
Waël Gomaa, ancien capitaine et actuel directeur de la section foot d’Ahli.
Al-Ahram Hebdo : L’équipe de foot d’Ahli a connu cette saison deux visages diamétralement opposés, le premier timoré, le second bien plus hardi. Comment l’expliquez-vous ?
Waël Gomaa : Tout le monde sait que notre équipe a dû faire face à beaucoup de problèmes au cours des matchs allers de championnat. Cela nous a conduits à lâcher du lest à nos principaux concurrents et les points perdus nous ont coûté le titre que nous avions systématiquement remporté depuis la saison 2003-2004. Cette année, l’équipe traverse une période transitoire, notamment après le départ à la retraite de plusieurs de ses icônes, en l’occurrence Mohamad Abou-Treika, Mohamad Barakat, Sayed Moawad et moi-même. Nous avons à notre actif une vingtaine de titres. En outre, Ahmad Fathi est parti au Qatar pour rejoindre le club Umm Salal SC. Il faut également noter que lors du mercato de l’été dernier, le club n’a pas pu attirer de grandes stars capables de réaliser les exploits escomptés. Il ne faut pas non plus oublier les nombreuses absences dues à des blessures comme Emad Meteab et Mohamad Nagui « Gedo ». Le jeune attaquant prometteur de notre équipe, Amr Gamal, a été victime d’une rupture des ligaments croisés et n’a retrouvé la compétition que depuis deux semaines après une longue période d’absence. Les blessures et les suspensions, comme celle de Walid Soliman, ont constitué un véritable handicap pour le staff technique. Il est donc normal que les résultats en pâtissent surtout que l’effectif ne renfermait pas de doublures de la même valeur. Il en a découlé des insuffisances en termes de compétitivité pour certains compartiments de jeu. L’axe central de la défense n’était pas solide et a commis trop de fautes qui ont été payées cash. Parallèlement, le secteur offensif s’est montré trop peu performant pour que l’on espère davantage. Ahli a réalisé quelques recrutements tels que ceux, entre autres, de l’Ethiopien Saladin Saïd, du Nigérian Peter Ebimobowei et de Moemen Zakariya, qui est arrivé en janvier dernier pour manquer plusieurs semaines en raison de blessures. Quand il est revenu à son meilleur niveau, il a été déterminant comme dernièrement lors du grand derby contre Zamalek lorsqu’il a inscrit un doublé. Mais cela n’a pas suffi, car les dés du championnat étaient déjà jetés. Il n’empêche que l’équipe s’est reprise en fin de saison en affichant un meilleur visage qui lui a permis de se réhabiliter de ses mauvaises performances en Ligue des champions à travers la Coupe de la CAF, où l’équipe caracole en tête de son groupe avec deux victoires et un nul. Il s’agit maintenant de persévérer.
— Y a-t-il d’autres facteurs ayant handicapé Ahli cette saison ?
— Oui, à ces contretemps, j’ajouterai les mauvaises performances de quelques arbitres qui ont lésé Ahli. Plusieurs décisions injustes ont impacté nos performances. Cela n’était jamais arrivé auparavant qu’Ahli soit autant lésé.
— Les médias et plusieurs observateurs avisés estiment que l’intronisation du technicien espagnol Juan Carlos Garrido à la tête du staff technique ahlawi est la principale cause des résultats en dents de scie de l’équipe. Qu’en pensez-vous ?
— C’est vrai que dans ce genre de contextes où les résultats ne suivent pas toujours, le directeur technique de l’équipe assume une grande responsabilité, mais il n’est pas le seul. Cependant, il faut savoir qu’il a été chargé de reconstruire l’équipe d’Ahli, notamment après la retraite de plusieurs stars. Il a bien entamé l’aventure avec une Super Coupe d’Egypte remportée face à Zamalek, puis la Coupe de la confédération africaine fin 2014. Par la suite, les choses ont changé et l’équipe a perdu trop de points en concédant 7 nuls et 4 défaites en 24 matchs. Du coup, Ahli s’est retrouvé relégué à la troisième place, à 11 points de Zamalek. L’ambiance s’est davantage envenimée lorsque Garrido a fait quelques déclarations aux médias pour critiquer les responsables du football en Egypte, en général, et la direction d’Ahli, en particulier. Il a critiqué la décision du huis clos, l’état des terrains de jeu, etc. Des choses auxquelles la direction d’Ahli n’était pas habituée.
— C’est donc ce qui explique son remplacement par Fathi Mabrouk …
— L’arrivée de Fathi Mabrouk à la tête de la direction technique a tout remis en ordre. La sérénité est revenue et le rendement de l’équipe s’est nettement amélioré. Ce changement de staff en cours de route n’a pas perturbé l’évolution de l’équipe et n’a pas affecté sa stabilité. Ahli a des valeurs identitaires, un mode de fonctionnement et une organisation que de tels changements ne peuvent affecter en aucune façon. Pour cette raison, avec l’avènement de Mabrouk l’équipe a renoué avec les bons résultats. Certes, nous n’avons pas gagné le championnat, mais nous avons joué de grands matchs comme le dernier contre Zamalek que nous avons gagné 2-0. Dans ce match, le plus important n’était pas la victoire, car ce n’est pas la première fois que nous battons Zamalek, mais c’était surtout le fait de nous être réconciliés avec notre public. Nous avons transmis un message à nos supporters pour leur dire que même si nous n’avons pas pu remporter le championnat en raison de notre parcours chaotique de l’aller, nous demeurons toujours une grande équipe. La victoire contre Zamalek était très importante notamment après les problèmes qui ont eu lieu dernièrement entre la direction de ce club et Ahli, et plus précisément entre la direction d’Ahli et le président de Zamalek.
— Le premier ministre a demandé au ministre de la Jeunesse et du Sport de prendre l’initiative d’organiser une réunion entre les deux directions des deux clubs, afin de lever le malentendu et d’éviter d’éventuels problèmes entre les supporters des deux clubs. Qu’en pensez-vous ?
— Je ne pense pas que la direction d’Ahli accepte de participer à une telle réunion, surtout en présence du président de Zamalek qui est la principale cause du problème en raison de ses déclarations et de ses critiques acerbes. Mortada Mansour s’occupe davantage d’Ahli et de son président, Mahmoud Taher, que de son propre club, et il le fait à travers les médias. Si le ministre veut résoudre le problème, il serait préférable qu’il demande tout simplement à Mortada Mansour de faire preuve de davantage de retenue et d’éviter toutes formes de déclarations prêtant à polémiques.
— Revenant plutôt à l’aspect technique de notre entretien. Il paraîtrait qu’Ahli cherche en ce moment un remplaçant à Fathi Mabrouk et que des négociations avec certains coaches sont en cours ...
— A ma connaissance, la direction du club a décidé de garder le staff technique actuel sous la direction de Fathi Mabrouk. Les responsables sont favorables à la stabilité pour permettre à l’équipe d’aller le plus loin dans la Coupe de la CAF. Nous sommes les détenteurs du titre et il ne sera pas facile de conserver notre bien si l’on n’est pas au top car cette édition regroupe d’autres grands clubs africains. Comme je vous l’ai déjà dit, nous sommes concentrés et nous voulons remporter beaucoup de titres pour satisfaire nos supporters après avoir perdu le titre de champion d’Egypte.
— Pensez-vous que le huis clos et l’absence de supporters dans les stades aient eu un impact négatif sur les performances d’Ahli ?
— Absolument. Et Ahli n’est pas le seul dans ce cas. La présence du public agit directement sur la performance aussi bien des joueurs que des staffs techniques. Tout le monde donne le meilleur de lui-même pour être à la hauteur de la confiance des fans. Nous sommes tellement redevables à nos supporters qui étaient toujours derrière nous, même après les défaites et les contre-performances. Je souhaite de tout mon coeur que le huis clos soit levé et que les supporters reviennent aux stades pour que nous revivions l’ambiance d’antan.
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