Ornementations diverses, voilà la spécificité de l'église de Saqqaïne.
(Photos: Doaa Elhami)
L’église de l’archange Gabriel a 150 ans. Située dans la petite ruelle des Saqqaïne (porteurs d’eau) à Abdine, elle est longtemps restée dans l’oubli.
Pour rendre justice à ce joyau ignoré du patrimoine égyptien, un livre revient sur son histoire, décrypte son architecture et met en évidence les trésors chrétiens qu’elle renferme. Fresques, peintures murales, icônes, horloge et bibliothèque … cet édifice religieux conserve encore de nombreux mystères.
L’histoire commence quand Kyrillos IV, connu comme étant « le père de la réforme », décide de bâtir une église dédiée à l’archange Gabriel. « A cette époque, les chrétiens d’Abdine devaient se rendre à la Cathédrale qui se trouve à la rue Clot Bey. Le patriarche Kyrillos IV décida alors de fonder cette église à Abdine pour les habitants du quartier », explique Waguih Georges, l’auteur de Ange, Eglise et Annonciation, l’archange Gabriel et son église à Saqqaïne.
C’est le rez-de-chaussée d’une grande maison appartenant à un haut fonctionnaire chrétien, qui est transformé en 1855 en église. Le premier étage devient une école pour les filles du quartier. « C’était la première école consacrée aux filles au Caire. Cette initiative a précédé les pensées de Qassem Amin pour l’émancipation des femmes », précise l’auteur.
Ce bâtiment a accompli son rôle religieux et éducationnel pendant 35 ans. Mais très vite, sa taille ne suffit plus. En 1881, les hauts fonctionnaires coptes remplacent la petite église par une autre, plus spacieuse.
Le budget de la construction était au départ 950 L.E. Il atteint rapidement les 4500 L.E., une somme considérable à l’époque. Il faut, en effet, démolir quatre maisons pour agrandir l’édifice.
Style en vogue
Le style architectural de l’église est le style classique européen. Un style très en vogue en Egypte à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle. Surmontée de deux minarets, elle se distingue par ses douze coupoles cylindriques, dont une coupole principale de forme ovale. « Cette coupole est unique au monde », affirme Waguih Georges.
La coupole est ornée d’une scène représentant l’Annonciation. Elle montre l’archange Gabriel en train d’annoncer la naissance de l’enfant Jésus à la Vierge Marie. Selon l’auteur, la scène centrale de l’église est généralement dédiée au Christ. Le fait qu’elle est ici dédiée à l’archange Gabriel donne au bâtiment sa spécificité.
L’église a emprunté son iconostase à l’église d’Abou-Seifein au Vieux-Caire. Récemment restaurées, les icônes remontent au XIXe siècle et à la première moitié du XXe siècle. Parmi celles-ci figure une icône de saint Marc assis sur un trône, en tenue royale et coiffé d’un turban ecclésiastique du XVIIIe siècle. A côté de lui se trouve un lion à tête humaine. Selon l’auteur, une telle représentation de saint Marc est exceptionnelle.
L’autre joyau de l’église est l’immense horloge fabriquée en France. L’église comprend aussi une petite chapelle dont la fenêtre de communion existe encore. « Actuellement, elle est consacrée aux reliques des saints, à l’instar de sainte Berbara et des martyrs, notamment ceux du Fayoum ».
Mais l’église tombe dans l’oubli. « J’ai rédigé ce livre pour conserver la mémoire de l’église et des habitants de la ruelle », explique Waguih Georges. Mais au-delà de l’oubli, des dangers plus graves guettent l’église de l’archange Gabriel.
Ses murs souffrent d’humidité et d’érosion dues à la pollution. Malgré un projet de restauration achevé il y a quelques mois, le problème n’est pas réglé. D’après les restaurateurs, il faudrait un budget important afin de mettre en place des solutions pour éviter que l’eau ne vienne détériorer les fondations des murs. Mais ce projet salvateur risque de prendre du temps.
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