5 autres soient installés dans 2 ou 3 mois. Orange se concentre surtout sur ce que veulent ses clients. Ils veulent de la voix, des données, des SMS. Ils veulent une bonne qualité de services et de bons prix. Et surtout qu’on règle rapidement les problèmes quand il y en a.
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