L'annulation de l'octroi de visas individuels aura-t-elle son impact sur le mouvement touristique en Egypte ?
A partir du 15 mai prochain les touristes ne pourront plus obtenir leurs visas à leur arrivée à l’aéroport comme ce fut le cas pendant les 10 dernières années. Un privilège dont bénéficiaient notamment les citoyens européens et américains, et ceux de la plupart des pays du Golfe. Désormais, quelle que soit sa nationalité, tout touriste devra demander son visa auprès du consulat égyptien. La décision ne concerne pas les touristes qui viennent en groupe à travers une agence de voyages. Ceux-ci pourront toujours obtenir leur visa à leur arrivée à l’aéroport. «
Cette décision a été prise pour des raisons de sécurité », explique Racha Al-Azayzi, conseillère médiatique du ministre du Tourisme.
Cela dit, la décision a suscité un débat parmi les professionnels du tourisme, d’autant plus qu’elle intervient à un moment où l’Egypte cherche à relancer un secteur gravement touché depuis début 2011. C’est surtout autour de sa temporalité qui est venue quatre jours après la conférence du développement économique tenue dernièrement à Charm Al-Cheikh. « Le succès de la conférence économique a donné un grand espoir pour un essor du secteur du tourisme. Comment donc parler de restrictions sur les visas maintenant au lieu d’accorder plus de facilités ? », se lamente Elhami Al-Zayat, expert touristique, en assurant que cette décision aura un impact négatif sur le mouvement du tourisme en Egypte, surtout dans le cadre de la concurrence avec d’autres destinations de la région qui offrent tout le temps des facilités aux voyageurs. « On pouvait remettre cette décision au début de l’année 2016 pour avoir le temps d’avertir les tour-opérateurs et les touristes surtout pendant la saison d’été où il y a une forte concurrence avec d’autres destinations », explique-t-il.
Mohamad Hassouna, membre de la Chambre des agences de voyages, indique que cette décision a suscité la colère des agences de voyages surtout qu’elle est venue sans négociation avec les professionnels du secteur. « Cette décision mène à une perte d’environ 25 % des arrivées touristiques pour l’Egypte, surtout avec la croissance du phénomène du Last Minute Reservation (la réservation à la dernière minute) qui se répand dans le monde entier, notamment dans les régions de tensions », explique Hassouna. Pour lui, une telle décision va causer beaucoup de problèmes, puisque la plupart des touristes des vols réguliers en Egypte demandent leur visa aux aéroports. Les touristes qui viennent à travers les sites Internet et les agences de l’etourisme viennent d’une façon individuelle ou en famille. « En outre, il y a des pays où l’Egypte ne possède pas de consulat ou bien il se trouve à de grandes distances de l’endroit où se trouve le touriste », déplora Hassouna, en assurant que la Chambre des agences a envoyé une lettre au ministre du Tourisme afin d’annuler ou de réviser cette décision qui nuit au secteur. « Si c’est une affaire de sécurité, les terroristes pourront bien entrer en Egypte parmi les groupes touristiques qui obtiendront les visas à leur arrivée aux aéroports », lance-t-il.
Selon les chiffres du ministère du Tourisme, en 2014, 2 millions de touristes ont obtenu leur visa à l’aéroport, soit près de 17 % des touristes ayant visité l’Egypte cette année-là. 65 % parmi eux venaient des pays du Golfe.
Pour sa part, Mahmoud Osmane, membre de l’Union des chambres du tourisme, ne rejette pas le principe, mais préfère prévoir des outils d’application de sorte à ne pas nuire au tourisme. Osmane estime que l’Egypte vit dans une région enflammée et que la révision du système d’octroi des visas devient une nécessité. Pour lui, la sécurité n’est pas moins cruciale pour un tourisme florissant. Parmi les régulations qu’il suggère : une garantie de l’hôtel où loge le touriste, ou encore la mise en place d’un système électronique pour l’octroi des visas.
Propriétaire d’une agence de voyages, Amari Abdel-Azim ne s’inquiète pas trop non plus.
« Si on a eu recours à certaines facilités pour l’obtention des visas c’est parce qu’il y avait une certaine stabilité. Maintenant, la situation est inquiétante dans presque tous les pays de la région », note-t-il.
Il croit que les facilités concernant les visas ne sont pas l’unique moyen de promotion touristique. « Une bonne publicité, un nombre suffisant d’aéroports, la qualité de services sont autant de moyens de promotion », conclut-il.
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