Même les balades en felouque vont renchérir avec la hausse des prix des carburants. (Photo : Chérif Mahmoud)
Une vague de colère domine le secteur du tourisme à la suite des dernières décisions gouvernementales concernant l’augmentation des prix des carburants, en particulier le gasoil, dont le prix a augmenté de 63%. Une augmentation qui s’inscrit dans le cadre de la diminution des subventions accordées à l’énergie. Elles atteignent 20 % du budget de l’Etat, avec 130 milliards de L.E. par an. «
La baisse est un coup dur pour le secteur du tourisme qui souffre depuis trois ans avec la chute du nombre de touristes en Egypte »
, se lamente Atef Abdel-Latif, membre de l’Association des investisseurs dans le tourisme à Marsa Alam (sud), qui assure que 70% des établissements touristiques fonctionnent au gasoil. «
Cette augmentation des carburants a été accompagnée d’une autre hausse: celle de l’électricité et du gaz naturel. Ce qui a augmenté les frais de fonctionnement des hôtels. En outre, la temporalité de cette hausse n’est pas adéquate. Les professionnels du tourisme ont demandé plusieurs fois à être prévenus d’avance avant toute hausse des prix, puisqu’elles ont un impact direct sur les prix des voyages en Egypte »
, poursuit Abdel-Latif
.
« En effet, des contrats sont signés à l’avance avec les voyagistes à l’étranger, et il faut ensuite modifier les prix quand de telles hausses du carburant interviennent. Ce sont alors les agences de voyages et les hôtels qui supportent ces hausses », reprend-il. Pour compenser une partie de leurs pertes, les investisseurs du tourisme pourraient, selon lui, licencier des employés et reporter la maintenance des hôtels, mais cela affectera sans doute le service des touristes. Il ajoute que la seule solution est, dans les hôtels, de remplacer les énergies conventionnelles par des énergies renouvelables, comme le solaire ou l’éolien. Ce qui exige d’énormes investissements qui ne sont pas bienvenus à l’heure actuelle pour le secteur du tourisme qui souffre d’un énorme déficit budgétaire. En conséquence, les banques refusent de financer des projets concernant le secteur du tourisme. Donc, le gouvernement doit subventionner le passage à l’énergie renouvelable pour les hôtels.
Quant à Adel Abdel-Razek, membre de l’Union des Chambres du tourisme, il assure que la hausse des prix des carburants est un bon pas sur la voie de la réforme économique en Egypte, un pas qui a beaucoup tardé selon lui. « Cette hausse aurait dû se faire graduellement avec une sensibilisation publique. Le secteur du tourisme, qui est en pleine crise, devait être exempté de cette hausse pendant une période limitée, puisque cette hausse des prix de l’énergie implique une hausse des prix des voyages en Egypte allant de 40 à 50%. Ce qui n’est pas logique avec la récession dont souffre le tourisme actuellement », explique-t-il. Et le problème ne concerne pas seulement les contrats déjà signés, dont quelques-uns sont valides jusqu’en 2015. « Avec les nouveaux contrats, on ne peut pas augmenter les prix à l’heure actuelle avec une demande déjà faible pour la destination Egypte. En revanche, on fait des offres spéciales pour attirer les touristes, même s’il y a des pertes. Des secteurs souffrent davantage comme les croisières sur le Nil, les transports touristiques et les safaris dans le désert qui sont des domaines dont l’activité est basée sur la forte consommation de gasoil », s’indigne Abdel-Razek. L’Egypte propose 268 croisières sur le Nil entre Louqsor et Assouan qui sont presque toutes désertées par les touristes depuis plus de 3 ans, ce qui accroît la situation de crise.
Etablir un équilibre
Magdi Sélim, vice-ministre du Tourisme, assure que la hausse des prix des carburants augmentera sans doute les pertes du secteur du tourisme, puisqu’elle affectera le taux d’arrivées touristiques dans le pays. Les billets d’avion vont aussi augmenter de 15 à 20%. Les agences de voyages devront établir un équilibre entre les hausses des prix des voyages pour compenser les pertes, et la continuité de la demande sur l’Egypte comme destination touristique, surtout à une époque qui témoigne d’une baisse considérable du nombre de touristes. Les arrivées touristiques en Egypte ont chuté de 30% pendant le premier trimestre de l’année actuelle, comparées à la même période de l’année précédente. Quant aux revenus touristiques, ils ont chuté aussi de 43 % pour atteindre 1,3 milliard de dollars.
Pour soutenir le secteur, le ministère du Tourisme a demandé au Conseil des ministres l’adoption de certaines mesures, afin de subventionner ce secteur qui agonise encore plus face à la hausse des prix de l’énergie. Ainsi, le gouvernement a approuvé la mise en place d’un fonds spécial pour soutenir l’énergie fournie au secteur du tourisme, avec un capital de 6 milliards de L.E. sur 3 ans. « On a eu cette année 2 milliards de L.E. On financera la différence entre l’ancien et le nouveau prix de l’énergie pendant une période limitée jusqu’à ce que les choses reviennent à l'ordre. Là, les hôtels et agences pourront compenser leurs pertes et faire en plus des bénéfices », estime Hicham Zaazoue, ministre du Tourisme.
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