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Deux temples surgissent des profondeurs

Dalia Farouq, Mardi, 20 août 2019

Une mission égypto-européenne vient de mettre au jour les vestiges de deux temples engloutis dans la Méditerranée sur le site de Thônis-Héracléion, près d’Alexandrie. D’autres découvertes ont été faites non loin de là, dans l’ancienne cité de Canope, elle aussi ensevelie près des côtes égyptiennes.

Deux temples surgissent des profondeurs
Un archéologue en train de fouiller au fond de la baie d'Abouqir.

Inondées il y a près de 1 500 ans, les anciennes cités de Thônis-Héracléion et de Canope ne cessent de révéler de nouveaux secrets. Plusieurs découvertes importantes ont été faites dans cette région, située dans la baie d’Abouqir, à l’ouest d’Alexandrie. Les archéologues de l’Institut Européen d’Archéologie Sous-Marine (IEASM), qui mènent des fouilles conjointes avec le département central des antiquités sous-marines dans la baie d’Abouqir, ont ainsi découvert, la semaine dernière, les ruines de deux temples remontant à la XXXe dynastie (IVe siècle av. J.-C.) ainsi que des objets restés intacts malgré la longue durée dans les profondeurs.

Selon Ihab Fahmi, directeur du département central des antiquités sous-marines, les recherches ont été menées par des plongeurs et des archéologues qui ont effectué une nouvelle campagne d’exploration à l’aide d’un appareil de scannage en coupe du sol appelé SSPI. Cet appareil très moderne permet de transmettre les images des traces archéologiques situées dans les fonds marins ou enterrées sous le sable. « C’est grâce à cet appareil qu’on a détecté, pour la première fois, une extension du port d’Héracléion, méconnue jusqu’à présent », se réjouit Fahmi.

Pendant deux mois de fouille, les plongeurs et archéologues dirigés par l’archéologue français Franck Goddio, président de I’IEASM, ont mis au jour les ruines d’un temple gréco-romain enseveli sous 3 mètres de sédiments. D’après le communiqué de presse du ministère des Antiquités, il s’agit du temple principal de la ville, celui d’Amun Gereb. Ils ont également mis au jour des objets en argent et en bronze, de nombreux ustensiles de stockage, des statuettes, des colonnes, des objets rituels ainsi que des pièces de monnaie datant du règne de Ptolémée II. Ils sont en bon état de conservation malgré les années passées dans les profondeurs. En outre, les archéologues ont été surpris par la découverte des ruines d’un autre temple, de style grec. Plus petit que le premier, il était enseveli dans le limon, une formation sédimentaire.

Héracléion, une histoire riche

Deux temples surgissent des profondeurs
Une pièce de monnaie et un bijou découverts à Héracléion.

Thônis-Héracléion, nommée d’après le héros grec Héraclès, a été construite au VIIIe siècle av. J.-C. à l’entrée du delta du Nil, non loin de la mer Méditerranée. Située dans une position stratégique, elle est rapidement devenue le principal port de l’Egypte Ancienne et un important centre de pouvoir religieux, notamment grâce à son temple principal dédié au dieu Amon-Gereb, bâti au coeur de la cité. Elle a été engloutie et rayée de la carte au VIIe siècle de notre ère, à la suite d’un tremblement de terre qui a créé un raz-de-marée. Si la ville antique a été mentionnée par plusieurs historiens et sur certaines constructions, aucune trace n’a été trouvée jusqu’à la fin des années 1990, quand ses ruines ont été découvertes par hasard dans la baie d’Abouqir par l’archéologue français Franck Goddio et son équipe.

Les archéologues y ont depuis dégagé de précieuses trouvailles du sable, comme une stèle en granit noir de 1,6 tonne. Celle-ci était gravée au nom du pharaon Nectanebo Ier (378-362 av. J.-C.) et présentait des informations comptables, comme les taxes imposées aux marchands grecs. « Cette ville était un centre commercial important entre l’Egypte et les pays du bassin méditerranéen », explique le chef du département central des antiquités sous-marines. Les fouilles menées dans la baie d’Abouqir avaient aussi mis au jour, au fil des années, de nombreux trésors, comme des statues, des sarcophages, des colonnes ou encore des dizaines de bateaux. Enfin, elles avaient permis de localiser une partie des vestiges du temple principal englouti dans les profondeurs.

Canope, ville d’art et de culture

Deux temples surgissent des profondeurs
Une pièce de monnaie et un bijou découverts à Héracléion.

Quant à la cité de Canope, les archéologues y ont trouvé, au cours de la dernière campagne de fouille, des vestiges architecturaux qui témoignent d’une expansion inconnue de la cité, au sud, sur une distance d’environ un kilomètre. Des pièces en bronze de l’époque ptolémaïque et des pièces d’or de la période byzantine ont été trouvées à cet endroit. Ces trouvailles montrent qu’il y avait une grande activité commerciale à Canope entre le IVe siècle av. J.-C. et l’ère islamique. Située à l’époque sur le Delta, à l’embouchure de la branche canopique du Nil, c’est-à-dire la plus importante des sept branches du fleuve à cet endroit, Canope était un port égyptien ouvert aux commerçants grecs et phéniciens. « C’était aussi un centre important de culte des dieux égyptiens et reconnue comme la ville de l’échange de l’art et de la culture entre les civilisations grecque et égyptienne », explique Fahmi.

Selon le chef du département central des antiquités sous-marines, les archéologues ont découvert un total de 75 navires depuis qu’ils ont commencé à fouiller dans la région, il y a plus de 20 ans. Durant la saison de fouille actuelle, les débris du navire numéro 61 ont tous été trouvés. « Ce navire mesurait 13 mètres de long et 5 mètres de large », précise Fahmi, ajoutant que l’étude des trouvailles de cette saison de fouille fructueuse se poursuit. « Le bon état de conservation de ces découvertes nous aidera beaucoup dans nos études ainsi que pour les prochaines saisons de fouille », conclut-il.

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