« Madagascar » n’est plus seulement un film qui a décroché de nombreux prix et occupé les sommets du box-office pendant plusieurs semaines en 2005, mais une équipe nationale qui fait parler tout le monde aujourd’hui. Participant pour la première fois à la Coupe d’Afrique des Nations (CAN), la sélection des Bareas, 108e au classement mondial de la Fifa au mois de juin, s’est qualifiée pour les 8es de finale en se plaçant à la tête du groupe B, devançant même le Nigeria, triple champion d’Afrique.
D’entrée de jeu, l’équipe a montré une performance historique, réalisant un nul (2-2) face à la Guinée de Naby Keita, décrochant ainsi son premier point. Pour le deuxième match, les Malgaches sont encore passés à la vitesse supérieure en battant le Burundi, un autre nouveau venu dans la compétition, 1-0, mettant ainsi un pied dans le second tour. Et pour parfaire la surprise, les hommes de Nicolas Dupuis ont créé l’un des plus grands chocs de l’histoire de la CAN en battant le Nigeria (2-0), une équipe qui les devance pourtant de 63 rangs dans le classement de la Fifa, dimanche dernier au Stade d’Alexandrie. « C’est un exploit. On a réussi à se qualifier pour le tournoi. Ensuite, on a gagné notre premier match et maintenant, on va en 8es de finale. Bravo à mes joueurs », a dit le technicien français Nicolas Dupuis après le match.
C’est une joie pour le groupe et pour tout le pays, qui était en deuil suite au décès de plus de 15 personnes lors d’une bousculade à Antananarivo à l’occasion de la Fête nationale le 26 juin. « On savait que ce serait un match compliqué, et sans mentir, notre objectif était au moins de prendre un point pour nous assurer la deuxième place du groupe. On a pris confiance au fur et à mesure de la rencontre et je crois que la victoire est méritée. C’est tellement énorme qu’il y a eu moins d’effervescence dans le vestiaire que lors de la victoire face au Burundi. Nous allons fêter ce soir. Nous sommes venus ici sans pression et nous sommes montés en puissance. Nous n’avons pas à rougir de ce que nous avons fait », a dit le défenseur de Grenoble Jérôme Mombris.
Dire que ce parcours exceptionnel est un coup du hasard serait mépriser le grand travail et l’état d’esprit de l’équipe. S’il est vrai que les Malgaches n’ont jamais été dominants lors de leurs rencontres, ils ont toujours montré une grande efficacité dans le dernier tiers et une grande discipline pour pouvoir contenir leurs adversaires, même si ceux-ci étaient du calibre des Super Aigles nigérians. L’équipe est bien organisée défensivement et sait comment lancer ses attaques pour faire mal.
Une famille, pas une équipe
Le succès du Madagascar est aussi dû à la cohésion et à la solidarité au sein du groupe, qui travaille à rendre fier tout un peuple. « On est oecuméniques, on se recueille tous ensemble : chrétiens, musulmans, évangélistes. On prie un seul Dieu, c’est comme ça depuis 150 ans. On fait tout ensemble, on ne va pas changer la tradition », a expliqué le capitaine Faneva Andriatsima au site de Libération.
Cet esprit est le fruit d’un long travail mis en place avec l’arrivée de Nicolas Dupuis, en 2017, en coopération avec Andriatsima. L’entraîneur a fait appel à ses meilleurs éléments et a convoqué des expatriés et contacté tous ceux qui pouvaient avoir des racines malgaches pour rejoindre l’équipe nationale, dont le défenseur lyonnais Jérémy Morel. Des 23 joueurs convoqués pour la CAN, 5 évoluent sur le continent, tandis que les autres sont des expatriés qui évoluent aux quatre coins de la planète. « La venue du coach et son projet avec le capitaine ont su fédérer. Il a monté son équipe, appelé des expatriés et a changé notre manière de jouer. On a passé un cap, avec un style plus tactique, qui nous a profité. On n’est venus à la CAN ni comme des outsiders ni comme des clowns. On veut tout donner et on veut montrer au monde que Mada, ça existe et que ça joue du beau football », a expliqué le défenseur Toavina Rambeloson.
Bien que l’exploit ait été réalisé et qu’une nouvelle page de l’histoire ait été écrite, Dupuis ne s’emballe pas. « On reste le Petit Poucet et dire que l’on est le Petit Poucet nous aide beaucoup. Maintenant, on va essayer d’aller le plus loin possible. La concentration des joueurs progresse à chaque match et on veut faire rêver le peuple malgache, et c’est ce qu’on a fait. Le problème est que j’ai toujours utilisé les mêmes joueurs et que beaucoup sont fatigués. Maintenant, il faut faire un bon travail de récupération », a-t-il déclaré.
Le Madagascar ne peut à présent plus se cacher derrière son petit statut et devra poursuivre son parcours avec l’étiquette de « sensation de la CAN 2019 ». « A partir de maintenant, tout ce qui vient est du bonus pour rendre encore plus fiers les Malgaches. C’est ça le plus important », a conclu Andriatsima.
Lien court: