Sur les vestiges sud de la célèbre nécropole de Saqqara, située à 28 km au sud du Caire, la mission archéologique de l’Institut Français d’Archéologie Orientale (IFAO) poursuit ses recherches, fouilles et découvertes sur le site de Tabet Al-Gueich.
Dirigée par Vassil Dobrev, elle vient de mettre au jour une découverte spectaculaire : deux tombes des prêtres Sabi et Ankh Ti de la VIe dynastie, qui vivaient à l’époque du pharaon Pépi II (2240-2150 av. J.-C.). Cet égyptologue avait, au début de ses fouilles qui ont commencé en 2000, un objectif principal : apporter une preuve de l’existence d’un complexe funéraire, ou plutôt d’une pyramide d’au moins un pharaon absent de la liste royale d’Abydos.
Les fouilles ont mené à ce site fantastique qui chaque jour dévoile de nouvelles découvertes. Le choix du site de Tabet Al-Gueich, ou la colline de l’armée, a été déterminé à partir de plusieurs raisons. Entre autres, pour ses caractéristiques géographiques qui en font une surface suffisamment grande pour accueillir une pyramide royale et son temple funéraire : le site s’étale sur près d’un km2. La zone actuelle des fouilles ne représente que 2 % seulement de la surface totale du site.
« Lorsque j’étais jeune, l’un de mes rêves était de découvrir l’une des pyramides manquantes de la liste royale d’Abydos rédigée pendant la XIXe dynastie et qui mentionne le nom de huit pharaons. Quatre pyramides ont été découvertes, il en manque donc 4 », souligne Dobrev.
Sur ce site se trouvent des pyramides de la VIe dynastie appartenant à Téti, Ouserkarê, Méryrê (Pépi Ier), Mérenrê Ier, Néferkarê (Pépi II), Mérenrê II, Nétjerkarê et Menkarê.
Un site unique
La tombe d'Ankh Ti, récemment découverte. (Photo : Ministère des Antiquités)
Le trajet menant à la colline de Tabet Al-Gueich n’est pas facile d’accès. Seuls les 4x4 peuvent se frayer un chemin. Au premier regard, la colline paraît désertique. Depuis son sommet apparaît d’un côté la pyramide de Djoser, de l’autre celle du roi Pépi Ier. Cinq autres pyramides apparaissent de loin. «
Je devais commencer mes recherches dans l’endroit qui se situe entre les pyramides de Djoser et d’Ounas au nord, et celles de Pépi Ier et Mérenrê Ier au sud, ce qui constitue un lieu probable pour l’établissement d’un monument royal », raconte Dobrev.
Les archéologues ont d’abord creusé sur près de deux mètres avant de trouver un mur épais suivi d’un autre, en contrebas. Des tonnes de sable ont été déplacées. Et depuis 15 ans, les découvertes se poursuivent. Chaque saison donne à ce site plus de richesse et révèle de nouvelles informations.
En s’avançant sur la colline, une large fosse apparaît, abritant un mur épais entourant le site, « c’était la seule manière à cette époque de protéger cette nécropole », explique Dobrev. Pour le visiteur, il faut être prudent et suivre un trajet précis.
L'entrée de la nécropole des prêtres. (Photo : Nasma Réda)
Mais une chose est sûre : «
Le roi ne vit pas seul, il y a toujours des prêtres qui l’entourent et c’est ce qu’on a trouvé en s’infiltrant en bas de cette fosse. C’est un complexe funéraire fermé », déclare le directeur du site. Les trois premières semaines de fouille étaient consacrées à enlever le sable qui couvrait toute la nécropole. «
On a suivi de nouvelles méthodes pour enlever le sable afin de protéger le complexe », explique Dobrev. Une fois la première tombe découverte, il a rapidement deviné que ces cimetières allaient les mener à d’autres tombes.
Cinq mètres plus bas se trouve une cour à ciel ouvert. Un mur dévoile des bas-reliefs exceptionnels. Des peintures de couleurs vives apparaissent, dédiées au prêtre Her-néfer (Hanouéfer) ainsi qu’à son épouse et à son fils aîné. Puis se dévoilent une chapelle et six autres tombes qui remontent toutes à la VIe dynastie. Seules quatre parmi elles ont déjà été fouillées. Il s’agit de celles des prêtres Khnoumhotep, Pépyânkh et Khoui et Her-néfer.
Selon Dorbev, l’une des caractéristiques de ce site est la présence de nombreux puits. Dans le seul complexe de Khnoumhotep, trente-trois puits ont été trouvés. Les travaux de dégagement de la totalité des puits dans la tombe de Khnoumhotep achevés, il restera à fouiller et restaurer les tombes de Pépyânkh, de Khoui et de Her-néfer avec leurs nombreux puits funéraires et chapelles.
Nouvelles découvertes
D’un puits à l’autre et d’une tombe à l’autre, le visiteur se croit perdu. Un des puits fait 6 m de profondeur, l’autre 12 m. C’est ici que Dobrev a fait ses plus récentes découvertes, celles de deux chambres funéraires construites en calcaire blanc. Les murs sont joliment décorés avec des bas-reliefs représentant les deux prêtres Sabi et Ankhti présentant de nombreuses offrandes aux dieux.
Vassil Dobrev devant la chapelle de Hanouéfer. (Photo : Nasma Réda)
« Le travail de l’équipe a réussi à atteindre ces chambres et a trouvé les squelettes des deux prêtres dispersés sur le sol », souligne Mamdouh Al-Damati, ministre des Antiquités. Selon lui, le fait de trouver des pièces sur le sol indique que les deux tombes ont fait l’objet d’actes de vandalisme pendant l’Antiquité, probablement entre la VIIe et la VIIIe dynastie.
La mission de l’IFAO a pu découvrir à l’intérieur des deux tombes des pots en albâtre, des modèles d’offrandes en calcaire peint de couleurs vives et de la vaisselle en poterie. Les tombes de Sabi et d’Ankh Ti sont très similaires. « Les nombreuses scènes représentant leurs offrandes, en plus de la liste des noms du défunt, sont organisées de la même manière », souligne Kamal Wahid, directeur général de la zone archéologique de Guiza.
Bien que la mission ait déjà découvert un grand nombre de tombes, de puits et des milliers de pièces, Dobrev poursuit toujours ses recherches et son rêve : celui de trouver une pyramide.
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