A travers 250 pièces présentées dans la salle 44 d’expositions temporaires du Musée égyptien de la place Tahrir, le visiteur peut découvrir la capitale des Ramessides (1279-1069 av. J.-C.), Pi-Ramsès, nommée actuellement Qantir dans le gouvernorat de Charqiya. Sous le titre « Les antiquités de Qantir, un siècle de fouilles et de recherches dans la résidence des Ramessides », l’exposition a ouvert ses portes le 17 juillet jusqu’à mi-octobre 2023.
Cette exposition est le fruit d’une coopération entre le Musée égyptien du Caire et celui de Roemer Museum à Hildesheim, en Allemagne. « A travers cette exposition, on rend hommage aux premiers égyptologues qui ont travaillé à Qantir et nous ont enrichis d’importantes informations sur Pi-Ramsès », souligne Ali Abdel-Halim, directeur général du Musée égyptien de la place Tahrir. Ces égyptologues sont Mahmoud Hamza, le premier à effectuer en 1928 des fouilles dans l’actuelle Qantir et ses environs qui s’étalent sur 15 km2. Il a dégagé des objets archéologiques de l’époque de Ramsès II et ses successeurs, suggérant que Qantir était la capitale Pi-Ramsès.
« Les archéologues de l’époque pensaient que Tanis était Pi-Ramsès, vu la présence de blocs portant des inscriptions de cartouches de Ramsès II. Mais Mahmoud Hamza suggérait que ces blocs avaient été transférés pendant les époques ultérieures à celle des Ramessides », souligne Dietrich Raue, directeur de l’Institut allemand d’archéologie. Il ajoute que Mahmoud Hamza a découvert à Qantir des objets de la vie quotidienne, indiquant que la ville est plutôt la capitale ramesside. Les galeries du Musée égyptien présentent un nombre considérable d’objets dégagés de Qantir. D’autres sont conservés dans le sous-sol. « Ajoutons encore que Mahmoud Hamza était le premier directeur égyptien du Musée égyptien, reflétant son rôle archéologique efficace », renchérit le directeur du Musée égyptien. Ainsi, le visiteur de l’exposition pourra découvrir des photos de Mahmoud Hamza en compagnie de présidents et de rois arabes, présentées par le département des archives du musée.
La deuxième figure honorée au cours de cette exposition est l’égyptologue Labib Habachi, qui a confirmé l’hypothèse de son prédécesseur Mahmoud Hamza. « Il a entamé en 1941 et 1942 des fouilles dans les villages de Tell Al-Dabaa et Al-Khataana localisés dans les environs de Qantir », retrace-t-on sur les panneaux explicatifs. Au fur et à mesure des années, l’importance de cette région s’accentuait et attirait l’attention des égyptologues du Musée Roemer Hildesheim en Allemagne, notamment l’égyptologue Edgar Pusch, le 3e égyptologue honoré à l’exposition. Il y a travaillé depuis les années 1980 jusqu’à 2019.
(Photo : Doaa Elhami)
« L’exposition renferme des pièces dégagées de Qantir qui font partie de la collection du Musée égyptien », explique l’inspectrice Samar Al-Khamissi. Les pièces de l’exposition varient en taille et en matière. Lors de sa tournée, le visiteur rencontre alors une couronne de granite rouge, qui incarne la divinité Amon et l’enfant divin. Cette couronne coiffait une statue colossale de Ramsès II, vu la cavité trouvée au-dessous. Les organisateurs de l’exposition ont posé un miroir, afin de montrer cette cavité aux visiteurs. « Bien que cette pièce soit découverte à Tell Basta, sa place originaire était plutôt la capitale nord, Pi-Ramsès, l’actuelle Qantir distante d’une trentaine de kilomètres. Lors de sa découverte, cette pièce a trouvé sa place dans le jardin muséologique du Musée égyptien », souligne Sabah Abdel-Razeq, ex-directrice du Musée égyptien.
L’exposition offre également à ses visiteurs une tête de granite supposée être d’une statue colossale de Ramsès II. « Ces colosses ornent soit les cours des temples ou bien les palais royaux », reprend Al-Khamissi. L’exposition montre aussi des stèles qui étaient installées aux frontières de la cité et dont les scènes incarnent le roi offrant un captif à la divinité Amon.
Le mode de vie en détail
Les organisateurs ont voulu montrer tous les aspects de vie de la capitale Pi-Ramsès, avec tous ses détails. En effet, le visiteur de l’exposition rencontre des pointes de flèches de plusieurs types. De même, il y trouve tous les éléments d’équitation et les équipements des chevaux, comme une statuette de tête d’un cheval, des morceaux d’une bride, ainsi que les fragments d’un chariot militaire qu’exploitaient les Anciens Egyptiens. Parmi les oeuvres exposées figure la statue en calcaire d’un lion accroupi. Cette position du lion est l’un des signes de la force du souverain en Egypte Ancienne. Inédite qu’elle soit, cette statue présente le lion en mettant sa patte droite au-dessus de celle de gauche et dont l’épaule droite est marquée du cartouche de Ramsès II. « Cette oeuvre est le joyau de toute l’exposition, vu la rareté d’une telle figure de lion. Un autre exemplaire se trouve en Allemagne », renchérit Abdel-Halim.
Les visiteurs s’intéressent aux oeuvres exposées. (Photo : Doaa Elhami)
L’exposition présente également les fameux jouets de l’Egypte Ancienne comme le senet et le trictrac. « Cette exposition renferme un fragment de stèle qui constitue une lettre écrite en cunéiforme. Malgré la petitesse de cette pièce, sa valeur est bien grande », souligne Nasser Mekkawi, chef de la section d’égyptologie à la faculté des antiquités de l’Université du Caire. « Cette lettre a été découverte après 200 ans des célèbres stèles de Amarna, connues par la densité des lettres en cunéiforme. Cette lettre reflète le rôle diplomatique de Pi-Ramsès et ses relations avec ses voisins, notamment après le traité de paix signé entre l’Egypte et les Hittites. J’espère découvrir les autres lettres diplomatiques, traduire les textes et étudier toutes ces correspondances », renchérit le professeur, mettant l’accent sur la variété des formes des moules de remplissage qui produisaient la faïence en forme de lotus et de pétales qui ornaient les murs et le marbre égyptien qui couvrait le sol des palais. Toute cette garniture est reflétée par la base d’une plateforme du palais de Ramsès III à Leontopolis qui se trouve dans les environs de Pi-Ramsès.
Outre les pièces et les panneaux, l’exposition offre à ses visiteurs la reconstruction virtuelle de Pi-Ramsès, son centre-ville, ainsi que les parties qui ont été fouillées par la mission égypto-allemande. Elle projette les écuries de l’époque, les rues plantées de palmiers et d’arbres. Sans oublier les quartiers de la capitale, ainsi que ceux huppés où habitaient les hauts fonctionnaires dans des palais et des villas.
Cette exposition fournit à ses visiteurs plein d’informations. Mais elle aiguise également l’appétit des spécialistes et des étudiants pour entamer des recherches, afin de découvrir d’autres secrets que cache Pi-Ramsès.
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