« Je resterai ici autant que Dieu le veut. Quand mon temps sera venu, je n’aurai pas de regrets. J’ai réalisé beaucoup de choses », disait Mohamad Ali, décédé vendredi dernier. Mais sa légende ne s’éteindra pas. L’icône de la boxe Mohamad Ali, « The Greatest », comme il aime être appelé, a succombé à la maladie de Parkinson à 74 ans dans un hôpital de Phoenix (Arizona). Le triple champion du monde des poids lourds souffrait depuis 1984 et avait déjà été hospitalisé à deux reprises fin 2014 et début 2015, avant qu’il ne perde son dernier combat face à un problème respiratoire. La nouvelle du décès a déclenché une vague d’émotion dans le monde, et en particulier dans sa ville de Louisville où les drapeaux ont été mis en berne sur tous les bâtiments publics samedi.
« Dieu est venu chercher son champion », déplore Mike Tyson, l’un de ses successeurs sur les rings. Le champion olympique de Rome 1960 est perçu comme le meilleur boxeur sportif de tous les temps. Grâce à son style unique, les bras souvent ballants le long du corps, il remporta 56 matchs sur 61 instaurant ainsi son héritage. « Je vole comme le papillon, pique comme l’abeille, ses poings (de Foreman) ne peuvent pas toucher ce que ses yeux ne voient pas », avait-il dit après sa victoire contre George Foreman en 1974 pour le titre de champion du monde lors du « Rumble in the Jungle » au Zaïre.
« C’était un athlète qui a touché les coeurs des peuples à travers le globe. Un athlète qui s’est engagé au-delà du sport qui avait le courage pour donner l’espoir à beaucoup qui souffraient en allumant le chaudron olympique, alors qu’il était lui-même en peine. C’est un athlète qui s’est battu pour la paix et la tolérance, un vrai olympien », a dit le président du Comité olympique international, Thomas Bach.
Symbole de l'humanité
Ali n’était pas seulement une icône de la boxe ou une légende du sport, c’était un symbole de toute l’humanité et une personnalité qui a marqué l’histoire du XXe siècle aux niveaux culturel, humain et religieux. Né Cassius Clay, petit-fils d’esclave, il s’est fait appeler Cassius X au lendemain de son titre de championnat du monde en 1964 en l’honneur du leader des « Black Muslims » Malcolm X. Un mois plus tard, il se convertit à l’islam et prend le nom de Mohamad Ali.
Patriotique et moderne
Juste après, il visita l’Egypte sur invitation du Haut conseil islamique du pays. Son séjour s’étala sur deux semaines où il a visité Le Caire, Alexandrie, Port-Saïd, Louqsor et Assouan se rendant dans tous les anciens monuments pharaoniques. Il pria à la mosquée Mohamad Ali, et une version du Coran dorée lui a été offerte par le secrétaire général du Haut conseil islamique. Il fut aussi reçu par le président Gamal Abdel-Nasser qu’il percevait comme un modèle de président patriotique et moderne. « J’ai beaucoup lu à propos de ces monuments dans l’histoire de l’Egypte, mais je n’ai jamais imaginé qu’ils seraient si merveilleux. J’ai aussi vu le Haut- Barrage, je peux vous dire que c’est un projet énorme, et cela témoigne de la grandeur du président égyptien Gamal Abdel-Nasser », avait-il dit aux médias alors. Cela n’était pas son unique visite, car il retourna en Egypte en 1986 en tant qu’ambassadeur de bonne volonté pour un bref séjour.
Le triple champion du monde a visité l'Egypte en 1964 et a rencontré le président Gamal Abdel-Nasser auquel il avait une grande estime.
Ses fortes positions ont continué lorsqu’il a refusé de participer à la guerre contre le Vietnam en 1966. « Je n’ai pas de problème avec les Viêt-cong. Ma conscience ne me permet pas de tirer sur mes frères ou des pauvres en famine juste pour l’orgueil de la grande et puissante Amérique. Les fusiller ? Pourquoi ? Ils ne m’ont jamais traité de nègre ni attaqué ma famille. Emprisonnez-moi si vous voulez », avait-il proclamé le 17 février 1966. Bien qu’il ait échappé à la prison, sa licence a été retirée et ses titres déchus avant qu’il ne puisse les récupérer trois ans et demi plus tard. Il a maintenu ses victoires et batailles sur le ring jusqu’à décembre 1981 où il a définitivement enlevé ses gants suite à une défaite face au Jamaïcain Trevor Berbick.
Mais ses combats contre la maladie, le bien du sport et les causes humanitaires ont continué jusqu’à son dernier souffle. En 1991, il s’est envolé pour l’Iraq lors de la guerre du Golfe où il a rencontré le président Saddam Hussein essayant de négocier la libération des otages américains. En 2002, il est aussi parti en Afghanistan en tant qu’envoyé de paix des Nations-Unies. Il a allumé le chaudron olympique en 1996 et s’est maintenu debout, appuyé sur ses proches au JO de Londres 2012, en signe de défiance à sa maladie. A partir de 2013, son frère Rahman a déclaré qu’il ne pouvait plus parler et ne pourrait plus apparaître en public. « Mohamad Ali ne mourra jamais, il est comme Martin Luther King. Son esprit vivra à jamais », a assuré Don King, le célèbre promoteur américain et l’un des proches amis de Ali.
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