« I am the mighty sun that the man has ever known. I am Africa sun (je suis le soleil le plus fort que l’homme ait connu. Je suis le soleil de l’Afrique) », tonne une voix grave qui ajoute plus de prestance à la scène classique d’une forêt africaine où un groupe de guépards tourne son dos à un grand disque solaire orange qui commence à s’élever. Cette publicité d’une société énergétique qui circule sur la toile semble annoncer l’avènement d’une nouvelle ère en Afrique. Il s’agit du transfert vers les sources d’énergie verte avec en tête de liste l’énergie solaire. La disponibilité de l’énergie solaire en Afrique est gigantesque. Et ceci revient au fait que le continent bénéfice de 325 jours de fort ensoleillement. De même, les pays africains disposent de larges étendues de désert qui rendent facile la production de l’énergie solaire. Selon l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), 60 % des surfaces favorables à la fourniture d’énergie solaire se trouvent en Afrique. Les réserves totales d’énergie solaire disponibles sur le continent ont été estimées à près de 60 millions de TWh/an contre 37,5 millions de TWh/an pour l’Asie et 3 millions de TWh/an seulement pour l’Europe.
En dépit de cette grande disponibilité, l’Afrique ne produit que 1 % de l’énergie solaire mondiale. Et ce, au moment où plus des deux tiers de la population de l’Afrique vivent sans électricité. Mais pourquoi ce retard ? « La faiblesse des investissements est la raison principale qui limite le déploiement de l’énergie solaire en Afrique », explique Mohamed Salah El Sobki, ex-directeur de l’Agence égyptienne de l’énergie renouvelable, en soulignant que « la production photovoltaïque exige des investissements massifs ». Selon un rapport publié en décembre 2022 par BloombergNEF (BNEF), « les investissements dans les énergies renouvelables en Afrique se trouvent à un niveau alarmant. Les investissements pour les renouvelables dans le monde ont grimpé de 9 % sur un an pour atteindre leur plus haut niveau historique l’an dernier. Pendant ce temps, ils ont chuté de 35 % en Afrique, qui ne représente que 0,6 % des 434 milliards de dollars investis dans les renouvelables à travers la planète ». Le rapport souligne que « l’absence de connaissance des opportunités dans ce secteur de la part des investisseurs nationaux figure parmi ces obstacles qui freinent l’expansion de l’énergie solaire sur le continent ».
Outre le manque d’investissements, demeure le défi de développer l’infrastructure nécessaire pour faciliter l’octroi de cette énergie, explique El Sobki qui souligne que le manque d’un digne réseau électrique empêche le stockage de l’énergie et par la suite en profiter. « Surmonter ce défi exige une complémentarité économique entre les pays africains. A l’instar du projet qui relie la ville d’Alexandrie à celle de Cape Town en Afrique de Sud qui permettra à tous les pays africains de profiter mutuellement de cette source d’énergie afin d’alimenter leurs projets de développement durable », explique-t-il.
Une nouvelle donne
Selon El Sobki, le défi économique dans les années 1990 a entravé l’octroi des technologies nécessaires à la production de l’énergie solaire en Afrique. « Inventées en Europe, leurs exportations vers l’Afrique auraient coûté tellement cher pour les budgets des pays africains déjà fragilisés par les crises successives d’inflation qui ont frappé l’économie mondiale », ajoute-t-il. En effet, ce statu quo a perduré la situation énergétique en Afrique jusqu’en 2010. Date où la situation a changé de fond en comble. C’est à partir de cette année que la question du réchauffement climatique et ses conséquences néfastes a commencé à préoccuper les esprits. Et la course contre la montre pour trouver d’autres sources d’énergie amies de l’environnement pour remplacer les sources d’énergie traditionnelles a commencé.
C’est ainsi que l’énergie solaire a fait surface comme la source la plus appropriée à exploiter en Afrique. De nombreux projets commencent à voir ainsi le jour aux quatre coins de l’Afrique. C’est en Afrique du Nord que fut construit le plus grand parc solaire au monde. Situé à 20 km de la capitale marocaine, le complexe Noor Ouarzazate, inauguré en 2016 en plein désert, compte des milliers de panneaux photovoltaïques qui s’étendent sur une superficie de 480 hectares, soit l’équivalent de 600 terrains de football. A partir de 2017, le Sénégal a inauguré consécutivement les deux plus grandes installations solaires de l’Afrique de l’Ouest à Bokhol et à Malicounda, d’une capacité de production de 20 MW chacune. L’Ouganda a aussi rejoint la liste des pays dotés d’énergie solaire et a mis en service la centrale solaire Soroti, la plus large d’Afrique de l’Est avec une capacité de 10 MW. Mais c’est l’Afrique du Sud qui occupe le premier rang en matière de fourniture d’électricité à partir de l’énergie solaire pour satisfaire les besoins quotidiens à la fois dans les villages reclus et ceux du secteur industriel.
Aujourd’hui, les pays africains tentent progressivement de renforcer leurs capacités de production. C’est ce qu’a souligné l’Association africaine de l’industrie de l’énergie solaire (AFSIA), qui a souligné en janvier 2023 que « la capacité installée d’énergie solaire en Afrique a atteint 949 mégawatts en 2022. Cette quantité représente une croissance de 14 % par rapport à la même quantité produite en 2021, qui était de 833 MW, augmentant ainsi la production de l’énergie solaire du continent à 12,4 gigawatts ». « En 2022, 30 pays africains ont construit des installations solaires d’une capacité supérieure ou égale à 1 MW. Sur ces 30 pays, 16 ont installé plus de 10 MW et 2 ont installé plus de 100 MW », conclut le rapport.
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