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La calligraphie arabe et son esthétique

Doaa Elhami , Mercredi, 12 juin 2024

La calligraphie arabe est un art riche né bien avant la période islamique. Focus sur l’évolution de cet art, toujours en vogue, qui a été inscrit sur le patrimoine immatériel de l’Unesco.

La calligraphie arabe et son esthétique
(Photo : Doaa Elhami)

La calligraphie arabe est un art de valeur esthétique riche qui s’est développé au fil des siècles. C’est un art qui est fortement présent malgré l’invasion de la technologie et la numérisation. « La calligraphie arabe forme l’identité arabe, voire égyptienne. C’est une façon de mieux connaître la langue et son histoire », souligne Mohamed Hassan, expert en calligraphie arabe à la Bibliotheca Alexandrina, ajoutant que l’historien doit bien apprendre les différentes écritures et manuscrits afin de perfectionner l’histoire.

La calligraphie arabe est née dans la péninsule arabique bien avant la parution de l’islam. « Les poésies suspendues sur la Kaaba avant l’islam, connues par Al-Moallaqat, témoignent de la présence de l’écriture arabe », souligne le calligraphe Mohamed Boghdadi, responsable du dossier de la calligraphie arabe à l’UNESCO. Ce n’est qu’avec la parution de l’islam que la calligraphie arabe s’est développée et répandue. Elle est passée de sa forme première en tant qu’inscription sur les rochers pour devenir une écriture sur les parchemins, puis s’est propagée en sortant de la péninsule arabique pour atteindre la Grande Syrie, la Mésopotamie et l’Egypte. « Lorsque le troisième calife, Osmane Ibn Affan, a envoyé un exemplaire du Coran à ces nouveaux pays, les souverains ont accordé une importance ultime à l’écriture du texte sacré et ont cherché à la protéger », reprend Mohamed Hassan, soulignant que le Coran envoyé par Osmane était écrit en calligraphie « Hegazi », dépourvue de points de syntaxe et de ponctuation. En fait, le transfert du Coran a été la première étape dans le développement de cette écriture qui a donné naissance à l’étude de la calligraphie. « L’Egypte conserve deux copies du Coran rédigées en calligraphie coufique sur les parchemins : une, pesant 80 kg, se trouve à Dar Al-Kotob Al-Masriya, tandis que la deuxième copie est actuellement au musée des manuscrits, situé au Centre islamique d’Egypte dans la Capitale administrative », continue Mohamed Hassan. Selon les experts en calligraphie arabe, cet art s’est également imposé sur les murs des mosquées, les balcons des minarets et les palais royaux.

En effet, Moawiya Ibn Sofian, en fondant l’Empire omeyyade (662-750), a transféré la capitale de l’Etat islamique de Médine à Damas, en Syrie. « Les temples, églises et synagogues érigés en Syrie étaient alors ornés de reliefs, gravures et images. Le souverain musulman a alors décidé d’orner les mosquées avec la calligraphie arabe », explique Boghdadi, ajoutant que les bâtisseurs de l’époque omeyyade ne maîtrisaient pas encore les bases esthétiques de la calligraphie arabe. Il a fallu attendre le Xe siècle, durant l’époque abbasside, pour voir un véritable développement de l’écriture arabe. Cette évolution s’est déroulée en trois étapes. La première est attribuée au vizir iraqien Ibn Mokla qui vivait dans la ville de Koufa, la capitale du califat abbasside, et qui a posé les bases géométriques esthétiques de la calligraphie arabe. Il a donné naissance à un Coran en Koufi écrit sur du parchemin. Quelques années plus tard, le calligraphe Ibn Al-Bawab, décédé en 413 de l’hégire, a réalisé une copie plus simple du Coran appelée « Naskh ». « Cette version est actuellement conservée à la Bibliothèque Chester Beatty en Irlande », rappelle Mohamed Hassan. Quant à la troisième étape du développement de la calligraphie arabe, elle s’est réalisée avec Yaqout Al-Mostaasemi qui a mentionné six écritures : Tawqie et Roqaa pour les diwans ; Naskh et Tholoth pour le Coran ; Mohaqaq et Rayhan également pour l’inscription du Coran et l’utilisation du diwan.

Avec l’expansion de l’Etat islamique et, par conséquent, de la calligraphie arabe, cet art a acquis de nouvelles caractéristiques. « Cette expansion a permis à la calligraphie arabe de se lier aux anciennes civilisations babylonienne, sumérienne, égyptienne, ptolémaïque et byzantine, donnant naissance à de nouveaux types de calligraphie tels que le Tholoth mamelouk et le Toumar », ajoute Boghdadi. En plus, la calligraphie arabe a développé de nouveaux styles dans les pays maghrébins, notamment le Koufi maghrébin, l’un des plus beaux exemples de calligraphie arabe. « Nous comptons 17 types d’écriture Koufi, dont la plus belle est la fatimide », explique Boghdadi, ajoutant que de nouvelles écritures arabes ont émergé avec la fondation de l’Empire ottoman, telles Al-Roqaa pour les lettres officielles, Al-Diwani pour les décrets sultaniens et Al-Toghrâa, utilisée pour les sceaux des sultans, rois et walis, afin de les protéger contre les falsifications.

Aujourd’hui, la calligraphie arabe se résume en trois types essentiels : Al-Naskh, Al-Roqaa et Al-Tholoth. Les calligraphes cherchent actuellement à restaurer la position de la calligraphie afin de la conserver, en organisant des forums et des compétitions internationales. « Il est essentiel de préserver la calligraphie arabe, surtout parce que c’est un art très demandé et à la mode », conclut Ahmed Mansour, directeur du Centre des écrits et des manuscrits à la Bibliotheca Alexandrina.

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