Les premières années de vie, le mariage en Egypte, le mariage et la vie en Iran, l’engagement communautaire, la charité et la philanthropie, la vie ultérieure à Alexandrie. Tels sont les titres attribués aux 6 principales vitrines relatant la vie de la princesse Fawziya (5 novembre 1921-2 juillet 2013) dans le cadre d’une exposition intitulée « Princesse Fawziya, la dualité de la femme égyptienne à travers les yeux occidentaux et égyptiens », tenue dans la bibliothèque des livres rares et des collections privées de l’Université américaine du Caire (AUC). Elle a été inaugurée le 8 août et se tiendra jusqu’au 31 octobre.
Soeur du roi Farouq, la princesse Fawziya a aussi été la première épouse du prince iranien Mohamad Reza Pahlavi, qui est devenu plus tard le shah d’Iran. Les vitrines de l’exposition renferment des photos familiales et d’autres publiées dans la presse égyptienne et occidentale, des articles, des couvertures des magazines ainsi que des monnaies souvenirs, sans oublier le drapeau du Royaume égyptien. « Cette exposition marque la 6e année de la mort de la princesse Fawziya, qui est décédée en 2013 en Egypte », indique Iman Morgan, directrice-assistante des projets spéciaux et responsable des médias et du développement professionnel à l’AUC. Elle explique que l’exposition de la princesse Fawziya est le fruit d’une recherche entamée par la jeune Jana Amin, étudiante à l’académie Milton de l’Etat américain du Massachusetts, en coopération avec la direction de la bibliothèque des livres rares et des collections privées. « C’est la première coopération de ce genre, afin d’encourager les jeunes générations à la recherche et à la documentation académique », ajoute la directrice-assistante.
(Photo : AUC)
Iman Morgan indique que les préparatifs de l’exposition ont pris un an. « Réunir la documentation demandée n’a pas été aisé, surtout que les descendants de la famille alide préféraient le silence. J’ai consulté plusieurs vendeurs d’anciens livres, de journaux et de magazines partout au Caire pour trouver les documents voulus et les acheter à des prix convenant au budget de l’exposition », souligne, quant à lui, Hani Samir, assistant des projets spéciaux à l’AUC.
Le thème de l’exposition est la vision de la femme égyptienne, représentée par la princesse Fawziya, dans la presse égyptienne et la presse occidentale. Par exemple, les journaux et les magazines égyptiens comme Al-Ahram, Akhbar Al-Youm, Al-Mossawer et Akher Saa. Quant aux magazines étrangers, on remarque The Times, The New York Times Magazine, The Washington Post, Life Magazine et Images. D’autres sources sont les archives de l’ambassade britannique et les New National Archives au Royaume-Uni.
Les titres attribués aux vitrines correspondent aux différentes étapes de la vie de la princesse Fawziya. « Les Premières années de vie », par exemple, sont racontées grâce à une collection de photos de la princesse datant de son enfance, avec son frère aîné, le futur roi Farouq, et ses soeurs au palais Qobba. Le visiteur peut aussi admirer l’annonce royale de la naissance de la princesse, publiée dans le journal Al-Ahram et signée par le roi Fouad en personne. Cette annonce est accompagnée des félicitations adressées au roi par des personnes importantes de la société à l’époque. La même vitrine montre l’arbre généalogique de la famille alide ainsi que des pièces de monnaie souvenirs en bronze de Mohamad Ali pacha et des rois Fouad et Farouq. L’arrière-plan de la vitrine est constitué du beau drapeau du Royaume égyptien.
Un mariage légendaire
Journaux, photos et documents font la matière de l'exposition. (Photo : AUC)
Le mariage de la princesse Fawziya occupe deux vitrines. « Nous remercions l’historien Magued Farag pour sa contribution. Il a enrichi l’exposition par son album privé du mariage légendaire de la princesse Fawziya avec le prince Mohamad Reza Pahlavi. Magued Farag a aussi présenté un discours à l’occasion de l’inauguration de l’exposition », souligne Morgan. Le cortège de ce mariage est resté dans les mémoires. Les festivités ont commencé en Egypte pour prendre fin en Iran. C’était en 1939. Le magazine égyptien Al-Mossawer a documenté en photos toutes les étapes du mariage. Moustapha Al-Maraghi, cheikh d’Al-Azhar à l’époque, a enregistré en personne le contrat du mariage, comme montrent les photos. Les organisateurs de l’exposition ont choisi de présenter la photo des jeunes mariés en famille sur l’étoffe d’une robe de mariée de l’époque. A cette occasion, la princesse Fawziya a dit à sa soeur Faïza : « Öbalek orayeb » (de même pour toi bientôt), selon le magazine Akher Saa, qui a décrit en détail le mariage légendaire.
En Iran, les hauts fonctionnaires et l’armée ont accueilli le couple à son arrivée. Les soeurs du prince et sa mère attendaient la princesse égyptienne. Elle était élégante, bien instruite, cultivée et parlait plusieurs langues, soit le français, l’anglais, l’italien, l’espagnol, l’allemand, le portugais, l’arabe et le turc. « Elle a appris la langue perse en dix mois seulement. Elle la prononçait avec un joli accent français », a indiqué le shah Mohamad Reza Pahlavi dans ses mémoires après le divorce. Les photos du nouveau couple ont occupé tous les magazines orientaux. En plus, la princesse, devenue un an plus tard impératrice, a fait la couverture du magazine anglais The Times. Sa fille aînée Chahinaz, née en 1940, a, elle aussi, attiré l’attention de la presse.
Selon la presse occidentale, la vie de la nouvelle impératrice d’Iran était difficile. Le Life Magazine a notamment parlé de la solitude et de l’emprisonnement de la reine Fawziya à la cour du shah. Et ce, malgré l’estime et l’amour de ce dernier pour son épouse. Le mariage a d’ailleurs pris fin en 1948. Les raisons réelles du divorce restent inconnues et ambiguës pour les historiens.
Une princesse philanthrope
(Photo : AUC)
De retour en Egypte, la princesse Fawziya a repris ses activités et ses engagements communautaires. Elle s’est notamment portée bénévole pour soigner les blessés de guerre. Sa photo, entre autres, en tenue d’infirmière, a fait plusieurs fois la une du magazine Al-Mossawer. Par ailleurs, elle a été la cheffe des femmes bénévoles à l’armée, comme on peut le voir sur l’une des couvertures du magazine Akher Saa. La presse égyptienne a mis l’accent sur la philanthropie de la princesse Fawziya. La voilà inaugurant l’hôpital Mabarra de Tanta, ouvrant une exposition de printemps et organisant des événements de bienfaisance. Quant au magazine The New York Times, « il présente la princesse derrière des barrières, donnant l’impression qu’elle est emprisonnée au sein du palais royal. Les articles du magazine parlent d’une souffrance de la princesse après son divorce, bien qu’elle soit en pleine activité et enthousiaste », reprend Morgan.
La princesse Fawziya s’est ensuite mariée avec Ismaïl Chérine, dernier ministre du ministère de la Guerre sous la souveraineté du roi Farouq, et a eu deux enfants, Nadia et Hussein. Après le déclenchement de la Révolution de 1952, la princesse a préféré rester en Egypte, à l’écart des médias et de la vie publique. Lors d’un dialogue tenu entre la princesse Fawziya et l’ancien président Anouar Al-Sadate, elle lui aurait dit, selon The New York Times : « J’ai perdu mon trône deux fois. La première après mon divorce de Mohamad Reza Pahlavi et la deuxième après le déclenchement de la Révolution de 1952 ».
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