Presque 1 000 km séparent la ville de Chalatine de la capitale égyptienne, Le Caire. Cette ville et ses environs étaient depuis quelque temps le théâtre de relevés archéologiques effectués par le département de la préhistoire du ministère du Tourisme et des Antiquités. Ces relevés, qui ont duré trois ans, ont révélé l’existence de plusieurs sites préhistoriques d’une importance majeure aux villages d’Abraq et de Bir Al-Gahiliya, dans les vallées de Rahba, Soheil, Wadi Meneigaa, et la grotte de Wadi Al-Beida. « Dans la vallée d’Al-Rahba, nous avons découvert plusieurs graffitis et un cadran solaire, qui date de la période néolithique », souligne Khaled Saad, directeur du département de la préhistoire et chef des travaux. Il explique que le cadran se compose d’une pierre de forme circulaire avec au centre une colonne en bois dont l’ombre sur terre varie selon le mouvement du soleil pendant la journée et celui de la lune pendant la nuit. Quant aux relevés effectués dans les villages d’Abraq et d’Al-Gahiliya situés à 35 km de Chalatine, ils ont révélé l’existence de tombes primitives. « Les populations de l’époque enterraient leurs défunts dans ces tombes pour les protéger des torrents qui s’abattaient sur les vallées », explique Saad.
Les vestiges des maisons des ouvriers des carrières.
Chapelle gréco-romaine
Sur la côte de la mer Rouge, les membres de la mission de fouille ont découvert dans la vallée de Saafa une chapelle gravée dans une roche en grès remontant à la période gréco-romaine. Les parois de cette chapelle sont couvertes d’écritures gréco-romaines en mauvais état vu la fragilité de la roche. Néanmoins, « grâce à la nouvelle technologie, nous sommes parvenus à déchiffrer ces textes et à les lire », souligne Mohamad Mahmoud, membre de la mission. Près de la chapelle, un nombre considérable de graffitis a été trouvé, ce qui témoigne que ce site était un lieu de résidence et une voie commerciale durant le paléolithique et jusqu’à l’époque gréco-romaine. Selon Saad, ce site renferme, très probablement, des vestiges datant de l’Egypte Ancienne.
La grotte d’Al-Beida.
Les environs de la ville de Chalatine conservent des sites encore inconnus. Ainsi, à 30 km au sud de la ville se trouve la région de Soheil qui compte de nombreuses vallées fermées par des blocs de roches à cause des torrents. Bien que l’accès à cette région soit bloqué, les membres de la mission ont réussi à y pénétrer pour atteindre la vallée de Meneigaa. « Sur les deux côtés de cette vallée, nous avons trouvé des textes arabes rédigés en différentes formes d’écritures : koufie, andalouse, naskh et roqaa. Les sujets abordés dans ces textes sont variables. Certains textes portent sur l’amour, d’autres sont des complaintes ou de la satire en prose ou en poésie », affirme le directeur. Et d’ajouter que les indices témoignent que cette région était probablement utilisée comme une route de pèlerinage. Les roches qui côtoient la vallée de Meneigaa sont couvertes de milliers de graffitis. Cette vallée mène à l’une des plus importantes carrières où les Anciens Egyptiens extrayaient l’or. « Les traces de l’or sont claires dans les couches géologiques de la montagne. Nous avons aussi découvert un nombre considérable de moulins cassés qui étaient utilisés pour broyer le quartzite dur, afin de dégager l’or », reprend Mohamad Mahmoud. Et d’ajouter: « Nous avons aussi découvert des milliers de morceaux de poteries qui remontent à différentes époques, notamment la période gréco-romaine. Ces poteries servaient à stocker l’eau utilisée par les ouvriers pendant leur travail dans les carrières. On a aussi découvert des vestiges des maisons de ces ouvriers ». D’après les préhistoriens, ces indices archéologiques indiquent que cette carrière était utilisée avant le Nouvel Empire et durant l’époque gréco-romaine.
Examens des graffitis.
Les relevés archéologiques ont révélé aussi l’existence d’une grotte de 8 m de profondeur située à 45 km au sud de la ville de Chalatine. Les examens préliminaires effectués sur cette grotte, de forme conique, ont révélé un nombre considérable de graffitis préhistoriques couverts de gravures islamiques. « Il s’agit probablement de cartes réalisées pour guider les gens de passage à sortir de la vallée », reprend Saad. La vallée d’Al-Beida est l’une des plus importantes qui mènent vers le port d’Izab utilisé à l’époque fatimide par les pèlerins venant du Soudan et se rendant à La Mecque. Au fil du temps, ce port a été enseveli sous le sable, et son emplacement n’était plus connu. Les membres de la mission ont découvert aussi un port fatimide et une mosquée construite pour les pèlerins. Selon les historiens, le site du port d’Izab abritait, en plus de la mosquée, une quarantaine et les attaches des navires sur le quai dont une qui existe encore. « Le port d’Izab est un site très riche sur le plan historique et archéologique. Mais comme les autres sites, il a besoin de travaux de restauration », conclut Saad. Cette richesse invite les archéologues à organiser de nouvelles missions de fouilles.
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