C’est la première découverte du genre dans la région. Une partie d’une statue en granit d’un sphinx mis au jour la semaine dernière provoque un débat passionné dans les milieux archéologiques.
Le fragment comporte un cartouche hiéroglyphique au nom du pharaon Mykérinos qui régna il y a près de 4 500 ans. Sa pyramide est la plus petite des trois du plateau de Guiza. « C’est la seule statue égyptienne jamais retrouvée dans le Levant », indique Amnon Ben-Tor, professeur d’archéologie à l’Université hébraïque de Jérusalem. « Il s’agit aussi du seul sphinx connu de ce roi. Aucun sphinx de ce roi n’a jamais été retrouvé, pas même en Egypte », précise l’archéologue, directeur des fouilles sur le site de Tell Hazor, en Galilée, où a été retrouvé le fragment.
Ben-Tor a souligné qu’en plus du nom de Mykérinos gravé entre les pattes du sphinx, se trouvent des symboles référant à la ville d’Héliopolis où se trouvait le temple abritant la statue.
Le fragment découvert fait environ 50 centimètres de long alors que la statue dans son ensemble avait une taille de 150 centimètres de long sur 50 centimètres de large.
La façon dont le sphinx est arrivé à Tell Hazor n’a pas été élucidée. « Il semble peu probable qu’il soit arrivé lors du règne de Mykérinos, car il n’y avait alors aucune relation entre l’Egypte et cette partie du monde, poursuit Amnon Ben-Tor. L’Egypte avait des relations avec le Liban, en particulier via l’ancien port de Byblos, pour l’importation du bois de cèdre, mais pas avec la Galilée ».
Une des hypothèses serait que la statue provienne du pillage de la Basse-Egypte par les Cananéens aux XVIIe-XVIe siècles av. J.-C. Mais le plus probable serait qu’il s’agisse d’un cadeau offert par un monarque égyptien plus tardif. « Il est possible que le sphinx soit arrivé à Hazor après le début du Nouvel Empire, en 1550 av. J.-C., pendant lequel l’Egypte régnait sur Canaan et entretenait des liens étroits avec les souverains locaux qu’elle avait laissés sur le trône. La statue a probablement été envoyée par un souverain égyptien au roi de Hazor, le plus important de la région ».
Selon Amnon Ben-Tor, le sphinx a probablement été volontairement brisé lors de la prise de la ville par ses nouveaux maîtres, désireux d’affirmer leur pouvoir. Les incrustations ont été méticuleusement retirées par des restaurateurs avant que ne soient découverts les hiéroglyphes.
Rien d’anormal
L’archéologue Zahi Hawas estime normal de trouver des pièces archéologiques égyptiennes en Palestine, en Syrie ou au Liban. Le pouvoir de l’Egypte s’étendait sur beaucoup de régions sous les XVIIIe, XIXe et XXe dynasties.
« On a déjà trouvé des statues datant de l’Egypte Ancienne en Palestine et en Syrie, non loin d’Israël », assure Hawas, tout en expliquant qu’il n’est pas possible de revendiquer la restitution d’une telle statue. Selon la loi internationale, les pièces antiques appartiennent au pays où elles ont été découvertes, même si elles appartiennent à la civilisation d’un autre pays.
Dans le même contexte, Abdel-Halim Noureddine, professeur d’égyptologie à l’Université du Caire, atténue l’importance de cette découverte qui, selon lui, n’est pas une première. D’autres sphinx ont, en effet, été découverts en Palestine dans le passé.
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