
La salle principale de Baidun Shop où se vend les antiquités égyptiennes.
La semaine dernière, les ministères des Antiquités et des Affaires étrangères tentaient de sauver une partie du patrimoine égyptien récemment mise en vente. Le département de récupération du ministère des Antiquités a découvert sur Internet la mise en vente de 126 pièces dans deux salles de vente aux enchères israéliennes, Aweidah Gallery et Baidun Shop.
Les prix varient entre 500 et 2 000 dollars. Le ministre égyptien des Antiquités, Mohamad Ibrahim, a aussitôt envoyé une lettre au ministère égyptien des Affaires étrangères, pour prendre les mesures nécessaires en collaboration avec l’ambassade d’Egypte à Tel-Aviv. « Il fallait arrêter la vente de ces objets le plus rapidement possible. Quelques-uns ont déjà été vendus », a-t-il souligné.
Le ministre a également contacté l’Interpole et l’Unesco, afin d’ouvrir les enquêtes nécessaires. « On a appelé les autorités israéliennes à mener des enquêtes indépendantes pour déterminer si les deux salles de vente sont les propriétaires légaux de ces objets ou s’ils sont illégalement exposés », dit le ministre.

Les pièces en vente d'Aweidah Gallery sont exposées à des prix très modestes.
Ali Ahmad, directeur du département des antiquités récupérées, explique que les objets en question ont été retrouvés à travers une enquête sur Internet visant régulièrement des salles de vente à l’étranger. « Aweidah expose actuellement 110 pièces et Baidun 16. Parmi elles : une collection de bateaux en terre cuite, des vases, des ouchabtis et des stèles ».
La vente a été arrêtée. Les 126 pièces remontent à différentes époques pharaoniques, « mais on n’arrive pas encore à déterminer le lieu où elles ont été volées », précise Ali Ahmad.
D’après le site Internet des vendeurs israéliens, chaque pièce est vendue avec un certificat d’authenticité. Monica Hanna, professeur d’histoire antique, assure cependant que la majorité de ces pièces ont été volées suite à des fouilles récemment menées.
« Ce trafic illicite s’aggrave. Il y a d’autres sites aux Etats-Unis qui ont commencé à mettre en vente des antiquités égyptiennes », assure Monica Hanna.
Ebay propose par ailleurs 800 pièces égyptiennes sur son site anglais. Une demande a été transmise à Londres pour interrompre ces ventes jusqu’à ce qu’une vérification de l’origine des pièces ait lieu. « Si ces pièces sont originales, on tentera de les récupérer, surtout si on arrive à prouver qu’elles sont sorties du territoire illégalement », souhaite le ministre.
Phénomène croissant
La vente d’antiquités égyptiennes volées a pris de l’ampleur depuis la révolution de janvier 2011. « La cause première de ce trafic est le manque de sécurité sur les sites archéologiques », précise Monica Hanna, qui juge nécessaire de « durcir les mesures de contrôle aux frontières ».
Pourtant, le ministre estime, au contraire, que les mesures dans les aéroports sont de plus en plus efficaces. Il assure que ces objets sont sortis du territoire il y a plusieurs années.
« Après la révolution de 2011, on a arrêté à plusieurs reprises des pièces en transit par le port de Noweiba, très probablement à destination d’Israël », confirme l’archéologue Abdel-Réhim Rihanau, spécialiste du Sud-Sinaï.
« On travaille actuellement sur un document essentiel. Il faut changer les lois internationales, car celles de l’Unesco sont dépassées : elles remontent aux années 1970. Nous n’avons pas le droit de récupérer les pièces sorties avant cette date », explique le ministre. Pour lui, « toutes les antiquités égyptiennes doivent retourner en Egypte ».
Traquer les pièces volées
Le département chargé de la récupération des antiquités égyptiennes à l’étranger (à l’origine de la découverte des 126 pièces mises en vente en Israël) a été créé au début des années 1990, afin d’interrompre toute vente ou circulation illégale de pièces égyptiennes. Une équipe spéciale a été formée pour suivre de près les sites Internet de vente. « On a réussi à récupérer plusieurs pièces dans différents pays, et des procédures sont en cours pour trouver d’autres pièces », précise Ossama Al-Nahass, ancien directeur de ce département. Plusieurs procès sont actuellement intentés à l’étranger contre des institutions de vente ou des particuliers.
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