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Un site qui ne cesse de surprendre

Nasma Réda, Mardi, 29 mars 2016

La découverte d'un ensemble exceptionnel de pièces antiques, à Tell Tebella, dans le gouvernorat de Daqahliya (dans le Delta du Nil), semble annoncer une nouvelle série de révélations.

Un site qui ne cesse de surprendre

Des centaines de pièces antiques en bronze, en faïence, en ivoire, et de nombreuses pote­ries viennent d’être découvertes, la semaine dernière, suite aux fouilles menées par la mission archéologique égyptienne, sur la colline de Tell Tebella, dans le gouvernorat de Daqahliya, à 9 km du nord de l’ancienne capitale égyptienne, Mendès.

Il s’agit d’un ensemble de statuettes repré­sentant différentes divinités égyptiennes, notamment Osiris, dieu des morts et de la vie éternelle, Horus, le dieu faucon, Taouret, la déesse hippopotame, et Hatmehyt, déesse poisson de Mendès.

Il y a également des artefacts incrustés de pierres précieuses et semi-précieuses, ainsi que des bijoux en or et des cartouches sur lesquels apparaît le nom du pharaon Sheshonq Ier, fondateur de la XXIIe dynastie (IIIe période intermédiaire, de 945 à 924 av. J.-C.). « Cette région est riche et chaque jour, on découvre de nombreuses statuettes et pièces antiques », explique non sans fierté Salem Al-Boghdadi, directeur général des antiquités à Daqahliya opérant actuellement sur ce site. « Cette mission, qui compte une vingtaine d’archéologues et ouvriers, fait des décou­vertes régulières.

Il y a quelques jours elle a pu découvrir une statue royale en calcaire de 63 cm, mais malheureusement, sans aucune inscription », annonce le directeur du site qui s’interroge : comment une statue royale pouvait-elle se trouver parmi une nécropole de simples citoyens ? De même, il y a quelques semaines, la mission a trouvé un sarcophage de 25 tonnes en basalte noir. « Ce sarcophage a été pillé à l’époque tardive, mais on a trouvé autour de lui plusieurs ouchebtis », ajoute-t-il.

C’est en fait suite à une décision ministé­rielle en septembre dernier que cette mission a pris la charge de fouiller ce chantier, d’une superficie de 8 feddans (3,3 ha). Et depuis, les découvertes se succèdent. « Ce site faisait partie d’une grande nécropole publique remontant à l’époque tardive (712-332 av. J.-C.) et qui a été réutilisée par les Gréco-romains (332 av. J.-C.-642 ap. J.-C.) », déclare Mahmoud Afifi, chef du secteur des antiquités égyptiennes au ministère. L’ampleur des découvertes est telle que 500 pièces antiques ont été transférées au Musée du Caire et au Nouveau Grand musée, alors que le reste des pièces a été déposé dans les entrepôts du gouvernorat.

C’est un site qui ne cesse de surprendre les archéologues. Selon le directeur du site, les pharaons y ont bâti de grandes tombes qui atteignent parfois 20 m de large. Elles sont placées l’une au-dessus de l’autre. « Dans chaque tombe on a découvert une dizaine de squelettes regroupés, dont la plupart remonte à la XXIIe et à la XXXe dynastie av. J.-C. Les Grecs ont réutilisé ces tombes soit en bâtissant leurs propres tombeaux par-dessus ou parfois pour y vivre », ajoute-t-il. Afifi explique que ce qui a été découvert dans ces chambres funé­raires est un ensemble de trésors d’une valeur inestimable. Malheureusement, selon lui, un certain nombre de tombes a été pillé ou détruit lors des invasions assyriennes ou perses.

« Rôle dans le commerce »

Un site qui ne cesse de surprendre

La ville de Tell Tebella a eu une grande importance dans l’Egypte Ancienne. Située sur la branche Est du Nil nommée Atouines (ou la branche mendésienne) à quelques kilomètres du nord de Mendès, capitale de l’Egypte à la XXIXe dynastie (399 à 380 av. J.-C.), Tell Tebella, tout comme la ville de Mendès, for­mait les principales routes commerciales dites « routes de la soie » ou « routes sécurisées », qui reliaient l’Egypte à l’Asie. « Grâce à ces fouilles, nous constatons que les deux villes ont joué un rôle important dans le commerce depuis l’Ancien Empire jusqu’à l’époque romaine », souligne Salem Al-Boghdadi.

A noter que ce site archéologique n’a été fouillé pour la première fois qu’en 2000 par une mission française, qui avait découvert un temple dédié à la déesse poisson de Mendès, Hatmehyt, dont l’animal sacré est en forme de dauphin. Selon un récit mythologique de la Basse Epoque, Hatmehyt aurait participé à la recherche des morceaux dispersés du corps d’Osiris. « A l’époque peu d’endroits du chan­tier avaient été fouillés », explique-t-il. C’est ce qui pousse l’équipe égyptienne à continuer ses fouilles. Elle espère également retrouver des vestiges royaux encore plus importants que ceux déjà découverts. Puisque toujours à Tell Tebella, non loin de l’actuelle zone de fouilles, une mission archéologique égyptienne avait découvert par coïncidence en 2014 un mastaba de 7 m x 10 m construit en brique crue, consa­cré à une femme de la IIe dynastie av. J.-C. appelée Werty, enterrée avec son sarcophage et 180 ouchebtis.

Selon Al-Boghdadi, le fait de trouver des sarcophages, un temple et des statues royales ne peut qu’être un indice de la proximité d’une nécropole royale ou au moins appartenant à des nobles et des prêtres. Le principal pro­blème de ce site, tout comme tous ceux qui se situent dans le Delta, est le fait qu’ils appar­tiennent à des particuliers, des agriculteurs pour la plupart. « Je souhaite que le ministère des Antiquités puisse s’entendre avec les pro­priétaires pour pouvoir fouiller librement la région. Car en tant qu’ancien archéologue, je suis certain que sous les cultures il y a des traces de tombes. Un de mes rêves est de fouiller toute la colline à la recherche d’une nécropole royale », conclut-il.

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