La France est le principal partenaire de l’Egypte en matière d’archéologie, avec près d’une cinquantaine de missions opérant sur de nombreux chantiers de fouille, de recherche et de restauration à travers tout le territoire égyptien. Lors de la 8e édition de la Journée de l’archéologie France-Egypte 2024, la diversité et la richesse du travail des équipes franco-égyptiennes ont été présentées à travers un ensemble de conférences animées par les directeurs des centres de recherche français : Pierre Tallet, directeur de l’Institut Français d’Archéologie Orientale (IFAO), Thomas Faucher, directeur du Centre d’Etudes Alexandrines (CEAlex), Luc Gabolde et Ahmed Al-Tahar, co-directeurs du Centre Franco-Egyptien d’Etude des Temples de Karnak (CFEETK), ainsi que par la chercheuse Aurore Ciavatti de l’Unité Mixte de Recherche (UMR).
Chaque institution a présenté les résultats annuels de ses travaux, qui ont non seulement conduit à de multiples découvertes, mais ont également reposé sur des recherches scientifiques détaillées et des efforts de restauration.
L’IFAO sur tous les chantiers
« Avec 600 chercheurs participant chaque année à ses travaux, l’Egypte antique est une passion française autant qu’un domaine d’excellence scientifique », a publié l’IFAO sur sa page officielle, en collaboration avec l’Institut Français d’Egypte (IFE) au Caire. Avec ses 144 ans de présence en Egypte, l’IFAO est l’une des cinq grandes écoles françaises à l’étranger, chargée d’étudier la civilisation égyptienne de la préhistoire jusqu’au XXe siècle, dans les domaines de l’archéologie, de la philologie et de l’histoire. Les chantiers fouillés par l’IFAO couvrent toutes les périodes de la préhistoire à l’islamique, à travers tout le territoire égyptien : Vallée du Nil, Delta, oasis, déserts oriental et occidental, Sinaï et mer Rouge.
L’IFAO mène actuellement 125 opérations archéologiques, incluant 35 missions à travers le pays, ainsi que 90 programmes et projets de recherche. « Dix-neuf missions traitent des périodes pharaoniques jusqu’à la Basse époque, onze sont spécifiquement dédiées à l’époque gréco-romaine et cinq concernent les périodes byzantine, copte, médiévale et moderne », a précisé Tallet. L’IFAO bénéficie également d’une bibliothèque parmi les plus importantes au monde, avec 97 000 volumes, ainsi que d’une maison d’édition publiant 20 monographies et 6 périodiques par an.
A Tell El-Iswid ou à Ouadi Sannour, les découvertes archéologiques révèlent des pans de l’histoire de l’Egypte Ancienne, tandis qu’aux sites portuaires de la mer Rouge, les missions ont mis au jour des galeries de conservation comme celles de Ouadi El-Jarff, destinées à préserver les embarcations. Laurent Coulon, directeur de la mission de l’IFAO au temple d’Amon à Karnak, a, quant à lui, découvert une stèle remontant à la XVIIIe dynastie, parmi d’autres.
Le CEAlex, au nord, et le CFEETK, au sud
Créé en 1990 par Jean-Yves Empereur, le Centre d’Etudes Alexandrines (CEAlex) a pour mission principale d’étudier la ville d’Alexandre le Grand, d’enrichir les connaissances historiques sur cette métropole et de participer à la préservation de son patrimoine unique. « Cette année, le CEAlex reprendra les fouilles sous-marines au site du Phare d’Alexandrie », souligne Thomas Faucher, directeur du CEAlex, notant que le centre célèbre cette année le 30e anniversaire de ses fouilles sur ce site. Faucher a également salué la réouverture du Musée gréco-romain, incitant le grand public à admirer la fructueuse coopération égypto-française dans la restauration des pièces de mosaïque. A Alexandrie, les fouilles à Kom Bahig, ainsi que le Projet de Pharos, se poursuivront cette année.
A Thèbes, dans le sud du pays, le CFEETK a pour missions multiples la restauration, la conservation, l’étude et la fouille. « Un atlas des obélisques de Karnak sera bientôt publié », affirme Luc Gabolde, directeur français du CFEETK, rappelant que le temple de Karnak comptait 19 obélisques, dont deux (ceux de la reine Hatchepsout et du roi Thoutmosis Ier) sont encore sur place, tandis que les autres se trouvent à l’étranger. « Notre mission a récemment découvert une partie d’un obélisque de 10 mètres de hauteur envoyé à l’étranger », assure Gabolde, ajoutant qu’une série d’études portant sur plus de 700 blocs et fragments datant de Thoutmosis Ier, découverts dans le sous-sol du temple de Karnak, est en cours. « Cette année, un grand projet de remontage des blocs aura lieu pour réaménager une partie du musée en plein air », précise Gabolde.
Les marques rouges de la Grande Pyramide
Les Français opèrent également sur le Plateau de Guiza. « Je vais commencer une étude architecturale et épigraphique des chambres de décharge de la pyramide de Chéops à Guiza », indique l’égyptologue et chercheuse associée Aurore Ciavatti lors de la journée de l’archéologie France-Egypte. La réalisation d’une modélisation 3D des « cinq chambres de décharge », construites avec environ 3 000 tonnes de granit et de calcaire surplombant la chambre funéraire de Chéops, permettra une étude architecturale et épigraphique inédite de ces installations exceptionnelles. « Cette étude fournira de nouvelles données sur l’organisation du chantier, la main-d’oeuvre, les étapes de construction et même sur la durée de la construction de la Grande Pyramide », conclut-elle. Cette chercheuse a également mis l’accent sur le dégagement, la photographie et l’analyse des marques d’ouvriers écrites en rouge sur la pyramide du roi Snéfrou à Meidoum, révélant des dates de règne encore inédites à ce jour.
Financés par diverses institutions françaises, notamment le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, ainsi que le fonds Archéologie et Patrimoine en Méditerranée (ARPAMED), les travaux archéologiques des Français s’intensifient en Egypte en 2024.
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