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Nabil Maaloul: « Cette finale est une chance à ne pas gâcher »

Propos recueillis par Amr Moheb, Mardi, 30 octobre 2012

A quelques jours de la finale de la Ligue africaine des champions, l’entraîneur de l’Espérance de Tunis, Nabil Maaloul, livre ses impressions sur la double confrontation qui opposera son équipe à Ahli.

Football

Al-ahram hebdo : La finale de la Ligue des champions sera un duel nord-africain. Que pensez-vous de ces retrouvailles avec Ahli ?

Nabil Maaloul : Sincèrement, je ne pensais pas retrouver Ahli à ce niveau de l’épreuve. C’est tout simplement un exploit.

— L’arrivée d’Ahli en finale est une surprise pour vous ?

— Je m’explique. Le fait qu’Ahli soit parvenu à ce stade de l’épreuve après toutes les péripéties qu’a traversées le club est une preuve qu’il a su relever un défi qui n’est pas à la portée de n’importe quelle équipe. Les douloureux événements de Port-Saïd et l’arrêt du Championnat ont été des éléments défavorables à un progrès vers l’avant. Et une rencontre officielle vaut bien mieux que plusieurs matchs amicaux. Ahli est parvenu en finale en dépit d’un contexte extrêmement difficile.

— Convenez-vous donc que la tâche de l’entraîneur d’Ahli, Hossam Al-Badri, n’a pas été de tout repos ?

— Bien entendu. Que Dieu vienne en aide à Hossam. Ce n’est guère évident et je sais de quoi je parle. Sur les 4 demi-finalistes, Ahli est l’équipe qui a le plus souffert.

— Pensez-vous qu’Al-Badri ait autant d’envergure que Manuel José Da Silva ?

— Je vais être franc avec vous. Arrêtons d’avoir des complexes d’infériorité. Manuel José est un homme d’expérience qui a bénéficié d’un concours de circonstances favorables et d’une génération en or. Il a remporté des titres avec Ahli et personne n’aura rien à y redire. Par contre, Hossam Al-Badri n’a pas encore bénéficié des mêmes conditions de travail. Il faut lui laisser un minimum de temps. Et puis, sachez que l’Egypte regorge d’entraîneurs de qualité à l’instar de Hassan Chéhata, de Tareq Al-Achri et j’en passe. Il faut également savoir qu’un entraîneur local comprend mieux la mentalité des joueurs de son pays. Il a l’avantage de pouvoir immédiatement entrer dans le vif du sujet et d’être productif. Un entraîneur étranger doit d’abord commencer par trouver ses repères dans son nouveau contexte. C’est à lui d’abord de s’adapter, de comprendre … Et ce n’est qu’après un certain temps qu’il pourra éventuellement apporter quelque chose à l’équipe.

Qui est votre grand favori pour cette finale ?

— Généralement, lorsqu’une équipe parvient en finale, elle devient très motivée pour ne pas rater ce rendez-vous avec l’Histoire. C’est pourquoi j’aurais aimé affronter Ahli en phase de poule, voire en demi-finales. Les choses auraient été probablement plus simples pour nous. En finale, les choses vont changer. Ce sera une finale à chances égales. Du 50-50 %. L’équipe qui saura profiter des faiblesses de son adversaire sera championne.

— Comment voyez-vous le déroulement de cette finale ?

— Ce qui est certain, c’est que l’on assistera à une finale où l’aspect tactique sera prépondérant. Ce sera en quelque sorte une partie d’échecs. Et puis, ce sommet arabe et africain entre l’Espérance et Ahli aura un goût particulier à mon avis.

— Comment comptez-vous aborder cette double confrontation ?

— Nous allons œuvrer pour réaliser un bon résultat dès le match aller au Caire pour jouer avec sérénité à Tunis. Notre tâche sera alors plus facile. Nous voulons faire en sorte que le fait de jouer à Tunis le match retour soit un avantage.

— Que pensez-vous de votre adversaire ?

— Nous devons prendre nos précautions, car Ahli possède dans ses rangs des joueurs d’expérience qui ont du poids sur l’évolution de l’ensemble. Ahli sait voyager et nous l’a démontré en marquant 3 buts au Nigeria contre les Sunshine Stars.

— Quid de l’Espérance ?

— Depuis la création du club en 1919, nous avons l’une des plus fortes équipes que le club n’ait jamais possédé. Il y a eu des générations qui ont marqué la marche de l’Espérance, mais aucune n’a joué 3 finales de Coupe d’Afrique successivement.

— La présence du public reste une grande question. En Egypte, c’est le huis clos total. En Tunisie, il y a eu plus de 25 000 personnes dans les gradins pour les demi-finales contre Mazembe, mais encore une fois, ces lieux sont témoins de scènes de violence …

— Le public constitue un atout significatif aussi bien pourAhli que pour l’Espérance. Les fans des deux équipes savent booster les joueurs et les amener à donner le meilleur d’eux-mêmes. Reste qu’après les révolutions en Tunisie et en Egypte, les choses ont changé. Les débordements auxquels on assiste sur les gradins constituent désormais un handicap, puisqu’ils font perdre leur concentration aux joueurs. Dans ces conditions, j’estime qu’il est préférable de jouer sans la présence du public. Si j’avais le pouvoir, je suivrais l’exemple du Liban en sanctionnant par 5 ans de huis clos les clubs dont les supporters agiront en marge de la légalité. Ainsi, ils seront conscients du mal qu’ils ont causé à leur club. Et puis, seules les décisions radicales sont capables de résoudre ce problème. Ce qui s’est passé dans certains stades n’a rien à voir avec le sport et est inacceptable.

— Mais il n’en demeure pas moins qu’un match de foot sans public est comme un plat sans épices …

— Je n’en disconviens pas et c’est là où réside tout le paradoxe. Et puis, ce qui est plus grave, c’est le manque à gagner qui frappe les finances des clubs. Un club sans entrée d’argent ne peut que vivoter et se dirigera inéluctablement vers la faillite. De toute façon, il faut arrêter d’être laxiste. Les stades ne sont pas des aires de non-droit. Il ne faut plus transiger avec les fautifs.

— Hormis le huis clos, que préconisez-vous comme solutions ?

— Je pense que la sensibilisation du public doit se faire de manière régulière. C’est une œuvre de longue haleine. Le public doit parvenir à comprendre que le football, le sport en général, est un moyen pour rapprocher les gens. Dans le monde arabe, les peuples se respectent et s’apprécient, et les rencontres sportives viennent parfois gâcher tout cela. En réalité, c’est une minorité d’imbéciles qui impose sa loi à une majorité silencieuse. Dans ce contexte, les médias ont un rôle d’une incommensurable importance pour changer cette situation dans le bon sens. Les médias doivent faire preuve de davantage de professionnalisme. Il est inadmissible de les voir parfois rajouter de l’huile sur le feu.

— Un mot pour la fin ?

— Une finale de Ligue des champions d’Afrique entre deux pays arabes qui, de surcroît, viennent de réussir leur révolution démocratique est un événement historique. C’est en quelque sorte une fête et il ne faut pas la gâcher. Entre Ahli et l’Espérance, il ne pourra y avoir qu’un seul vainqueur. C’est la loi du sport. Acceptons-la, sportivement, et tout se déroulera impeccablement. Et que le meilleur gagne !

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