Jour J. L’attente est terminée et des milliards de supporters retiendront leur souffle face au suspense du quadriennal événement planétaire : la Coupe du monde débute ce 20 novembre à Doha, au Qatar. Un choix qui a suscité une énorme polémique depuis son annonce en 2010 concernant la capacité de ce petit pays d’organiser l’événement le plus grandiose du monde du football.
Un petit pays d’une superficie de 11 500 km2 et de 2,9 millions d’habitants, le Qatar, qui n’a jamais disputé le Mondial, a amené cette 22e édition pour la première fois de l’histoire au Moyen-Orient. Ce qui semblait un risque alors semble maintenant un pari gagné.
« J’ai participé à l’organisation de nombreux événements sportifs au cours des dernières décennies et je n’ai jamais rien vu de comparable à ce qui se passe ici. Tout est prêt et les stades seront fabuleux. Les supporters vont passer un grand moment au Qatar. Le monde entier va découvrir un pays et une région. Le Qatar, le Golfe arabo-persique, le Moyen-Orient, le monde arabe. Un lieu de rassemblement et d’échange pour des gens de toutes les origines. C’est à cela qu’aspirent le football, cette région et ses habitants. Tous les visiteurs pourront le constater », a dit Gianni Infantino, président de la Fédération Internationale de Football (FIFA).
Milliards dépensés et stades climatisés
Le Qatar s’est entièrement mobilisé pour être en mesure de répondre aux défis posés et présenter une version unique. Ce n’était pas à un coût bas car le riche pays du Golfe a versé 220 milliards de dollars lors de la dernière décennie pour organiser cette fête planétaire, selon les rapports gouvernementaux et le géant financier Deloitte, l’un des quatre grands cabinets d’audit et de conseil mondiaux. Une somme colossale en comparaison au record de 15 milliards de dollars dépensés au Brésil en 2014 ou les 11,6 milliards de dollars en Russie lors de la dernière édition en 2018.
Selon Nasser Al-Khater, président du comité d’organisation de la Coupe du monde, les dépenses directes liées aux projets de la Coupe du monde atteignent à elles seules 8 milliards de dollars, dont 6,5 milliards pour la construction de sept des huit stades qui abriteront les matchs. Le reste, selon Al-Khater, concerne des projets de développement à longues durées dans l’infrastructure du pays telle la construction de nouveaux aéroports, ports, hôpitaux, télécommunications et moyens de transport.
Pour répondre au défi climatique, le calendrier a été déplacé à l’automne pour éviter la chaleur brûlante de l’été où la température dépasse les 50 degrés Celsius au Qatar. Les stades et zones fans seront climatisés pour la première fois de l’histoire de la compétition.
Un gros événement, un petit pays
Ce Mondial sera le plus compact de l’histoire vu qu’il se déroule dans le plus petit pays à jamais avoir organisé ce prestigieux événement. Les 64 matchs se joueront dans 8 stades tous situés dans un rayon de 50 km2 de la capitale Doha. C’est au profit des équipes participantes qui ne souffriront pas de la fatigue en raison des longs déplacements et des horaires perdus, mais cela sera aux dépens des touristes qui n’auront pas beaucoup à voir. Mais d’un autre côté, les fans auront la chance d’assister à trois matchs par jour, pour la première fois de l’histoire, vu les courtes distances.
Le stade de Lusail accueillera le match d’ouverture et la finale de la Coupe du monde. (Photo : AP)
« C’est un défi que d’organiser quatre matchs par jour dans une ville comme Doha, bien sûr qu’on s’attend à beaucoup de trafic, mais on a pris certaines mesures pour contenir cela », a dit Abdelaziz Al-Mawlawi, membre du comité d’organisation à la chaîne Al-Jazeera. Les écoles seront fermées lors du mois du Mondial et les horaires de travail ont été réduits.
Aussi, pour pouvoir accueillir les 1,3 million de visiteurs attendus, le Qatar s’est procuré trois paquebots pour servir d’hôtels flottants durant le Mondial pour ajouter plus de 5 000 cabines à sa capacité hôtelière de 31 000 chambres.
Il y a aussi la donnée sportive : la Fifa a adopté 5 changements par match, contre 3 en Russie en 2018, et élargi les effectifs à 26 joueurs au lieu de 23. Une nouvelle innovation technologique sera utilisée au Qatar qui est le hors-jeu semi-automatique pour faciliter la tâche des arbitres et arbitres vidéo et les aider à prendre des décisions plus rapides, selon la Fifa.
De nombreuses polémiques
Cette Coupe du monde du Qatar a fait couler beaucoup d’encre lors des 12 dernières années et pas pour des raisons sportives. Les droits de l’homme et des LGBT et les conditions des travailleurs ont fait les grandes affiches, outre certains soupçons de corruption concernant l’acquisition de l’organisation elle-même. « Ces critiques ne sont-elles pas exagérées ?! Depuis l’annonce que nous serions le pays hôte, nous sommes sujets à des critiques récurrentes. Je veux rassurer tous les fans quels que soient leur genre, leur religion ou leur origine que le Qatar est l’un des pays les plus sûrs du monde et qu’ils sont les bienvenus ici. Tout ce qu’on demande c’est que les gens respectent notre culture », a dit Al-Khater dans un entretien avec la chaîne anglaise Skysports.
Sous pression, la péninsule du Golfe a fait un certain nombre de compromis. Elle a permis l’alcool pour les étrangers dans les hôtels, zones de fans et certains lieux des stades. En cas d’ivresse excessive, les personnes seront conduites à certains lieux jusqu’à ce qu’elles reprennent conscience afin qu’elles ne créent pas de danger pour elles-mêmes ou les autres.
Concernant les droits des ouvriers, le Qatar a réformé son code de travail et consacré une partie des bénéficies pour la compensation des travailleurs. Pourtant, les appels au boycott du tournoi et les demandes de faire des déclarations politiques se sont multipliés. En réponse, dans un communiqué envoyé aux 32 équipes à quelques jours de la compétition, la Fifa a demandé aux participants de se concentrer sur le football. « S’il vous plaît, concentrons-nous maintenant sur le football ! Nous savons que le football ne vit pas dans le vide et nous sommes également conscients qu’il existe de nombreux défis et difficultés de nature politique partout dans le monde. Mais s’il vous plaît, ne laissez pas le football être entraîné dans toutes les batailles idéologiques ou politiques qui existent », a dit la lettre signée par Infantino et Fatma Samoura, secrétaire générale de l’instance internationale.
Toute cette incertitude est maintenant dépassée avec le coup d’envoi ce dimanche 20 novembre.
Des classiques et des moins classiques parmi les favoris
Et pour revenir au foot, qui succédera à la France en tant que championne du monde 2022 ? Il n’y a pas d’équipes au-dessus du lot, mais le Brésil part comme grand favori pour décrocher un sixième titre record de Coupe du monde pour mettre fin à sa longue traversée du désert depuis 2002. La Selecao possède un effectif bien étoffé avec d’immenses talents, tels que Neymar (PSG), Vinicius Junior (Real Madrid), Antony (Manchester United), les milieux Fabinho (Liverpool) et Casemiro (Manchester United), les défenseurs Thiago Silva (Chelsea) et Marquinhos (PSG), et l’excellent et talentueux gardien de Liverpool Alisson Becker. « Nous avons beaucoup progressé depuis notre dernière Coupe du monde (ndlr : le Brésil a été éliminé en quarts de finale en Russie 2018). Nous avons évolué individuellement et collectivement. Une nouvelle génération avec d’excellents talents est en montée maintenant dans la sélection et je pense que nous avons un excellent mélange de jeunes et joueurs expérimentés », a dit Becker au site de la Fifa. L’Argentine de Lionel Messi semble aussi dans l’une de ses meilleures formes lors des dernières décennies. La France, malgré les absences, conserve ses chances et les Allemands ne sont jamais à négliger.
Peut-on s’attendre à une surprise ? Probablement pas, mais le Sénégal de Sadio Mané (voir page 26) semble un outsider et peut franchir le palier des quarts de finale qui a jusqu’à présent constitué un plafond à l’Afrique. Le Portugal, emmené par Cristiano Ronaldo, rêve toujours du titre, la Belgique avec sa génération dorée vieillissante espère créer l’exploit, tandis que l’Angleterre, pleine de talents mais en manque de confiance, cherche toujours à ramener la coupe à la maison depuis 1966.
Témoignera-t-on de la naissance de nouvelles vedettes pour prendre la relève de Messi et Ronaldo ? Kylian Mbappé, Vinicius Junior et Kevin De Bruyne sont les stars du moment mais l’Allemand Jamal Musiala, l’Espagnol Pedri et l’Anglais Jude Bellingham semblent être les vedettes du futur qu’on attend voir s’épanouir au Qatar.
Autant de questions dont on aura la réponse dans les semaines à venir. Maintenant, il est temps de vivre l’action jour par jour et savourer le suspense tout au long du mois jusqu’au 18 décembre, le jour du sacre ultime.
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