
Sous les décombres 1900 pièces d'antiquité remontant à l'époque hellénistique. (Photo : Ibrahim Mahmoud)
Voulant construire un immeuble moderne sur la corniche d’Alexandrie, la compagnie Al-Baron pour les constructions a découvert au début des travaux, il y a deux ans, que le terrain de 1 300 m2 en question n’est autre qu’un site archéologique. Il aurait suffi quelques coups de pioche pour découvrir un grand cimetière et de nombreuses pièces rares remontant à l’époque hellénistique.
Malgré l’importance de la découverte, la compagnie a repris les travaux la semaine dernière. « Depuis quelques jours nous étions tous surpris que le ministère des Antiquités a abandonné le terrain au propriétaire qui a repris tout de suite la construction », s’étonne l’archéologue Amir Gamal.
Un grand nombre d’archéologues à Alexandrie ont lancé une campagne pour sauver le site et arrêter les travaux de construction. « Il faut rappeler que la ville d’Alexandrie est construite sur les décombres de trois cités antiques : l’Alexandrie ptolémaïque située à une profondeur de 12 m, l’Alexandrie romaine à 8 m, et l’Alexandrie islamique à 4 m. Jusqu’à nos jours, les découvertes archéologiques sont quasi quotidiennes », assure Gamal.
Après cette découverte il y a deux ans, une mission archéologique a déterré du terrain 1 900 pièces antiques. Elles remontent à l’époque entre la mort d’Alexandre le Grand à la fin du IVe siècle et jusqu’au suicide de Cléopâtre VII à la fin du Ier siècle av. J.-C. Plusieurs tombes, construites en brique et en pierre calcaire avec des squelettes et des sépultures d’enfants datant de l’époque hellénistique et romaine, ont été mises au jour. Les archéologues y ont aussi découvert des tombeaux sculptés dans la couche rocheuse en forme de fentes pour l’enterrement, et décorés avec des ornements.

Sous les décombres 1900 pièces d'antiquité remontant à l'époque hellénistique. (Photo : Ibrahim Mahmoud)
Pour sa part, Moustafa Rochdi, directeur général des antiquités à Alexandrie, assure que tous les monuments et pièces archéologiques provenant du site ont été transférés à des musées. « L’Autorité générale des antiquités a mis la main sur le site en 2013 et a transféré toutes les pièces extraites à des musées où elles sont en restauration », ajoute le responsable.
Rochdi explique aussi que les fouilles ont menacé d’effondrement les anciens bâtiments proches du site : « C’est pour cela que les autorités ont été obligées d'arrêter les travaux ». Le site est donc revenu à son propriétaire.
« C’est un site unique. Sa perte serait un drame archéologique », assure Ahmad Abdel-Fattah, archéologue et ancien directeur du Musée gréco-romain. Situé à Ard Al-Abd, ce terrain abrite le plus grand et le plus ancien cimetière romain de la ville, avec des ornements sans pareil.
« Ce genre de violations dont fait l’objet le patrimoine alexandrin n’est en effet dû qu’au déficit budgétaire de l’Etat, qui n’arrive pas à indemniser les propriétaires des terrains à valeur archéologique. Il faut trouver de nouvelles solutions pour résoudre ce problème », conclut Abdel-Fattah.
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