De nouvelles vidéos concernant la Palestine ont été diffusées la semaine dernière sur la plateforme Docan, qui s’intéresse à présenter des contenus sociaux, sportifs et culturels. Ces vidéos font partie de toute une série consacrée à faire revivre la mémoire palestinienne, à travers des histoires populaires, des chansons et des contes traditionnels.
Le projet est initié par le fondateur de l’atelier de narration Beit Al-Hawadit, Mohamed Abdel-Fattah, connu sous le nom de Kallabala. « Touché par les récents événements de Gaza, j’ai commencé tout de suite à livrer mes impressions par écrit. Le lendemain, j’ai lancé un appel sur les réseaux sociaux, demandant aux internautes de partager leurs témoignages et leurs histoires personnelles, en lien avec l’actualité palestinienne », indique Kallabala.
Histoire d’une guerre est une vidéo, dont le texte est écrit et lu par Amany Khalil. Elle parle de la dame aux cheveux blancs qui porte le noir, ainsi qu’un keffieh sur les épaules. D’une voix chagrinée, elle évoque le jeu d’enfants « Libérer la Palestine » auquel elle avait l’habitude de jouer autrefois avec ses cousins. Les enfants faisaient semblant d’être des soldats palestiniens et égyptiens ; ils refusaient tous de représenter l’ennemi et tiraient sur les coussins du salon, les jetant par terre.
Les enfants d’hier sont devenus des adultes, voire des personnes âgées, qui vivent pour la plupart en exil. La vieille dame confesse par la suite que la Palestine lui manque et qu’elle a absolument envie d’y retourner et de visiter la mosquée d’Al-Aqsa et la basilique du Saint-Sépulcre.
« Les vidéos sont interprétées par un groupe de conteurs que j’ai moi-même formé. Je les guide simplement et les aide à trouver le ton adéquat à chaque histoire, pour mieux faire passer le message », souligne Kallabala, qui a fondé Beit Al-Hawadit (la maison des contes) en 2007. « Nous avons déjà donné plusieurs spectacles, une émission de télévision et des soirées de contes, mettant en avant les histoires personnelles mélangées aux sujets d’actualité. Nous travaillons souvent dans des lieux défavorisés et avec des personnes marginalisées », ajoute-t-il.
Sur une autre vidéo, Amina Al-Qady s’adresse aux enfants martyrs palestiniens. Elle lit une lettre à haute voix, dédiée à « Mohamed Al-Dorra, et Youssef, le petit aux boucles dorées, à tous ces enfants qui ont trouvé la mort pendant le sommeil », leur promettant espoir et liberté.
Résister à sa manière
Kallabala lui-même a écrit une lettre racontant l’histoire de l’enfant qu’on a vu sur les écrans, disant : « Merci l’ambulance, nous t’aimons bien ! », puis on voit des séquences réelles, montrant le même enfant sur le brancard.
La vidéo est si touchante qu’on a automatiquement les larmes aux yeux. « J’ai commencé à écrire des lettres aux enfants de Gaza après le bombardement de l’hôpital de Baptiste intitulé Al-Ahli Al-Arabi. Puis j’ai animé un atelier de deux jours sur ce sujet, et on a présenté une soirée au syndicat des Journalistes égyptiens, où on a lu ces lettres. La BBC en a fait une belle couverture, mais le lendemain, elle l’a supprimée de son site et ses pages sur les réseaux sociaux », précise le conteur. Et d’ajouter : « A l’issue de l’atelier, j’ai pensé à tourner des vidéos autour de ces lettres. Mon ami Ahmed Allam m’a alors proposé de le faire en coopération avec la plateforme Docan. C’est une manière de revivifier l’écriture épistolaire ; dans le temps, on avait l’habitude d’écrire des lettres aux gens qu’on aime ou à ceux auxquels on reprochait quelque chose ».
L’histoire folklorique de Zarif El-Toul a inspiré une vidéo, puisant dans la tradition orale palestinienne. Abanoub Zakaria imite brillamment l’accent palestinien, entrant dans la peau d’un militant, en chantant. « Le public suivant les vidéos sur les réseaux sociaux n’est pas le même que celui des soirées de contes, données sur scène. Alors, nous essayons de diversifier le public, en changeant les médias. Les vidéos et lettres seront traduites dans d’autres langues, pour qu’elles soient reprises partout dans le monde. C’est notre manière de résister ».
Malgré les restrictions imposées sur les réseaux sociaux au contenu palestinien, les 28 vidéos mises en ligne ont été visionnées plus de 100 000 fois en deux jours. Elles comportent des histoires, des témoignages, des lettres, 4 chansons folkloriques, 2 histoires du patrimoine palestinien et 2 poèmes : Al-Maaraka (la bataille) du poète palestinien Mouin Bsissou et La Toussaleh (pas de réconciliation) du poète égyptien Amal Donqol. « Les vidéos, qui comportent, entre autres, des extraits de poèmes du Palestinien Mouin Bsissou et de l’Egyptien Amal Donqol, varient entre une minute et demie et trois minutes. La plus longue vidéo dure 5 minutes », poursuit Kallabala, qui a encore en tête d’autres sujets narratifs sur la Palestine, notamment sur ses combattants à travers l’Histoire. « Ensuite, de la Palestine, je pars pour l’Egypte et le reste du monde, abordant l’histoire des indigènes en Amérique et en Afrique. Je suis encore en phase d’écriture et de documentation », conclut-il l
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