Vendredi dernier au Stade du Caire, au coup de sifflet final de l’arbitre Alioum Néant, les joueurs algériens se rendent compte de l’histoire qu’ils viennent d’écrire pour se hisser au sommet du continent 29 ans après leur seul succès continental, réalisé sur leur territoire, portés par Rabah Madjer. Grâce à une frappe de l’attaquant Baghdad Bounedjah à la deuxième minute de la partie, la nouvelle génération des Fennecs s’est imposée contre une grosse équipe sénégalaise emmenée par l’emblématique Sadio Mané. « C’est extraordinaire, historique. C’est la première coupe qu’on remporte hors du pays. C’était un long parcours, mais nous avons mérité notre sacre. Cela n’a pas été le meilleur match d’un point de vue technique, mais une finale, ça se gagne. Meilleure attaque et meilleure défense de la compétition, je ne pouvais pas espérer mieux. Je remercie mes joueurs pour leur travail », s’est réjoui l’entraîneur Djamel Belmadi après le match. C’est vrai, le sacre est bien mérité, même si la frappe de Bounedjah a été déviée. La logique a primé dans cette compétition, où la bande de Riyad Mahrez avait une étiquette de favoris dès le coup d’envoi.
Malgré une Coupe du monde 2014 réussie, l’équipe d’Algérie était entrée dans une période sombre, marquée par une valse d’entraîneurs qui n’arrivaient ni à convaincre, ni à s’imposer, une Coupe d’Afrique 2017 catastrophique sans gagner le moindre match (2-2 contre le Zimbabwe), une non qualification pour la Coupe du monde 2018 après avoir essuyé deux défaites face à la Zambie et, finalement, un changement de président à la tête de la fédération. Il fallait donc un homme qui pouvait redonner de la stabilité à l’équipe. Il a été trouvé en la personne de Djamel Belmadi, qui a débuté en août 2018 aux commandes des Fennecs.
Les résultats ont été tout de suite positifs, avec un bilan de 11 victoires en 16 matchs et une seule défaite. Le tacticien algérien a construit une équipe solide, qui, en plus de n’avoir concédé que deux buts dans toute cette CAN (aucun dans la phase de groupe), a montré la meilleure attaque, avec 13 buts inscrits en 7 rencontres. Le sélectionneur local a ainsi métamorphosé son équipe, qui n’a jamais gagné le moindre titre sous les ordres d’un entraîneur étranger. « C’est un travail énorme que nous avons fait en l’espace de 8 mois seulement. On a souvent tendance à oublier que ce sont les joueurs qui font tout le travail. Moi, je n’ai qu’un petit rôle. Je les remercie pour leur travail fantastique », a déclaré Belmadi après le sacre. Celui-ci a su se faire respecter et apprécier des joueurs, qui le qualifient de « rigoureux », « passionné » et de « déterminé », créant ainsi l’unanimité au sein du vestiaire comme auprès du public algérien.
Une génération dorée, un mental d’acier
Dès sa nomination, Belmadi a fait des choix forts, mettant à l’écart certains habitués du groupe, comme Nabil Bentaleb ou Saphir Taider, pour manque de régularité, et mettant quelques stars sur le banc, telles que Yacine Brahimi ou Islam Slimani, privilégiant d’autres profils comme Youcef Belaili, ou encore Bounedjah, réputés pour leur rigueur. Il a insisté sur la mise en place d’un groupe homogène entre jeunes joueurs à l’image de Hichem Boudaoui, 19 ans, et d’Ismaël Bennacer, 21 ans (meilleur joueur de la compétition), et joueurs expérimentés comme Adlène Guedioura qui, à l’âge de 33 ans, s’est vu offrir à la surprise générale une place de titulaire indiscutable dans le schéma tactique du sélectionneur, ou encore Rafik Halliche, 32 ans, qui avait rencontré l’équipe d’Egypte à plusieurs reprises lors des qualifications pour la Coupe du monde il y a 10 ans.
Une homogénéité que l’on retrouve encore entre les binationaux comme Riyad Mahrez, Andy Delort ou Alexandre Oukidja, ces deux derniers parlant uniquement français, et les autres joueurs de l’équipe, tels qu’Azzedine Doukha et Youcef Atal. Ces sont des choix forts de la part de Belmadi, accentués par l’exclusion du groupe d’Haris Belkelba juste avant le début de la compétition et en pleine période de stage international, pour problèmes disciplinaires, preuve de l’importance de l’aspect mental aux yeux du tacticien. « On a toujours eu de bons joueurs et ce sont les mêmes qui étaient là lors de la dernière CAN, mais Djamel nous a donné une bonne et solide équipe. On peut voir la solidarité qu’il y a entre les joueurs et il a su leur transmettre son caractère et l’esprit de groupe, même s’il y en a qui ne sont là que depuis quelques semaines ou des anciens qui ont perdu leur place sur la pelouse. Tous sont unis pour l’équipe », explique Rafik Saïfi, ancien international d’Algérie et analyste auprès de la chaîne beIN sports.
Les Fennecs ont aussi pu compter sur le soutien sans faille de leurs supporters venus en nombre, avec plus de 20 000 demandes de visas, des billets offerts par la fédération et 34 avions, dont 6 cargos militaires, affrétés par l’Algérie juste pour la finale, ce qui montre l’engouement et l’importance d’une victoire aux yeux des Algériens.
Palmarès CAN
1957 : Egypte
1959 : Egypte
1962 : Ethiopie
1963 : Ghana
1965 : Ghana
1968 : RD Congo
1970 : Soudan
1972 : Congo
1974 : Zaïre
1976 : Maroc
1978 : Ghana
1980 : Nigeria
1982 : Ghana
1984 : Cameroun
1986 : Egypte
1988 : Cameroun
1990 : Algérie
1992 : Côte d’Ivoire
1994 : Nigeria
1996 : Afrique du Sud
1998 : Egypte
2000 : Cameroun
2002 : Cameroun
2004 : Tunisie
2006 : Egypte
2008 : Egypte
2010 : Egypte
2012 : Zambie
2013 : Nigeria
2015 : Côte d’Ivoire
2017 : Cameroun
2019 : Algérie
Titres par pays
Egypte : 7 (1957, 1959, 1986, 1998, 2006, 2008, 2010).
Cameroun : 5 (1984, 1988, 2000, 2002, 2017)
Ghana : 4 (1963, 1965, 1978, 1982)
Nigeria : 3 (1980, 1994, 2013)
Algérie : 2 (1990, 2019)
Côte d’Ivoire : 2 (1992, 2015)
RD Congo : 2 (1968, 1974)
Congo : 1 (1972)
Ethiopie : 1 (1962)
Maroc : 1 (1976)
Afrique du Sud : 1 (1996)
Soudan : 1 (1970)
Tunisie : 1 (2004)
Zambie : 1 (2012)
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